Distribution de trousses d’auto-dépistage du VIH par des pairs

Distribution de trousses d’auto-dépistage du VIH par des pairs

Ouganda
2020

Dans le cadre d’un programme d’auto-dépistage du VIH mis en œuvre en Ouganda, des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HARSAH) ont été formés en vue de distribuer des tests d’auto-dépistage du VIH aux membres de leurs réseaux sociaux et sexuels. Le programme consistait à montrer comment utiliser le test d’auto-dépistage du VIH, à fournir des conseils aux personnes qui devaient l’utiliser, et à faire en sorte que celles dont le résultat était positif puissent passer un test de confirmation de l’infection par le VIH et recevoir un traitement. Il a été établi que la distribution de tests d’auto-dépistage du VIH par des pairs a permis de détecter sensiblement plus de cas non diagnostiqués d’infection par le VIH que l’approche standard (5,6 % contre 2,7 %), et de rejoindre plus de personnes n’ayant jamais passé de test de dépistage du VIH et d’HARSAH qui n’en avaient pas passé au cours des six derniers mois. 

Description du programme

Quinze HARSAH (les pairs) ont été formés en matière de techniques d’auto-dépistage du VIH, ce qui inclut l’interprétation des résultats du test OraQuick. En outre, les pairs ont reçu une formation concernant les aspects suivants :

  • Comment résoudre les difficultés susceptibles de survenir pendant le déroulement du test.
  • Quels conseils donner aux personnes qui passent le test.
  • Le test de confirmation.
  • Comment résoudre tout malentendu lié aux résultats des tests.
  • Comment faciliter l’accès aux services de lutte contre le VIH.

Chaque trousse d’auto-dépistage du VIH contenait des illustrations expliquant le mode d’emploi du test, de l’information sur le délai d’obtention des résultats, et des indications concernant leur interprétation. Après avoir reçu leur formation, les pairs ont été invités à utiliser le test d’auto-dépistage suivant les instructions fournies, afin de démontrer qu’ils avaient compris les modalités d’emploi.

Après avoir signé une entente de confidentialité, les pairs ont reçu dix trousses d’auto-dépistage du VIH à distribuer aux membres de leurs réseaux sociaux et sexuels. Le programme cherchait à rejoindre les HARSAH qui n’avaient pas passé de test de dépistage du VIH durant les six derniers mois.

Les pairs ont fourni une trousse d’auto-dépistage aux participants, mais ces derniers n’étaient pas tenus d’effectuer le test en présence du pair ni de lui en révéler les résultats. Les participants qui ont reçu une trousse ont été contactés par téléphone ou invités à se présenter dans un centre de test une à deux semaines après l’avoir reçue pour savoir s’ils l’avaient utilisée. Si une personne refusait le test d’auto-dépistage, elle était invitée à expliquer les raisons de sa décision. 

Si les participants ayant obtenu un résultat positif au test en informaient leurs pairs, ils étaient orientés vers un organisme local afin de passer un test de confirmation. Si le résultat du test de confirmation de l’infection au VIH était positif, les participants étaient orientés vers des services de lutte contre le VIH. Les pairs pouvaient également accompagner les participants passer le test de confirmation et être pris en charge par des services de lutte contre le VIH si les participants leur révélaient leurs résultats.

L’approche axée sur la distribution de trousses d’auto-dépistage par les pairs a été comparée avec les soins habituels, ou « approche de dépistage au clair de lune », qui consistait à faire passer un test de dépistage du VIH le soir dans les points de rencontre des HARSAH suivant les méthodes classiques.

Résultats

Les pairs ont distribué 150 trousses d’auto-dépistage du VIH, et 95 % des personnes ayant reçu une trousse (143) ont effectué un test d’auto-dépistage du VIH.

  • 94 % des participants ont été conseillés (après avoir passé le test) par le pair qui leur avait remis la trousse ou par un pair de l’établissement de santé affilié.
  • 61 % des participants ont passé le test de dépistage seuls.
  • 39 % des participants ont passé le test de dépistage avec l’aide ou en présence d’un pair.
  • 32 % n’avaient jamais passé de test de dépistage du VIH.

