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  • Chez les hommes, le virus du papillome humain (VPH) peut causer des cancers de l’anus, de la langue, de la gorge et du pénis
  • Lors de cette étude, les taux de VPH étaient très élevés chez les hommes gais et bisexuels qui utilisaient la prophylaxie pré-exposition (PrEP)
  • Les chercheurs recommandent le dépistage du VPH et la vaccination des hommes sous PrEP

Le virus du papillome humain (VPH) est une infection transmissible sexuellement courante. Certaines souches (appelées génotypes) du VPH peuvent causer des cancers de l’anus, du pénis, de la bouche et de la gorge chez les hommes.

Il y a environ six ans, des chercheurs canadiens et français ont publié les résultats d’un essai clinique de la prophylaxie pré-exposition (PrEP) du VIH. Pour cette étude appelée Ipergay, les chercheurs ont recruté des hommes gais et bisexuels dont certains ont reçu du ténofovir DF et d’autres, un placebo.

L’équipe d’Ipergay a mené une sous-étude durant laquelle elle s’est concentrée sur le VPH et des problèmes connexes chez 162 hommes qui n’avaient pas été vaccinés contre ce virus. Sur une période de deux ans, les chercheurs ont constaté que les génotypes du VPH associés au cancer se trouvaient fréquemment chez ces hommes, notamment dans l’anus.

À la lumière de ces résultats, les chercheurs ont recommandé d’offrir le dépistage du cancer anal et la vaccination anti-VPH aux hommes gais et bisexuels utilisant la PrEP.

Détails de l’étude

Au début de la sous-étude, les participants ont rempli des questionnaires et subi des prises de sang et d’autres prélèvements afin que les échantillons soient testés pour le VPH. Pour obtenir des échantillons de l’anus et du pénis, les chercheurs ont effectué des frottis. Pour la bouche et la gorge, les participants se sont gargarisés avec une solution que les chercheurs ont ensuite récupérée aux fins des analyses. La plupart des participants étaient dans la trentaine.

Tous les participants ont subi des examens proctologiques.

La recherche de cellules anormales dans l’anus a donné lieu aux catégories de résultats suivantes :

  • nombre insuffisant de cellules pour faire l’analyse
  • cellules normales
  • cellules malpighiennes atypiques de signification indéterminée (ASC-US)
  • lésion malpighienne intra-épithéliale de bas grade (LSIL)
  • lésion malpighienne intra-épithéliale de haut grade (HSIL)
  • cellules malpighiennes atypiques ne permettant pas d’exclure une HSIL (ASC-H)

Les cellules classées comme LSIL et HSIL sont les plus préoccupantes à court terme parce qu’elles risquent de se transformer encore et de devenir très anormales et précancéreuses.

Résultats

Au début de l’étude, les chercheurs ont détecté le VPH chez 93 % des hommes dans un des sites anatomiques mentionnés ci-haut.

En général, le VPH a été détecté plus souvent dans l’anus que dans les autres sites anatomiques.

Les chercheurs ont constaté les changements suivants au cours de l’étude :

  • anus : 79 % des hommes ont acquis au moins un nouveau génotype à haut risque
  • pénis : 27 % des hommes ont acquis au moins un nouveau génotype à haut risque
  • bouche : 20 % des hommes ont acquis au moins un nouveau génotype à haut risque

Le risque de se faire infecter par un nouveau génotype à haut risque était semblable chez les participants recevant le ténofovir DF et le groupe recevant le placebo.

Examens anaux

Les tests effectués au début de l’étude pour détecter des cellules anormales dans l’anus ont donné les résultats suivants :

  • normales : 32 %
  • ASC-US : 23 %
  • LSIL : 40 %
  • HSIL : 5 %
  • ASC-H : 1 %

À la fin de l’étude, les mêmes tests ont donné les résultats suivants :

  • normales : 13 %
  • ASC-US : 21 %
  • LSIL : 51 %
  • HSIL : 10 %
  • ASC-H : 1 %

Comme on peut le constater, une tendance à la hausse a été observée en ce qui concerne la proportion de cellules anormales dans l’anus au fil du temps. Notons cependant qu’aucun diagnostic de cancer anal n’a été posé durant l’étude.

Résultats additionnels et implications

Selon les chercheurs, des études antérieures avaient permis de constater des taux d’infection au VPH élevés chez des hommes gais et bisexuels séropositifs, en partie parce que leur système immunitaire était incapable de contenir le VPH.

