Le remdésivir va de l’avant

En plein milieu de cette urgence sanitaire majeure que constitue la propagation fulgurante de la COVID-19, des chercheurs ont réussi à mener une étude bien conçue pour comparer le remdésivir et un placebo. Nous résumons ici quelques questions soulevées par cette étude et d’autres sur le remdésivir.

Comparé au placebo, le remdésivir a réussi à écourter d’environ quatre jours le rétablissement de personnes souffrant de symptômes graves de la COVID-19. Autrement dit, les participants traités par remdésivir ont mis environ 11 jours à se remettre, contre 15 jours chez les participants du groupe placebo. On a également observé une tendance à la baisse de la mortalité parmi les personnes traitées par remdésivir, soit 7 % contre 12 % dans le groupe placebo, mais cette différence n’est pas significative d’un point de vue statistique. Ces résultats ont poussé des médecins non affiliés à l’étude à rédiger un éditorial dans le New England Journal of Medicine où ils affirment que « l’effet clinique du remdésivir a été relativement modeste ».

Les bienfaits du traitement au remdésivir ont principalement été observés chez des personnes qui avaient initialement des symptômes graves (mais pas critiques) de la maladie. Dans ce sous-groupe, le rétablissement s’est produit après 12 jours sous l’effet du remdésivir et après 18 jours dans le groupe placebo.

Les médecins ont également souligné que les personnes qui avaient commencé l’étude avec « une maladie légère à modérée » ont connu un temps de rétablissement semblable à celui des personnes ayant reçu le placebo, soit cinq jours.

Les médecins ont affirmé que « le remdésivir n’a pas semblé améliorer les résultats chez les patients ayant besoin de ventilation mécanique ou d’oxygénation par membrane extracorporelle [ECMO], mais les estimations se rapportant au rétablissement nécessitent plus de suivi dans ce groupe ». L’ECMO consiste à extraire du sang du corps, à enlever du dioxyde de carbone puis à rajouter de l’oxygène avant de retourner le sang au corps.

Il importe de noter que les responsables de cet essai ont permis aux participants de recevoir une gamme d’autres traitements. Il sera important d’analyser les données pour déterminer l’impact éventuel que ces autres traitements auraient eu sur le rétablissement.

Une autre étude a comparé deux régimes différents du remdésivir, soit un traitement de cinq jours contre un traitement de 10 jours. Comme cette étude n’a pas inclus de placebo, il n’était pas possible de faire une évaluation globale du remdésivir. Il semble tout de même que les deux régimes aient eu la même efficacité.

Il faudra analyser des sous-groupes de participants de cette étude contrôlée contre placebo sur le remdésivir afin de déterminer toute différence éventuelle dans la réponse au traitement selon l’âge, le sexe ou le groupe ethnoracial.

Une compréhension évolutive

L’infection au SRAS-CoV-2 peut causer une gamme de symptômes graves chez certaines personnes. Le virus semble provoquer des complications touchant divers systèmes organiques, notamment les poumons, le cœur et les vaisseaux sanguins, le cerveau, le système nerveux, les reins, le foie et le système immunitaire. Chez certaines personnes, le virus cause de l’inflammation grave. Il est donc possible qu’une combinaison de médicaments — antiviraux, anti-inflammatoires puissants et anticoagulants — soit nécessaire.

Une épidémie soudaine

Le SRAS-CoV-2 a été isolé il y a six mois environ, puis il a fait éclater une pandémie mondiale. Normalement, les scientifiques mettent au moins plusieurs années à mettre au point des médicaments conçus pour traiter un virus émergent spécifique, et plus de temps encore pour créer un vaccin efficace dans bien des cas.

En réponse à la propagation soudaine et généralisée du SRAS-CoV-2, les chercheurs sont en train de recycler des médicaments existants conçus à d’autres fins. Les résultats se rapportant aux médicaments cliniques ne seront pas idéaux parce que ceux-ci n’ont pas été conçus pour s’attaquer au nouveau virus. Malgré ce bémol, les effets du remdésivir constituent un pas en avant important. Voici quelques questions à considérer en ce qui a trait à l’avenir du remdésivir :

  • À quel moment dans le cours de la COVID-19 devrait-on commencer à prendre du remdésivir?
  • Quels autres médicaments sont les meilleurs pour être combinés au remdésivir?
  • Devrait-on commencer à prendre des antiviraux et des immunomodulateurs en même temps, ou existe-t-il un ordre préférable pour la prise de ces médicaments (une catégorie avant l’autre)?
  • La perfusion intraveineuse est-elle la meilleure façon d’administrer le remdésivir? Gilead a commencé des essais cliniques sur une version inhalée de ce médicament.
  • Quel sera le prix du remdésivir?

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Dolin R, Hirsch MS. Remdesivir - An important first step. New England Journal of Medicine. 2020; en voie d’impression.
  2. Goldman JD, Lye DCB, Hui DS, et al.  Remdesivir for 5 or 10 days in patients with severe Covid-19. New England Journal of Medicine. 2020; en voie d’impression.
  3. Wang Y, Zhang D, Du G, et al. Remdesivir in adults with severe COVID-19: a randomised, double-blind, placebo-controlled, multicentre trial. Lancet. 2020 May 30;395(10238):1694.
  4. Beigel JH, Tomashek KM, Dodd LE, et al. Remdesivir for the treatment of Covid-19 – preliminary report. New England Journal of Medicine. 2020; en voie d’impression.