Huit participants (5,6 %) ont obtenu un résultat positif au test d’auto-dépistage du VIH. Les huit ont divulgué les résultats de leur test aux pairs, et les huit ont eu accès à des services grâce auxquels ils ont passé un test de confirmation et entamé un traitement antirétroviral.

À titre de comparaison, 147 HARSAH ont bénéficié de l’approche de soins habituelle durant la période d’étude, et quatre infections par le VIH jusque-là non diagnostiquées ont été dépistées. Une comparaison entre le groupe ayant reçu les trousses d’auto-dépistage du VIH et le groupe ayant reçu les soins habituels a révélé une différence statistiquement significative quant au nombre d’HARSAH ayant obtenu un résultat positif au test de dépistage du VIH (5,6 % et 2,7 % dans chaque groupe, respectivement).

Qu’est-ce que cela signifie pour les fournisseurs de services?

Cette étude montre que la distribution de tests d’auto-dépistage du VIH est faisable et acceptée par les personnes concernées. Ces résultats sont analogues à ceux d’études comparables menées au Royaume-Uni et aux États-Unis. Les fournisseurs de services pourraient envisager des moyens novateurs d’utiliser les tests d’auto-dépistage du VIH s’ils sont approuvés au Canada. Il peut s’agir non seulement de moyens de favoriser la distribution de tests d’auto-dépistage du VIH par les pairs, mais aussi des moyens pour que ces derniers en promeuvent l’utilisation, et facilitent l’accès des personnes ayant obtenu un résultat positif à des services comprenant un test de confirmation et un traitement contre le VIH.

Ressources connexes

Le transfert des tâches dans les services de dépistage du VIH – examen des données probantes

Dépistage rapide du VIH au point de service : Un examen des données probantes – examen des données probantes

Projet de dépistage du VIH par les pairs – étude de cas

Référence

Okoboi S, Lazarus O, Castelnuovo B et al. Peer distribution of HIV self-test kits to men who have sex with men to identify undiagnosed HIV infection in Uganda: a pilot study. PLoS ONE. 2020;15(1):e0227741.

Arrimage aux soins de l’hépatite C par l’entremise d’une infirmière de liaison à la clinique des maladies infectieuses de l’Université de Virginie

Arrimage aux soins de l’hépatite C par l’entremise d’une infirmière de liaison à la clinique des maladies infectieuses de l’Université de Virginie

Virginie, États-Unis
2019

Depuis l’avènement des antiviraux à action directe (AAD), le traitement de l’hépatite C est plus facilement accessible que par le passé, même si l’arrimage des patients aux soins reste problématique. Cette étude a porté sur l’intervention d’une infirmière de liaison chargée d’aider les patients à accéder au traitement de l’hépatite C dans une clinique des maladies infectieuses. L’étude concernait principalement l’arrimage aux soins, mais elle a également porté sur la participation des patients à chaque étape de la séquence de soins (p. ex., instauration du traitement, analyses dans le cadre du suivi). L’étude a permis d’établir que l’intervention de l’infirmière de liaison était efficace pour ce qui était de faire participer les patients aux soins : 76 % des patients qui ont été orientés vers la clinique ont ensuite eu accès aux soins. Bien qu’il s’agisse d’un taux élevé d’accès aux soins, cette étape de la séquence reste celle où les patients sont le plus susceptibles d’abandonner les soins.

Description du programme

La clinique en hépatite C des maladies infectieuses de l’Université de Virginie (UVA) fait partie du système hospitalier de l’UVA. L’orientation vers la clinique est effectuée par d’autres services du système hospitalier de l’UVA, par des fournisseurs de services communautaires ou par les services de santé locaux. Le personnel de la clinique comprend une infirmière de liaison à plein temps qui facilite l’arrimage aux soins et l’accès à des médecins et à l’équipe d’une pharmacie.

Lorsque les patients sont orientés vers la clinique, l’infirmière de liaison les contacte par téléphone ou par lettre pour fixer un rendez-vous. L’infirmière fait de multiples tentatives pour joindre un patient et reporte les rendez-vous selon les besoins. L’infirmière de liaison fournit également de l’information et des conseils au téléphone et lors des visites en personne.

