Une étude sur M. genitalium menée à Montréal

Une bactérie appelée Mycoplasma genitalium (M. genitalium ou Mgen) est la cause d’une infection transmissible sexuellement (ITS) qui commence à se propager. Mgen provoque généralement une infection asymptomatique des voies urinaires. Certaines personnes touchées éprouvent cependant des problèmes génito-urinaires, y compris les suivants :

  • gêne, douleur ou sensation de brûlure lors des mictions
  • besoin d’uriner plus fréquemment que d’habitude
  • besoin soudain d’uriner
  • relations sexuelles douloureuses
  • éjaculation douloureuse chez les hommes
  • écoulement provenant du pénis ou du vagin

Comme ces symptômes peuvent être causés par d’autres bactéries aussi, dont celles responsables de la gonorrhée ou de la chlamydiose, il est nécessaire de consulter un·e professionnel·le de la santé pour déterminer l’origine de ses problèmes génito-urinaires.

L’infection par Mgen n’est pas diagnostiquée fréquemment, mais on étudie de plus en plus cette bactérie, et plus particulièrement auprès des hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (hommes gbHARSAH).

Une équipe de recherche de Montréal a mené une étude appelée Engage pour laquelle elle a recruté 716 hommes gbHARSAH. L’équipe a effectué des prélèvements de sang et d’urine, ainsi que des frottis du rectum et de la gorge entre novembre 2018 et novembre 2019.

L’équipe de recherche a analysé les échantillons prélevés pour déterminer s’ils contenaient Mgen ou les bactéries responsables de la gonorrhée et de la chlamydiose.

Les échantillons contenant Mgen ont également été analysés pour déceler la présence de gènes associés à la résistance aux antibiotiques d’usage courant, dont les suivants :

  • macrolides (telles l’azithromycine et la clarithromycine)
  • quinolones (telles la ciprofloxacine et la moxifloxacine)

Résultats saillants

Dans l’ensemble, Mgen était présent chez presque 6 % des participants, soit dans le rectum chez 4 % d’entre eux et dans l’urine chez 2 % d’entre eux. Mgen a été décelé dans les frottis de la gorge de deux participants seulement (0,2 %).

Les hommes infectés par Mgen avaient généralement le profil suivant :

  • âgés de moins de 29 ans
  • six partenaires sexuel·le·s ou davantage dans les six mois précédents

En général, les taux d’infection par les bactéries de la gonorrhée étaient faibles, soit 1,5 % dans les échantillons du rectum et de la gorge et 0 % dans les échantillons d’urine.

Les taux d’infection par les bactéries de la chlamydiose étaient faibles dans les frottis de la gorge (moins de 1 %) mais plus élevés dans les échantillons d’urine (2 %) et les frottis rectaux (3 %).

L’étude incluait 107 hommes séropositifs, mais l’équipe de recherche n’a constaté aucun risque accru d’infection par Mgen chez eux.

Résistance aux antibiotiques

Une analyse a révélé que 46 des 56 échantillons (82 %) contenant la bactérie Mgen exprimaient des gènes associés à la résistance aux macrolides; dans le cas des quinolones, on a décelé des gènes associés à la résistance dans 16 échantillons sur 55 (29 %; un échantillon ne pouvait être analysé aux fins de tests de résistance). Quinze échantillons présentaient une résistance à ces deux classes d’antibiotiques.

Selon l’équipe de recherche, le taux de résistance aux antibiotiques macrolides dans cette étude était plus élevé que ce qu’avaient rapporté antérieurement les responsables d’études menées dans l’Ouest canadien et en Ontario, soit 63 %.

Selon l’hypothèse avancée par l’équipe de recherche, Mgen aurait acquis une forte résistance aux macrolides parce que ces antibiotiques avaient servi au traitement d’un large éventail d’ITS dans le passé.

À l’avenir

L’équipe de recherche a souligné que la co-infection à Mgen peut s’observer chez des hommes gbHARSAH atteints de chlamydiose ou de gonorrhée. Comme le dépistage de routine de Mgen n’est pas recommandé, l’équipe encourage les professionnel·le·s de la santé à rester « très [vigilant·e·s] quant à une éventuelle co-infection en cas de symptômes persistants après un traitement adéquat [contre la gonorrhée ou la chlamydiose] ». La vigilance est nécessaire parce que la plupart des cas d’infection à Mgen sont asymptomatiques, et l’exposition aux antibiotiques risque de favoriser l’apparition d’une résistance à d’autres agents.

Selon l’équipe de recherche, les capacités de dépistage de Mgen sont limitées au Canada. Elle ajoute néanmoins que les personnes présentant des symptômes persistants ou récurrents évoquant une infection à Mgen devraient passer un test de dépistage. Dans les cas de ce genre, le traitement recommandé repose sur l’azithromycine, une deuxième option étant la moxifloxacine.

Il importe de souligner les taux élevés de résistance à l’azithromycine constatés dans cette étude, ainsi que la présence d’une résistance aux quinolones chez certains participants. L’équipe de recherche réclame donc l’accès facile au test de dépistage de Mgen et la communication rapide des résultats, ainsi que l’analyse des échantillons pour déceler la présence d’une résistance aux antibiotiques couramment utilisés.

L’équipe de recherche demande « un accès facile et rapide » aux antibiotiques de rechange, telle la pristinamycine, pour le traitement de l’infection à Mgen. À l’heure actuelle, l’accès à la pristinamycine s’obtient en vertu du Programme d’accès spécial (PAS) de Santé Canada.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Lê AS, Labbé AC, Foumigue A et al. Mycoplasma genitalium chez les hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes à Montréal. Relevé des maladies transmissibles au Canada. 2023;49(11/12):477-486.
  2. Johnson E, Tieman M, Dumkow K et al. Comparison of two testing strategies for Mycoplasma genitalium in emergency department patients across a statewide health system. American Journal of Emergency Medicine. 2024 Jan 12; 78:120-126.