Spécialiste de l'arrimage aux soins

Spécialiste de l'arrimage aux soins

Los Angeles, États-Unis
2017

Une intervention centrée sur les clients s'avère efficace pour orienter les personnes nouvellement diagnostiquées vers des soins pour le VIH

Une étude menée aux États-Unis a trouvé que l'inclusion d'un spécialiste de l'arrimage aux soins dans le protocole de dépistage du Centre LGBT de Los Angeles a eu pour résultat que plus de 90 % des personnes nouvellement diagnostiquées étaient orientées vers un service de soins du VIH. De plus, une fois l'arrimage aux soins réussi, plus de 90 % des personnes étaient retenues dans les soins et bénéficiaient d'une suppression virale.

Projet du spécialiste de l'arrimage aux soins

En 2012, le Centre LGBT de Los Angeles a embauché un travailleur social clinique à titre de spécialiste de l'arrimage aux soins à temps plein. Ce poste a été intégré dans le protocole de dépistage du VIH du centre afin de faciliter l'orientation des patients vers les soins. Le spécialiste de l'arrimage aux soins utilise une approche centrée sur le client, ainsi que des techniques d'entrevue motivationnelle et de gestion des cas fondée sur les forces afin d'aider le client à adopter des comportements favorables à la santé. Le spécialiste travaille au rythme dicté par les besoins du client, le dirigeant vers les services nécessaires et fixant ses rendez-vous médicaux et autres selon les besoins. Des rappels sont envoyés le jour précédant les rendez-vous pour encourager le client à s'y présenter.

On peut diviser le travail du spécialiste de l'arrimage aux soins en trois phases.

Phase 1 : Tout de suite après avoir reçu son résultat positif au test de dépistage du VIH, le client rencontre le spécialiste de l'arrimage aux soins. Utilisant la technique d'entrevue motivationnelle, le spécialiste encourage le client à explorer ses préoccupations et discute avec lui de stratégies susceptibles de répondre aux besoins qui surgissent. Les deux objectifs de cette rencontre consistent à créer un plan de soutien et un plan d'arrimage aux soins pour le client. Même si le client n'est pas encore prêt à recevoir des soins médicaux, on fixe un rendez-vous pour aborder toutes les préoccupations exprimées avant la fin de cette première rencontre.

Phase 2 : En fonction des besoins du client, un contact est maintenu pour aider celui-ci à s'adapter, à naviguer dans le système de santé et à acquérir les compétences nécessaires pour réussir son implication dans les soins. Le contact peut avoir lieu en personne, au téléphone, par message texte ou par courriel, selon les besoins de la personne.

Phase 3 : Pour les clients qui sont prêts à recevoir des soins peu après le diagnostic, le spécialiste de l'arrimage aux soins réduit graduellement ses contacts avec le client. Si le client souhaite recevoir des soins au Centre LGBT, il est présenté aux membres de l'équipe de soins afin de favoriser l'établissement d'une relation. Si le client manque subséquemment des rendez-vous, le spécialiste de l'arrimage aux soins fait un suivi afin d'aider le client à surmonter toute barrière éventuelle. Enfin, dans le cas des personnes qui ne rencontrent pas le spécialiste de l'arrimage aux soins, des tentatives additionnelles sont faites dans le but d'établir un contact.  Ces tentatives cessent lorsque le client est finalement orienté vers des soins ou encore lorsqu'il demande au spécialiste de l'arrimage aux soins d'arrêter de l'appeler.

L'étude

L'impact du spécialiste de l'arrimage aux soins sur les personnes nouvellement diagnostiquées a été évalué entre mars 2014 et septembre 2015.1 Le résultat qui intéressait le plus les chercheurs était la présence du client à une consultation médicale auprès de n'importe quel fournisseur de soins primaires en VIH dans les trois mois suivant le diagnostic. Les résultats secondaires étaient la rétention dans les soins (deux consultations médicales à au moins trois mois d'intervalle sur une période de 12 mois) et la suppression virale lors des consultations de suivi (n'importe quelle charge virale inférieure à 200 copies/ml).