Pendant la visite, l’infirmière s’assure que tous les documents requis aux fins de la réclamation d’assurance ou des programmes d’aide aux patients soient dûment remplis, afin que le patient puisse obtenir ses médicaments à temps. Une fois que le patient entame son traitement, il peut également compter sur l’équipe d’une pharmacie pour lui fournir au téléphone des conseils concernant ses médicaments. Si le patient est perdu de vue pendant le suivi, l’infirmière continue d’essayer de le contacter.

Résultats

Cette étude d’observation s’est déroulée de 2014 à 2018 et était principalement axée sur les taux d’arrimage aux soins. L’arrimage aux soins a été défini comme la présence à un rendez-vous à la clinique de traitement de l’hépatite C. L’infirmière de liaison a également recueilli d’autres renseignements concernant la progression du patient dans la séquence de soins, de l’étape de l’orientation à celle de la guérison. Les étapes de la séquence de soins étaient les suivantes :

  1. Orientation vers la clinique
  2. Arrimage aux soins (présence à un rendez-vous)
  3. Prescription de médicaments
  4. Instauration du traitement par le patient
  5. Fin du traitement par le patient
  6. Test de dépistage de l’hépatite C après le traitement
  7. Guérison ou réponse virologique soutenue (RVS)

L’infirmière a consigné les raisons pour lesquelles des patients ont abandonné les soins à tous les stades de la séquence.

Au total, 824 patients ont été admis à cette étude et 76 % (624) ont effectivement accédé à des soins (c’est-à-dire qu’ils se sont présentés à au moins un rendez-vous). Autres résultats :

  • 61 % (502) ont commencé le traitement
  • 57 % (471) ont terminé le traitement

Les pourcentages de patients continuant à participer à chaque étape de la séquence sont présentés ci-dessous.

Le taux d’abandon le plus élevé a été observé à l’étape de l’arrimage aux soins. Les raisons les plus fréquentes de l’échec de l’arrimage aux soins étaient l’absence des patients à un rendez-vous prévu, l’incapacité de contacter un patient orienté vers la clinique, et l’abandon des soins pour cause d’incarcération.

Cela étant, le taux global d’arrimage aux soins était comparable ou supérieur aux taux signalés dans d’autres études (p. ex., les données de surveillance font état d’un taux d’un arrimage aux soins de 17 % aux États-Unis en 2016). Le succès de ce programme en matière d’arrimage aux soins a été attribué à l’intervention d’une infirmière de liaison à plein temps qui a su faire participer activement les patients.

Qu’est-ce que cela signifie pour les fournisseurs de services?

Cette étude révèle que le recours à une infirmière de liaison peut être un moyen efficace d’aider les patients à participer à la séquence de soins dans un cadre clinique. Lorsque des efforts supplémentaires sont entrepris pour faire participer les personnes concernées, l’arrimage aux soins tend à s’améliorer, et par voie de conséquence, les taux de traitement et de guérison aussi. Bien que le taux d’abandon le plus élevé de l’étude se rapporte à l’étape de l’arrimage aux soins, la plupart des patients qui se sont présentés à leurs rendez-vous ont entamé et terminé leur traitement. Grâce aux nouveaux agents AAD, le traitement est devenu un processus relativement facile. Le principal obstacle reste, en premier lieu, d’amener les patients à participer aux soins.

Ressources connexes

Navigation pour les patients – Les sommaires de données probantes

Pensez aux liens : Approches programmatiques pour réussir l’arrimage aux soins pour le VIH – Examen des données probantes

Check Hep C – Les sommaires de données probantes

HepTLC – Les sommaires de données probantes

Références

Sherbuk J, McManus K, Knick T et al. Disparities in hepatitis C linkage to care in the direct acting antiviral era: Findings from a referral clinic with an embedded nurse navigator model. Frontiers in Public Health. 2019;7:362.

