La TAR commence le jour même du diagnostic de VIH en Colombie-Britannique

À l’avenir, il est probable que le traitement immédiat du VIH deviendra la norme de soins lorsque cette infection sera diagnostiquée dans les pays à revenu élevé. Il est donc important d’évaluer les programmes qui offrent le traitement immédiat du VIH afin de déterminer leur efficacité, ainsi que les attitudes des personnes nouvellement diagnostiquées à leur égard.

Avant d’approfondir le thème principal de ce rapport, nous fournissons quelques renseignements de base sur l’infection aiguë ou très précoce au VIH.

À propos de l’infection aiguë au VIH

Une fois que le VIH a envahi le tractus anogénital, il infecte les cellules du système immunitaire qui s’y trouvent. Ces cellules infectées produisent de nombreuses autres copies du VIH, et le cycle de l’infection se poursuit à mesure que de nouvelles cellules sont converties en mini-usines à virus. Dans les quelques jours suivant l’entrée du virus dans le corps, les cellules infectées par le VIH se propagent d’abord vers les ganglions et tissus lymphatiques avoisinants, puis vers de nombreux systèmes organiques peu de temps après,  y compris le cerveau. Durant la période où le virus sort du tractus anogénital pour atteindre d’autres parties du corps, le système immunitaire est submergé, autant par l’ampleur de l’infection que par les signaux chimiques libérés par les cellules infectées par le VIH qui nuisent à sa capacité de maîtriser le virus.

Le système immunitaire met du temps à réduire la quantité de VIH produite au cours de l’infection aiguë. Par conséquent, quelques semaines peuvent s’écouler après l’exposition initiale et l’infection avant que des anticorps anti-VIH soient décelables dans le sang. Pour détecter le VIH dans les échantillons de sang dès un moment très précoce de l’infection aiguë, les laboratoires peuvent avoir recours à des tests appelés TAAN (tests d’amplification des acides nucléiques). Ces tests détectent la présence du matériel génétique du VIH dans le sang.

En Colombie-Britannique

Deux cliniques de dépistage des infections transmissibles sexuellement (ITS) de Vancouver utilisent les TAAN pour identifier les personnes qui en sont à la phase aiguë de l’infection au VIH. Comme nous l’avons déjà mentionné dans ce numéro de TraitementSida, l’offre d’un traitement immédiat contre l’infection au VIH a de nombreux bienfaits. Des chercheurs de la Colombie-Britannique ont donc décidé d’évaluer leur programme qui proposait la TAR aux participants dès le moment du diagnostic du VIH.

Détails de l’étude

Des chercheurs œuvrant au Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique (BCCDC) et au Centre d’excellence sur le VIH/sida de la Colombie-Britannique de Vancouver ont évalué un programme qui offrait deux choix aux participants à la suite d’un diagnostic de VIH :

  • counseling et orientation vers des soins (c’est-à-dire l’intervention traditionnelle)
  • counseling et orientation rapide, le jour même, vers un spécialiste du VIH et, au besoin, vers des ressources additionnelles telles que des pairs-navigateurs, des médecins de soins primaires et des travailleurs sociaux

L’équipe de recherche a passé en revue les données de santé recueillies entre janvier 2013 et octobre 2014 dans deux cliniques ITS de Vancouver. Une brève entrevue auprès des participants faisait également partie de cette étude.

Résultats

À titre de comparaison, notons qu’en 2013, soit avant la mise sur pied du programme d’orientation rapide vers des soins et le traitement, il s’écoulait en moyenne 21 jours avant que les patients voient un médecin à la suite d’un diagnostic de VIH.

En 2014, 19 personnes ont reçu un diagnostic d’infection au VIH aiguë, et 16 (84 %) d’entre elles ont choisi le programme d’orientation rapide. En moyenne, ces participants ont commencé à recevoir des soins en moins de 24 heures suivant leur diagnostic de VIH.

Également en 2014, on a découvert 14 cas d’infection chronique au VIH. Ces participants ont mis en moyenne 14 jours à obtenir des soins et un traitement.

Satisfaction et intérêt

Selon l’équipe de la Colombie-Britannique, « la majorité des [participants ayant l’infection aiguë au VIH] ont exprimé un degré de satisfaction élevé par rapport à l’offre immédiate de soins et ont choisi de commencer la TAR la même journée ».

Selon les médecins et infirmiers, les patients manifestaient un intérêt « fort » à l’égard du traitement immédiat du VIH. Cependant, ces cliniciens exprimaient quelques préoccupations concernant l’aptitude des patients qui commençaient immédiatement la TAR à maintenir à long terme leur capacité de prendre la TAR tous les jours en suivant les prescriptions à la lettre.

Place à l’expansion

À la lumière des résultats prometteurs obtenus jusqu’à présent, les chercheurs du BCCDC ont soulevé d’autres enjeux liés à l’introduction immédiate de la TAR qui pourraient être incorporés dans le programme et en justifier l’expansion, y compris les suivants :

  • Informer les partenaires et contacts sexuels de la possibilité qu’ils aient récemment été exposés au VIH et qu’ils aient intérêt à passer un dépistage pour protéger leur santé.
  • Offrir une prophylaxie post-exposition (PPE) aux partenaires et aux contacts sexuels des personnes recevant un diagnostic de séropositivité.

La présente analyse est fondée sur un nombre relativement restreint de participants. Elle constitue néanmoins une première étape importante et cruciale en ce qui concerne l’évaluation de l’impact de l’amorce immédiate de la TAR. Les autres étapes comprendraient l’évaluation de l’observance thérapeutique à long terme.

Certains lecteurs pourraient s’étonner d’apprendre que la plupart des participants nouvellement diagnostiqués ont choisi de commencer la TAR le jour même de leur diagnostic. Or il est probable que le VIH sera traité de cette manière à l’avenir, surtout depuis la publication des résultats de l’étude START.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Haase AT. Perils at mucosal front lines for HIV and SIV and their hosts. Nature Reviews Immunology. 2005 Oct;5(10):783-92.
  2. Haase AT. Early events in sexual transmission of HIV and SIV and opportunities for interventions. Annual Review of Medicine. 2011;62:127-39.
  3. Thumath M, Sandstra I, Forrest J, et al. Implementation of a rapid referral pathway to HIV treatment for gay men and MSM diagnosed with acute HIV-infection in sexual health clinics in British Columbia. In: Program and abstracts of the 8th IAS Conference on HIV Pathogenesis, Treatment and Prevention, 19-22 July 2015. Abstract TUPED782.