Sur 389 clients nouvellement diagnostiqués, 118 (30 %) ont été inscrits à l'étude. La majorité se composait d'hommes gais âgés de 18 à 29 ans qui avaient terminé l'école secondaire et qui avaient un domicile stable. Sur les 118 personnes inscrites,  94 % ont eu un rendez-vous médical dans les trois mois suivant leur diagnostic. En moyenne, le spécialiste de l'arrimage aux soins a passé 2,1 heures en consultation avec chaque participant lors de 4,9 interactions. Parmi les participants dont la liaison avec les soins a réussi, 92 % ont été retenus dans les soins, et 94 % de ces derniers ont atteint une suppression virale.

Quelle est la signification de ces résultats?

Cette étude démontre que l'incorporation d'un spécialiste de l'arrimage aux soins dans un protocole de dépistage peut donner lieu à des taux élevés d'arrimage aux soins, de rétention dans les soins et de suppression virale. D'autres modèles d'arrimage aux soins ont également donné des résultats bénéfiques. Les organismes qui cherchent à améliorer l'orientation vers les soins des clients nouvellement diagnostiqués devraient peut-être envisager les façons dont ils pourraient incorporer de telles interventions dans leurs programmes.

Référence

  1. Bendetson J, Dierst-Davies R, Flynn R, et al. Evaluation of a Client-Centered Linkage Intervention for Patients Newly Diagnosed with HIV at an Urban United States LGBT Center: The Linkage to Care Specialist Project. AIDS Patient Care and STDs. 2017 Jul;31(7):283–89.

AIMS

AIMS

les Pays-Bas
2017

Une étude effectuée aux Pays-Bas1 a conclu qu’une intervention comportementale offerte par des infirmières qui se servent des données provenant de moniteurs électroniques de médicaments pour améliorer l’observance thérapeutique au TAR a suscité une amélioration des résultats pour la santé. De plus, une analyse économique a révélé que cette intervention permettait de réaliser des économies.

Adherence Improving self-Management Strategy (AIMS) = Stratégie autogérée pour améliorer l’observance

L’AIMS consiste en une intervention comportementale individuelle, dirigée par des infirmières, qui incorpore la rétroaction sur l’observance captée par les couvercles des flacons équipés du Système de surveillance des événements médicamenteux (MEMS) (c.-à-d. un flacon électronique de comprimés qui capte de l’information sur la date et l’heure où le flacon est ouvert) et qui [en tant que programme] est conçue pour s’intégrer dans les consultations de routine en clinique.

Pour cette étude, 21 infirmières spécialisées en VIH provenant de sept cliniques participantes ont suivi trois séances de formation sur l’AIMS, notamment sur la façon d’utiliser les flacons équipés de couvercles MEMS, sur le logiciel et la façon de diriger l’intervention comportementale. Chaque séance de formation durait six heures (18 heures en tout). Une séance de rappel d’une heure et demie a été offerte à des groupes de deux à trois infirmières de chaque clinique après que les infirmières aient reçu la visite de deux à trois patients.

L’étude

Les chercheurs néerlandais ont effectué un essai ouvert randomisé multicentrique dans sept cliniques spécialisées en VIH entre 2011 et 2014. Les participants à l’étude ont été choisis au hasard pour recevoir les interventions de l’étude, c’est-à-dire l’AIMS (109 patients) ou la poursuite du traitement comme d’habitude (112 patients) dans le but d’évaluer l’intervention AIMS.

Les participants pouvaient participer à l’étude s’ils commençaient leur premier traitement VIH (patient naïf au traitement) ou s’ils étaient sous TAR depuis au moins neuf mois (patient déjà traité) et qu’ils présentaient une charge virale indétectable, mais qui risquaient de voir celle-ci devenir à nouveau détectable (remontée de la charge virale). Les chercheurs considéraient les participants à risque de voir une remontée de leur charge virale s’ils avaient eu au moins une charge virale détectable au cours des trois dernières années et si les chercheurs déterminaient qu’ils avaient présenté une observance thérapeutique sous-optimale durant deux mois de contrôle de base des couvercles.