 

Programme de prescription d’une PrEP le jour même, dirigé par un pharmacien

Programme de prescription d’une PrEP le jour même, dirigé par un pharmacien

Mississippi, États-Unis
2020

Ce programme de prescription d’une prophylaxie pré-exposition (PrEP) par un pharmacien, le jour même, a été instauré au Mississipi afin de remédier au problème des taux élevés d’abandon à l’étape de l’orientation vers des services de PrEP. Le programme était destiné aux personnes très susceptibles de contracter le VIH, et consistait à mettre les clients en rapport avec un pharmacien exerçant dans le même bâtiment qu’un centre de dépistage du VIH et des infections transmissibles sexuellement (ITS). En vertu d’un accord de pratique collaborative, le pharmacien du programme pouvait prescrire une PrEP en dehors d’un cadre clinique à des clients qui s’étaient présentés le jour même au centre pour passer leurs analyses initiales. Les analyses initiales relatives à la PrEP (p. ex., taux de créatinine sérique) ont été réalisées lors d’une consultation de suivi clinique avec un fournisseur de soins dans les six semaines suivantes. Dans le cadre du programme, tous les clients qui avaient été mis en rapport avec un pharmacien se sont vu remettre une ordonnance initiale. Parmi ce groupe à haut risque, 33 % des clients ayant reçu une ordonnance se sont présentés à leur première consultation clinique dans les six semaines suivantes.

Description du programme

Les clients qui se sont présentés à un centre de dépistage du VIH et des ITS sans rendez-vous pourvu de deux infirmières se sont vu offrir le jour même une PrEP si le résultat du test de dépistage rapide du VIH au point de service était négatif. En outre, la PrEP était expressément recommandée aux personnes ayant obtenu un résultat négatif au test de dépistage rapide du VIH au point de service et qui étaient :

  • des hommes ayant rapporté avoir des relations sexuelles avec d’autres hommes;
  • des femmes transgenres;
  • des femmes cisgenres ayant reçu un diagnostic d’ITS, ayant eu des contacts avec un partenaire séropositif quant au VIH ou atteint d’une ITS, ayant eu des relations sexuelles suivies avec un partenaire séropositif pour le VIH ou dont le statut sérologique du VIH est inconnu, ayant déclaré s’être récemment injecté une drogue, ou ayant eu des relations sexuelles suivies avec des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes.

Les clients souhaitant obtenir une PrEP étaient mis en rapport avec le pharmacien sur place ou étaient joints par ce dernier dans les 48 heures s’ils ne pouvaient pas se rencontrer ce jour-là. Lors de la rencontre initiale, le pharmacien :

  • fournissait aux clients de l’information sur l’efficacité et les effets secondaires de la PrEP ainsi que sur la nécessité d’adhérer au traitement;
  • établissait les antécédents médicaux des clients, et notamment les contre-indications à la PrEP (p. ex., maladie rénale);
  • vérifiait si les clients présentaient des signes d’infection aiguë par le VIH (auquel cas, ils étaient orientés le jour même vers un spécialiste en vue de recevoir une prophylaxie post-exposition);
  • remplissait les documents nécessaires à la réclamation d’assurance.

Si le client ne présentait pas de signes d’infection aiguë par le VIH ni de contre-indications à la PrEP, une ordonnance de PrEP d’une durée de 60 jours était envoyée à la pharmacie de son choix. Une entente de pratique collaborative autorisait le pharmacien du programme à travailler en partenariat avec un médecin en s’en tenant à un rôle et à des tâches définis : le pharmacien pouvait évaluer le cas du client, l’orienter, lui remettre des médicaments et lui prescrire une PrEP (les ordonnances étaient rédigées au nom d’un médecin). Les analyses de laboratoire n’étaient pas effectuées lors de la rencontre initiale; le pharmacien planifiait une consultation de suivi dans les six semaines suivantes avec un fournisseur de soins cliniques qui procéderait aux analyses initiales liées à la PrEP (p. ex., taux de créatinine sérique). Si les clients ne venaient pas chercher leur ordonnance initiale, le pharmacien du programme essayait de les joindre une fois par semaine pendant un mois. Les ordonnances n’étaient pas renouvelées si le client ne se présentait pas à son rendez-vous clinique dans les six semaines.

Les patients présentant des signes d’infection aiguë par le VIH ou des contre-indications à la PrEP étaient orientés le jour même vers un médecin spécialiste des maladies infectieuses à des fins d’évaluation.

