- Nombre de facteurs sociaux et biomédicaux contribuent au risque de dépression chez les personnes séropositives
- Une étude menée auprès de 13 817 personnes a révélé que le risque d’AVC augmentait en fonction de la gravité de la dépression
- Cette étude souligne l’incidence de la dépression et des maladies cardiovasculaires dans le cadre des soins liés au VIH
Les traitements efficaces contre le VIH (traitements antirétroviraux ou TAR) sont utilisés de plus en plus au Canada et dans d’autres pays à revenu élevé. Comme le risque de complications liées au sida diminue énormément sous l’effet du traitement, de nombreuses personnes sous TAR vivent plus longtemps de nos jours. Cependant, en raison de cette extension de la longévité, le risque de problèmes de santé liés au vieillissement, comme les maladies cardiovasculaires, le diabète et l’hypertension augmente. Ces maladies peuvent accroître le risque d’accidents vasculaires cérébraux (AVC).
AVC et VIH
Selon des études de recherche menées aux États-Unis, les AVC surviennent généralement dès un âge plus jeune chez les personnes séropositives. Plusieurs études ont permis de constater que le risque d’AVC était environ 20 % plus élevé chez cette population que chez les personnes séronégatives. De plus, les facteurs de risque traditionnels, comme l’hypertension, le diabète et le tabagisme ont tendance à être plus courants chez les personnes séropositives. Les scientifiques soulignent cependant que ces facteurs de risque n’expliquent pas complètement l’augmentation du risque d’AVC chez cette population. Selon certain·e·s scientifiques, il est probable que des facteurs de risque additionnels contribuent au risque accru d’AVC, notamment les dommages aux vaisseaux sanguins et l’inflammation persistante (conséquence de l’infection chronique par le VIH).
Il importe de noter que, même si le traitement efficace du VIH réduit énormément l’inflammation chronique, le TAR ne peut pas éliminer ce problème. Pour cette raison, la recherche sur la santé cardiovasculaire des personnes séropositives doit continuer.
Dépression et AVC
Des études menées auprès de personnes séronégatives ont révélé que la dépression était associée à une augmentation du risque d’AVC.
Nombre d’études ont permis de constater que la dépression est une maladie relativement courante chez les personnes vivant avec le VIH. Des facteurs d’ordre social comme la stigmatisation et la discrimination peuvent augmenter le risque de dépression. De plus, les cellules infectées par le VIH produisent des protéines qui contribuent probablement à l’inflammation et, ainsi, au risque accru de dépression.
Selon des scientifiques, les problèmes suivants jouent un rôle dans l’association entre l’AVC et la dépression chez les personnes séronégatives :
- hypertension
- taux de cholestérol anormaux
- activité physique insuffisante
- stress persistant
- inflammation chronique
- usage de stimulants
Ces facteurs peuvent jouer un rôle semblable chez les personnes séropositives.
La dépression est souvent une maladie dynamique qui fluctue au fil du temps. Une équipe de recherche américaine a mené une étude pour déterminer si les symptômes de la dépression contribuaient au risque d’AVC chez les personnes séropositives. Elle a analysé des données de santé recueillies par cinq grandes cliniques situées un peu partout au pays. Ces cliniques ont recueilli des données se rapportant à 13 817 personnes séropositives entre 2010 et 2020. L’équipe a fait analyser les nouveaux cas d’AVC par des neurologues pour vérifier que les personnes en question avaient réellement subi un AVC. L’équipe a également examiné les données se rapportant aux symptômes de la dépression, ainsi que tout lien éventuel avec le risque d’AVC. Les participant·e·s ont rempli régulièrement un questionnaire validé appelé PHQ-9 (Patient Health Questionnaire) qui les interrogeait sur la dépression et ses symptômes.
Résultats saillants
Au début de l’étude, 23 % des participant·e·s avaient reçu un diagnostic de dépression. Cent soixante-treize personnes ont subi subséquemment un AVC après une période moyenne de sept ans. Selon l’équipe de recherche, plus les symptômes de dépression étaient graves, plus le risque d’AVC augmentait. Dans l’ensemble, une dépression de grande intensité était associée à une augmentation de 16 % du risque d’AVC.
Notons aussi que le risque d’AVC associé à la dépression était plus élevé chez les personnes de moins de 50 ans que chez les personnes plus âgées. Aucune différence n’a toutefois été constatée entre le risque d’AVC chez les personnes déprimées en fonction du sexe assigné à la naissance.
En examinant différents facteurs, l’équipe de recherche a constaté que cette association entre un risque accru d’AVC et une gravité accrue de la dépression existait indépendamment de « facteurs d’ordre sociodémographique et cardiovasculaire, [et de] facteurs liés au VIH et à l’usage de substances […] ».
Lors d’une étude précédente menée auprès de vétérans américains vivant avec le VIH, on a constaté que la dépression semblait être un facteur de risque quant à la survenue ultérieure d’AVC. Dans l’étude en question, l’équipe a analysé des données recueillies auprès de 106 333 personnes (33 528 séropositives et 72 805 séronégatives). L’équipe a déterminé que la dépression pouvait être un facteur de risque d’AVC chez les vétérans atteints du VIH, notamment chez les plus jeunes.
À retenir
L’équipe responsable de la présente étude n’a pas été en mesure de déterminer précisément pourquoi la gravité de la dépression influait sur le risque d’AVC. L’équipe de recherche encourage toutefois la tenue d’autres études sur cette question.
Dans son rapport publié dans la revue JAIDS, les scientifiques ont fait plusieurs déclarations qui devraient intéresser les prestataires de soins de santé, dont les suivantes :
« Du point de vue clinique, nos résultats devraient sensibiliser les clinicien·ne·s à la contribution éventuelle que fait la dépression au risque d’AVC, surtout chez les personnes séropositives atteintes de dépression grave ou celles d’un âge plus jeune, et inciter les prestataires à surveiller et à traiter la dépression chez [cette population], notamment chez les individus présentant des risques cardiovasculaires traditionnels plus élevés ».
L’équipe de recherche souhaite également la tenue d’études « pour déterminer si des médicaments ou d’autres interventions, comme la thérapie comportementale, la psychothérapie ou les antidépresseurs, peuvent réduire le risque d’AVC chez les personnes vivant avec le VIH ».
La présente étude souligne l’importance de tenir compte des enjeux liés à la santé cardiovasculaire, y compris la dépression.
—Sean R. Hosein
Ressource
Le VIH et la maladie cardiovasculaire – CATIE
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