Les troubles respiratoires du sommeil sont plus courants chez les hommes atteints du VIH, révèle une grande étude américaine

Des personnes éprouvent des problèmes de respiration durant le sommeil. Chez certaines, la respiration devient intermittente et peut même s’arrêter pour un temps. Au réveil, les personnes atteintes de troubles respiratoires du sommeil (apnée du sommeil) risquent de se sentir fatiguées, sans énergie et irritables, et elles éprouvent souvent de la somnolence durant la journée.

L’apnée du sommeil persistante prive les tissus du corps d’un apport suffisant en oxygène. Cela peut compromettre le fonctionnement optimal du cerveau et des muscles. L’apnée du sommeil peut également nuire à la capacité des gens de travailler, de faire du bénévolat ou de conduire un véhicule motorisé en sécurité, et leur qualité de vie est susceptible de se détériorer.

Des données de recherche récentes portent à croire que l’apnée du sommeil contribue aux problèmes de santé suivants :

  • hypertension
  • maladies cardiovasculaires
  • anomalies glycémiques
  • dépression

Il est possible de faire de l’apnée du sommeil sans le savoir. Pour cette raison et d’autres, les personnes éprouvant des problèmes de santé persistants et inexpliqués d’ordre général, ou encore des symptômes désagréables comme l’épuisement ou des problèmes de sommeil, devraient obtenir conseils auprès de leur médecin ou d’un·e infirmier·ère au lieu de formuler elles-mêmes des hypothèses sur la cause de leurs symptômes.

En général, les facteurs de risque d’apnée du sommeil incluent les suivants :

  • sexe masculin
  • obésité
  • ménopause
  • anomalies dans la structure de la gorge ou des voies nasales

Traitement courant

Après un diagnostic d’apnée du sommeil, les médecins peuvent proposer diverses options de traitement. Le traitement le plus courant repose sur un appareil appelé CPAP (parfois appelé VPPC pour « ventilation en pression positive continue »). Un tube léger et flexible est branché à l’appareil CPAP à un bout, alors que l’autre est attaché à un masque ou à un embout nasal. Le tube fait circuler l’air de la pièce à une pression constante, et le masque ou l’embout nasal sert à pousser l’air dans les poumons. L’appareil CPAP aide ainsi les personnes atteintes d’apnée du sommeil à respirer en dormant. De temps en temps, des ajustements du débit d’air et du masque peuvent s’avérer nécessaires, et le personnel d’une clinique du sommeil peut offrir des conseils à ce sujet.

Apnée du sommeil et VIH

On n’a pas mené d’études d’envergure pour évaluer la prévalence de l’apnée du sommeil chez les personnes vivant avec le VIH. Pour lancer l’exploration de ce problème, une équipe de recherche œuvrant dans plusieurs universités américaines a mené une étude sous l’égide de la Multicenter AIDS Cohort Study (MACS). L’étude a porté sur plus de 800 hommes, dont 466 avaient le VIH et 370 ne l’avaient pas. À l’aide de capteurs, l’équipe a évalué le sommeil des participants durant la nuit.

L’équipe de recherche a constaté que l’apnée du sommeil était courante, le taux de prévalence global étant de 50 %. Les hommes séropositifs étaient plus susceptibles de faire de l’apnée du sommeil que les hommes séronégatifs (56 % contre 48 %).  

L’équipe de recherche a effectué une analyse statistique minutieuse pour déterminer quels facteurs de risque pourraient expliquer la plus grande fréquence de l’apnée du sommeil chez les hommes séropositifs. L’équipe n’a toutefois trouvé aucun facteur de risque significatif.

Cette équipe de recherche a encouragé les médecins et les personnels infirmiers qui prennent soin d’hommes atteints du VIH à déterminer leurs risques d’apnée du sommeil (lorsque la situation le justifie), car ce trouble peut nuire à la santé et à la qualité de vie.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche a appris aux participants comment appliquer les différents capteurs nécessaires afin qu’ils puissent évaluer leur trouble respiratoire du sommeil dans leur propre chambre à coucher. Les participants avaient accès à des vidéos et à des documents qui expliquaient la méthode d’application des capteurs. Les données étaient recueillies électroniquement par un dispositif d’enregistrement portable que l’on prêtait aux participants. Le sommeil a été évalué une seule fois, soit pendant une nuit entière. Les participants attachaient les capteurs à leur tête (pour enregistrer les ondes cérébrales et les mouvements oculaires), à leur poitrine (pour capter les fréquences cardiaque et respiratoire) et à un doigt (pour mesurer la quantité d’oxygène dans leur sang). De petits tubes mous et flexibles étaient placés près du nez pour mesurer le débit d’air entrant dans les narines.