Résultats

Cette étude d’observation s’est déroulée entre novembre 2018 et mai 2019. Au total, 69 clients ont été orientés vers le pharmacien du programme afin de se faire prescrire une PrEP le jour même. Tous ces clients ont reçu une ordonnance de PrEP. Les résultats ont montré que :

  • 90 % des clients (62) ont été vus par le pharmacien le jour même où ils ont passé un test de dépistage du VIH;
  • 83 % des clients (57) ont reçu une ordonnance de PrEP le jour même où ils ont obtenu un résultat négatif au test de dépistage du VIH;
  • 77 % des clients (53) ont fait exécuter leur ordonnance de PrEP; 
  • 43 % des clients ayant fait exécuter leur ordonnance (23/53) se sont présentés à une consultation clinique dans les six semaines suivantes.

Par conséquent, 33 % (23/69) des clients ayant été orientés vers le programme de prescription d’une PrEP le jour même ont fait exécuter leur ordonnance de PrEP et ont eu accès aux soins liés à la PrEP.

Qu’est-ce que cela signifie pour les fournisseurs de services?

Bien que cette étude comptait un petit nombre de participants (69), elle portait principalement sur des personnes à risque élevé d’infection par le VIH, et visait à surmonter certaines des difficultés concernant les abandons habituellement associés aux orientations aux fins de la PrEP. Le programme a permis de prescrire une PrEP à tous les participants, mais seulement 33 % de ceux à qui on a prescrit la PrEP se sont présentés à une consultation clinique en vue d’une évaluation initiale. Par conséquent, cette approche met également en évidence la nécessité d’amener les clients à continuer à participer aux programmes, en plus de les inciter à entamer une PrEP.

Cette étude était sans précédent en ce sens qu’elle permettait aux participants d’entamer une PrEP hors d’un cadre clinique. Ce programme montre qu’il est possible d’instaurer une PrEP en dehors d’un cadre clinique et que les pharmaciens peuvent contribuer à faciliter ce processus.

Ressources connexes

La Clinique de PrEP Maple Leaf – Étude de cas

Outil de rappel par texto – Élément du programme

Références

Khosropur CM, Backus KV, Means AR et al. A pharmacist-led, same-day, HIV pre-exposure prophylaxis initiation program to increase PrEP uptake and decrease time to PrEP initiation. AIDS Patient Care and STDs. 2020;34(1):1-6.

Prescription d’une prophylaxie pré-exposition au VIH le jour même dans une clinique urbaine de dépistage des infections transmissibles sexuellement

Prescription d’une prophylaxie pré-exposition au VIH le jour même dans une clinique urbaine de dépistage des infections transmissibles sexuellement

Colorado, États-Unis
2020

Ce programme de prescription d’une prophylaxie pré-exposition (PrEP) le jour même a été mis en œuvre au Colorado dans une vaste clinique urbaine de dépistage des infections transmissibles sexuellement (ITS). Divers fournisseurs de services (p. ex., infirmières praticiennes, pharmaciens, agents de liaison auprès des patients) étaient chargés d’évaluer l’admissibilité des clients à la PrEP, d’instaurer immédiatement la PrEP et de leur faciliter l’arrimage à des soins de suivi de la PrEP. L’évaluation et les analyses de laboratoire relatives à la PrEP ont été effectuées lors de la visite des clients à la clinique de dépistage des ITS où les clients pouvaient se voir prescrire une PrEP pour une période d’essai gratuit de 30 jours. Parmi les 100 personnes ayant participé au programme et qui se sont vu prescrire une PrEP pour une période d’essai de 30 jours, 78 % se sont présentées à au moins une consultation de suivi avec un fournisseur de soins liés à la PrEP, et 57 % se sont présentées à au moins deux consultations de ce type.

Description du programme

Ce programme de prescription d’une PrEP le jour même a été mis en œuvre dans la plus grande clinique de dépistage des ITS de Denver, au Colorado. Les adultes âgés de 18 ans et plus qui répondaient aux critères d’admissibilité à la PrEP des centres de contrôle et de prévention des maladies des É.-U. (US Centers for Disease Control and Prevention)1 et qui étaient en mesure de se présenter à des rendez-vous de suivi étaient admissibles au programme. Une infirmière praticienne, ou une infirmière autorisée travaillant sous la supervision d’un médecin, a évalué l’admissibilité des clients à la PrEP et leur disposition à commencer le traitement le jour même.