Lors des visites en clinique, les infirmières téléchargeaient les données enregistrées par les couvercles MEMS et les utilisaient pour générer des rapports illustrant les tendances de l’observance des patients. Ces rapports étaient ensuite utilisés pour orienter les discussions entre l’infirmière et le participant afin de maintenir ou d'améliorer l’observance du participant. Si le participant continuait d’éprouver des problèmes d’observance, des consultations plus fréquentes auprès de l’infirmière étaient une option.

Les chercheurs mesuraient la charge virale plasmatique et le compte de CD4+ au début et après environ cinq mois, 10 mois et 15 mois dans le cadre des soins de routine de chaque participant. Pour les participants qui commençaient un traitement pour la première fois, le premier suivi se faisait après six mois pour permettre à leur charge virale de devenir indétectable.

Les participants ont été suivis pendant en moyenne 14,6 mois. Le nombre moyen de visites (3,2) étaient le même pour les deux groupes, soit l’AIMS et le groupe de traitement de routine. Au sein de ce dernier, la durée moyenne passée dans chaque clinique était de 19 minutes, tandis que la durée moyenne pour le groupe AIMS était de 29 minutes. Au cours de toute la durée de l’étude, les visites du groupe AIMS ont duré en moyenne 35 minutes de plus que celles du groupe de traitement de routine.

À la fin de l’étude, davantage de patients faisant partie du groupe qui recevait le traitement comme d’habitude présentaient une charge virale détectable (16,7 %) comparativement à ceux qui avaient reçu l’AIMS (9,6 %). Ces résultats étaient les mêmes, quelle que soit l’infirmière particulière qui avait dispensé les soins. De plus, les patients du groupe suivant le traitement comme d’habitude étaient beaucoup plus nombreux (22,8 %) à connaître un échec thérapeutique (se définissant comme deux charges virales détectables consécutives) que les patients du groupe AIMS (9,0 %). Ces résultats étaient semblables, peu importe si les participants ne faisaient que commencer le traitement ou s’ils en suivaient un depuis quelque temps.

Au cours de l’étude, les comptes de CD4+ moyens ont augmenté parmi les deux groupes, mais ils étaient considérablement plus élevés au 15e mois parmi les participants recevant l’AIMS comparativement à ceux qui avaient reçu le traitement comme d’habitude.

Une analyse économique de l’AIMS a estimé que cette intervention réduisait les coûts de santé pour la durée de la vie dans une proportion de 592 euros (environ 837 $ CDN ou 628 $ US) par patient. Une analyse plus poussée a démontré que si la stratégie AIMS était mise en œuvre auprès de 10 000 patients et qu’elle continuait pendant 18 mois, les systèmes de santé connaîtraient des économies de 6 millions d’euros (environ 8,7 millions $CDN ou 6,5 millions $US).

Qu’est-ce que cela signifie pour les fournisseurs de services canadiens?

Cette étude a démontré que les patients qui ont bénéficié d’une intervention AIMS pour améliorer leur observance ont obtenu de meilleurs résultats cliniques, y compris une amélioration de la charge virale et des comptes de CD4+ comparativement aux patients qui avaient reçu des soins réguliers. De plus, les chercheurs ont conclu que l’intervention pouvait permettre de réaliser des économies par rapport aux soins associés au traitement habituel. L’un des avantages de cette intervention est qu’elle peut être incorporée dans les rendez-vous prévus en clinique.

La mise en œuvre de programmes permettant d’améliorer l’observance peut engendrer un nombre accru de personnes vivant avec le VIH qui présentent une charge virale indétectable. Des bienfaits à long terme pour la santé sont associés au fait d’avoir une charge indétectable, qui permet également de réduire considérablement le risque de transmission du VIH.

Référence

de Bruin, M.; Oberjé, E. J.; Viechtbauer, W.; et coll., Effectiveness and cost-effectiveness of a nurse-delivered intervention to improve adherence to treatment for HIV: a pragmatic, multicentre, open-label, randomised clinical trial, Lancet Infectious Diseases, 2017;17(6): pp. 595–604.