Tous les participants étaient des hommes gais ou bisexuels. Les hommes séropositifs avaient le profil moyen suivant lors de leur admission à l’étude :

  • âge : 55 ans
  • indice de masse corporelle (IMC) : 27,2 kg/m2
  • principaux groupes ethnoraciaux : Blancs – 57 %; Noir­­s –32 %
  • compte de CD4+ : 702 cellules/mm3
  • 94 % des hommes avaient une charge virale inhibée (moins de 200 copies/ml selon la définition de cette équipe de recherche)
  • 99 % des hommes suivaient un traitement contre le VIH, le plus souvent un schéma thérapeutique fondé sur un inhibiteur de l’intégrase (47 %)

L’étude s’est déroulée de mars 2018 à juin 2019.

Résultats

Utilisant une définition stricte du terme trouble respiratoire du sommeil, l’équipe de recherche a déterminé que l’apnée du sommeil était plus courante chez les hommes séropositifs (56 %) que chez les hommes séronégatifs (48 %).

Les hommes séropositifs étaient plus susceptibles d’éprouver de la somnolence durant la journée que les hommes séronégatifs.

L’équipe de recherche a qualifié de légers ou modérés la plupart des cas d’apnée du sommeil observés chez les participants séropositifs.

Pourquoi cette différence?

L’équipe de recherche a entrepris des analyses statistiques exhaustives pour essayer de déterminer les facteurs de risque qui pourraient rendre les hommes séropositifs plus vulnérables à l’apnée du sommeil que les hommes ne vivant pas avec le VIH. L’équipe a pris en considération des facteurs comme l’âge, la race et l’ethnie et l’IMC.

Une analyse semblable a été effectuée plus particulièrement auprès d’hommes séropositifs, en effectuant une comparaison entre 36 hommes ayant une charge virale détectable et 430 hommes ayant une charge virale indétectable.

Aucune de ces analyses statistiques n’a donné de renseignements utiles.

À retenir

Jusqu’à présent, cette étude menée sous l’égide de la MACS est la plus importante à avoir évalué l’apnée du sommeil chez des hommes séropositifs. L’équipe de recherche a encouragé les professionnel·le·s de la santé à effectuer des dépistages de l’apnée du sommeil auprès des hommes vivant avec le VIH.

Comme toutes les études, cette étude de la MACS sur le sommeil est imparfaite, et ses résultats pourraient ne pas s’appliquer à tous les hommes vivant avec le VIH aujourd’hui. Rappelons que de nombreuses études importantes ont été menées sous l’égide de la MACS dans le passé. Les « vagues de recrutement » (expression de l’équipe de recherche) pour ces études ont eu lieu dans les périodes suivantes :

  • 1984 à 1985
  • 1987 à 1991
  • 2001 à 2003
  • 2010 à 2017

Vu ce recrutement par vagues, il est possible que la présence de certains participants dans cette étude sur le sommeil soit en partie attribuable à un biais de survie. Autrement dit, certains facteurs ont permis à ces hommes de survivre à l’époque qui a précédé l’arrivée des traitements contre le VIH (TAR) et d’être encore en vie aujourd’hui. Il se peut donc que nombre d’entre eux aient passé plusieurs années avec une charge virale détectable à l’époque d’avant le TAR. Cela aurait pu nuire à leur santé et augmenter éventuellement leur risque d’apnée du sommeil subséquent.

Notons que, depuis une décennie, les médecins ont de plus en plus tendance à prescrire le TAR peu après un diagnostic de VIH. Cela permet de minimiser les dommages qu’une exposition de longue durée à de fortes quantités de VIH peut infliger au système immunitaire (et à d’autres systèmes organiques essentiels).

À l’avenir

D’autres études sont nécessaires pour déterminer les causes de l’apnée du sommeil chez les hommes séropositifs. Il faut également mener des études auprès de femmes vivant avec le VIH.

À retenir

Les problèmes de sommeil, l’épuisement et l’irritabilité persistants peuvent avoir de nombreuses causes. Il vaut toujours mieux discuter de ce genre de problèmes avec un ou une médecin afin d’en déterminer l’origine.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Punjabi NM, Brown TT, Aurora RN et al. Prevalence and predictors of sleep-disordered breathing in men participating in the Multicenter AIDS Cohort Study. Chest. 2023; sous presse.
  2. Punjabi NM, Brown TT, Aurora RN et al. Methods for home-based self-applied polysomnography: the Multicenter AIDS Cohort Study. Sleep Advances. 2022 Apr 29;3(1): zpac011.