Les personnes souhaitant participer au programme ont passé les tests suivants durant leur visite à la clinique de dépistage des ITS :

  • test de la créatinine sérique
  • test de l’antigène de surface de l’hépatite B
  • test urinaire de grossesse
  • tests de dépistage du VIH par antigène/anticorps au point de service

On a également déterminé si les participants présentaient des antécédents d’hépatite B ou de maladie rénale et des signes d’infection aiguë par le VIH. Les résultats des tests de dépistage du VIH et des tests de grossesse ont été passés en revue pendant la visite; les participants étaient contactés dans les deux jours suivants en cas d’anomalies dans les résultats des autres tests.

Un pharmacien a prescrit aux participants une PrEP pour une période d’essai gratuit de 30 jours, et leur a fourni des conseils concernant l’observance et les possibles effets secondaires du médicament. Au cours de cette visite, un agent de liaison auprès des patients a fourni de l’information et a évalué la situation du client sur le plan des finances et des régimes d’assurance. Un spécialiste de la souscription de régimes d’assurance a aidé les participants qui ne disposaient pas d’une assurance à trouver des moyens d’acquitter les coûts de leurs ordonnances ultérieures de PrEP.

Après la visite initiale à la clinique de dépistage des ITS, les clients qui ont reçu la trousse de départ de PrEP ont été dirigés, aux fins du suivi, vers les cliniques participantes, soit des cliniques de soins primaires, des cliniques de traitement des maladies infectieuses ou des cliniques de médecine interne.

L’agent de liaison auprès des patients a planifié une consultation de suivi à un mois à la clinique vers laquelle les clients ont été orientés et les a appelés une semaine après l’instauration de la PrEP pour faire le point sur les effets secondaires. Un médecin a répondu à toutes les questions d’ordre clinique du client et, en attendant la consultation de suivi à un mois, celui-ci pouvait s’adresser à l’agent de liaison auprès des patients qui pouvait l’aider à s’y retrouver dans les services de santé ou à régler ses problèmes d’assurance. Si les clients souhaitaient obtenir une PrEP, mais pas le jour même, ils étaient orientés vers une clinique externe.

Résultats

L’étude s’est déroulée entre avril 2017 et octobre 2018. Au total, 131 clients ont été sélectionnés aux fins de participation à l’étude; 100 clients ont participé à l’étude. Parmi les personnes inscrites à l’étude, 98 % étaient des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes et 50 % avaient contracté récemment la syphilis, une chlamydiose ou la gonorrhée.

Tous les participants ont fait l’objet d’une évaluation financière et 65 % ont été dirigés vers au moins un programme d’aide financière. L’agent de liaison auprès des patients a dirigé, respectivement, 55 % des participants vers une clinique de soins primaires et 45 % vers une clinique de traitement des maladies infectieuses, aux fins de suivi.

Les résultats de l’étude ont montré que :

  • 78 % des participants se sont présentés à au moins une consultation de suivi avec un fournisseur de soins liés à la PrEP;
  • 57 % des participants se sont présentés à au moins deux consultations de suivi avec un fournisseur de soins liés à la PrEP.

D’après une analyse multivariée des caractéristiques associées à la participation à au moins une consultation de suivi de la PrEP, un revenu annuel plus élevé était la seule caractéristique statistiquement significative à ce chapitre (chaque augmentation de 10 000 $ du revenu était associée à une probabilité 1,7 fois plus élevée de présence à au moins une consultation de suivi de la PrEP). Parmi les autres caractéristiques prises en compte, citons la situation au regard de l’assurance maladie au moment de l’inscription, le fait de disposer d’un fournisseur de soins primaires et la race/l’ethnicité.

D’après un sondage concernant la satisfaction des clients auquel 54 % des participants ont répondu, 96 % des répondants prévoyaient continuer de suivre la PrEP et 100 % étaient contents d’avoir accès à la PrEP le jour même. Par ailleurs, dans le cadre d’une analyse qualitative, les participants ont déclaré que le programme était pratique et facile à utiliser et qu’il leur permettait de surmonter les obstacles de l’accès à la PrEP.

Qu’est-ce que cela signifie pour les fournisseurs de services?

L’instauration d’une PrEP le jour même est possible dans le cadre d’une clinique de dépistage des ITS. Le recours à un agent de liaison auprès des patients pour faciliter l’accès à une consultation de suivi de PrEP après un mois et la couverture de la PrEP par un régime d’assurance ont probablement contribué au taux élevé de suivi auprès d’un fournisseur de soins liés à la PrEP. Tous les participants ont déclaré qu’ils étaient contents d’avoir accès à la PrEP le jour même.

Les fournisseurs de services devraient envisager des moyens d’offrir la PrEP le jour même dans le cadre de leurs programmes, tout en tenant compte des facteurs susceptibles d’aider les clients à compléter le suivi de la PrEP (p. ex., coûts réels et présumés du traitement associé à la PrEP). Le recours à une équipe multidisciplinaire (p. ex., personnel infirmier, agents de liaison auprès des patients, médecins) peut également contribuer à faciliter l’accès à la PrEP.

Ressources connexes

La Clinique de PrEP Maple Leaf – Étude de cas

Outil de rappel par texto – Élément du programme

Références

Kamis KF, Marx GE, Scott KA et al. Same-day HIV pre-exposure prophylaxis (PrEP) initiation during drop-in sexually transmitted diseases clinic appointments is a highly acceptable, feasible, and safe model that engages individuals at risk for HIV into PrEP care. Open Forum Infectious Diseases. 2019;6(7):ofz310.

  1. US Public Health Service. Pre-exposure Prophylaxis for the Prevention of HIV Infection in the United States – 2017 Update. A Clinical Practice Guideline. Atlanta : US Centers for Disease Control and Prevention; 2018. p. 13. Disponible à l’adresse : https://www.cdc.gov/hiv/pdf/risk/prep/cdc-hiv-prep-guidelines-2017.pdf.

 

Modèle de traitement de l’hépatite C dans les prisons d’État, dirigé par des infirmières

Modèle de traitement de l’hépatite C dans les prisons d’État, dirigé par des infirmières

Australie
2019

Ce programme a permis d’offrir un traitement contre l’hépatite C dans des prisons de l’État de Victoria, en Australie. Des infirmières ont supervisé les traitements sur place dans les prisons, avec l’aide de spécialistes lorsqu’il s’agissait de cas complexes et à plus haut risque. Cette étude d’observation a consisté à suivre le traitement de détenus atteints d’hépatite C dans 14 prisons pendant 13 mois après la mise en œuvre de ce programme. Le programme a permis de traiter 74 % des participants admissibles et d’obtenir un taux de guérison élevé (96 %) chez les détenus qui ont terminé leur traitement pendant leur incarcération.

Description du programme

Les personnes qui entrent en prison sont plus susceptibles de contracter l’hépatite C du fait de la surreprésentation des populations à risque dans les prisons, ce qui comprend les consommateurs de drogue. Le séjour en prison accentue encore le risque auxquelles ces personnes sont exposées en raison du manque de matériel sécuritaire pour l’injection, les tatouages et les perçages ainsi que du manque d’accès aux services de soins de santé.

Le programme de traitement dirigé par des infirmières a été déployé dans 14 prisons. Les participants se sont vu proposer un dépistage « optionnel » de l’hépatite C à leur entrée en prison. Si le résultat de ce test de dépistage était positif quant à l’hépatite C ou si le participant déclarait lui-même un diagnostic antérieur, il rencontrait alors en personne une infirmière du programme de lutte contre l’hépatite C en prison. L’infirmière procédait à une première évaluation comprenant :

  • un questionnaire sur les comportements à risque en matière de transmission de l’hépatite C
  • un test permettant d’évaluer les lésions hépatiques
  • des tests supplémentaires de dépistage de l’hépatite C, de l’hépatite B et du VIH
  • la consignation des autres problèmes de santé, y compris des maladies psychiatriques.

Après cette évaluation, les participants admissibles s’inscrivaient au programme afin de commencer le traitement. Pour être admissibles au traitement, les participants devaient purger une peine suffisamment longue pour suivre le traitement contre l’hépatite C (entre 8 et 24 semaines). Les personnes condamnées à des peines plus courtes n’étaient pas admissibles, mais elles étaient orientées vers un service de santé afin de recevoir un traitement après leur libération.

Le personnel du programme était composé des personnes suivantes :

  • deux infirmières à plein temps
  • trois hépatologues à temps partiel (consultables par télémédecine)
  • un pharmacien à temps partiel
  • un technicien en pharmacie à temps partiel

Le traitement et les soins des participants dont le cas était moins complexe et qui ne présentaient pas de maladie hépatique étaient dirigés par une infirmière du programme, qui consultait par écrit un médecin aux fins de prescription de médicaments. Les participants dont les cas étaient plus complexes, notamment ceux qui étaient atteints de cirrhose, ont bénéficié d’une évaluation et d’une surveillance supplémentaires de la part d’un hépatologue, soit en personne, soit par le biais de consultations de télémédecine. Les participants atteints de cirrhose se sont inscrits à un programme de surveillance des maladies hépatiques.

La pharmacie de l’hôpital pénitentiaire central a acheminé les médicaments par courrier à chaque prison. Les participants qui étaient transférés dans un autre établissement carcéral au cours de leur traitement recevaient les médicaments dans cette nouvelle prison. S’ils étaient libérés plus tôt, ils recevaient les médicaments restants afin de terminer leur traitement dans la collectivité.

L’étude a permis de mesurer le succès du traitement au moyen d’analyses de sang effectuées 12 semaines après la fin du traitement, et dont les résultats indiquaient si le participant avait été guéri.

Résultats

Cette étude d’observation a porté sur un groupe initial de 416 personnes ayant commencé le traitement dans le cadre du programme. Dans ce groupe, 103 personnes ont été perdues de vue parce qu’elles ont été libérées de prison ou parce qu’elles n’ont pas terminé leur traitement. Sur les 313 personnes qui ont terminé le traitement et ont été contrôlées à 12 semaines, 301 (96 %) ont guéri. Ce programme prouve qu’un modèle décentralisé de traitement dirigé par des infirmières a été très efficace pour ce qui est d’accroître l’accès au traitement de l’hépatite C dans les prisons et d’obtenir des taux de guérison élevés.

Parmi les participants évalués, 82 % ne présentaient pas de maladie hépatique et ont été considérés comme ayant des besoins médicaux moins complexes, et leur traitement a été dirigé par une infirmière du programme. Ceci indique que dans la majorité des cas, le traitement de l’hépatite C dans les prisons peut être supervisé par le personnel infirmier.

Qu’est-ce que cela signifie pour les fournisseurs de services?

Si l’on veut éliminer l’hépatite C, les personnes incarcérées constituent une population prioritaire dont il faut se préoccuper. L’amélioration de l’accès aux traitements est un pilier essentiel de la stratégie canadienne d’élimination de l’hépatite C. Ce programme est un exemple de modèle décentralisé, dirigé par des infirmières, qui peut efficacement inciter un grand nombre de personnes à suivre un traitement et à obtenir des taux de guérison très élevés. 

Ce programme démontre que le traitement de l’hépatite C par des agents antiviraux à action directe est désormais fiable et simple. Dans de nombreux cas, il n’est pas nécessaire de faire intervenir du personnel médical spécialisé, et les programmes peuvent être dispensés par des infirmières travaillant de manière décentralisée dans des établissements pénitentiaires distincts. Ainsi, il peut devenir moins nécessaire de recourir à du personnel de santé spécialisé ou de transporter les détenus vers des établissements de santé centralisés. Dans les cas où il faut offrir des soins plus spécialisés, des outils technologiques comme la télémédecine peuvent aider à mettre en relation à distance les hépatologues ou d’autres spécialistes avec les patients.

Ressources connexes

Modèle directeur pour éclairer les efforts d’élimination de l’hépatite C au Canada (CanHepC)

Modèle directeur pour guider les efforts d’élimination de l’hépatite C au Canada : Que doivent savoir les fournisseurs de services? (CATIE)

La microélimination de l’hépatite C : Une voie vers l’atteinte des objectifs d’élimination nationaux (CATIE)

Référence

Papaluca T, Mcdonald L, Craigie A, et al. Outcomes of treatment for hepatitis C in prisoners using a nurse-led, statewide model of. Journal of Hepatology. 2019;70:839-46