Dans la sous-étude d’Ipergay, les chercheurs ont constaté que les hommes gais et bisexuels séronégatifs affichaient des taux d’infection au VPH élevés qui se comparaient à ceux des hommes séropositifs. Notons cependant que cette étude a porté sur un faible nombre de participants et n’avait pas été conçue pour déterminer le risque de cancer associé à l’infection au VPH. Les chercheurs ont toutefois affirmé que « les hommes qui utilisent la PrEP et qui ont des relations sexuelles avec des hommes devraient certainement être considérés comme une population à risque élevé en ce qui concerne l’infection au VPH de l’anus et les complications y étant associées ».

Selon les chercheurs, l’évaluation des frottis du pénis a également révélé des taux de VPH qui étaient « beaucoup plus élevés que ce qui a été rapporté précédemment à l’égard des [hommes gais et bisexuels] n’ayant pas le VIH ».

Contrairement aux résultats se rapportant à l’anus et au pénis, l’analyse des liquides buccaux a révélé des taux de VPH « relativement faibles ». Ces derniers se comparaient aux résultats d’études antérieures menées auprès d’hommes gais et bisexuels séronégatifs.

Il importe de souligner que l’équipe d’Ipergay a recruté de préférence des hommes qui avaient eu des relations anales sans condom dans un passé récent. Il est possible que cette préférence ait augmenté la probabilité que le VPH soit détecté dans l’anus des participants.

Vaccination anti-VPH

Le vaccin anti-VPH Gardasil-9 est approuvé au Canada et dans d’autres pays à revenu élevé. Ce vaccin réduit énormément le risque de contracter les génotypes suivants du VPH et d’éprouver les problèmes associés :

  • VPH : 6 et 9; ces génotypes causent les verrues anogénitales
  • VPH : 16, 18, 31, 33, 45, 52 et 58; ces génotypes sont associés à une augmentation du risque de cancer dans les parties du corps touchées

Selon les chercheurs, certains génotypes à haut risque du VPH (16, 18, 31 et 52) sont devenus plus fréquents dans l’anus des hommes au cours de l’étude. Ce résultat porte à croire que les hommes en question étaient sujets à l’infection par ces génotypes.

Comme nous l’avons déjà mentionné, le terme génotype « à haut risque » est utilisé par les chercheurs pour désigner les souches du VPH auxquelles on associe un risque accru de cancer. Il est intéressant de constater que la proportion d’hommes ayant reçu des résultats anormaux au test Pap anal a augmenté au cours de l’étude, passant de 5 % au début jusqu’à 15 % à la fin. Il est donc probable que les hommes étaient vulnérables aux génotypes du VPH qui provoquent l’apparition et la croissance de cellules anormales dans l’anus. Cette vulnérabilité pourrait accroître le risque d’états précancéreux et de cancer anal chez ces hommes au fil du temps.

Compte tenu de leurs résultats, les chercheurs ont laissé entendre que la vaccination anti-VPH par Gardasil 9 serait bénéfique chez les utilisateurs gais et bisexuels de la PrEP. Même s’il existe trois vaccins approuvés pour le VPH, Gardasil 9 offre la protection la plus complète contre la plupart des génotypes du VPH. Les chercheurs ont également recommandé « des stratégies de dépistage du cancer et de vaccination semblables » pour les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, qu’ils soient séropositifs ou séronégatifs.

—Sean R. Hosein

Ressources

Ressources et outils sur la prophylaxie pré-exposition (PrEP)

Le cabotégravir injectable se montre très efficace pour prévenir l’infection par le VIH chez les femmes – Nouvelles CATIE

Santé Canada autorise l’autodépistage du VIH – Nouvelles CATIE

Une étude révèle qu’un médicament préventif contre le VIH atteint des concentrations efficaces chez les personnes transgenres – Nouvelles CATIE

Un médicament injectable à action prolongée prévient le VIH – Nouvelles CATIE

Le VPH, la dysplasie anale et le cancer anal – Feuillet d’information de CATIE

Addressing HPV-related cancer risk among men who have sex with men (MSM): A guide for health care providers – Conseil d’information et d’éducation sexuelles du Canada (SIECCAN)

RÉFÉRENCE :

Cotte L, Veyer D, Charreau I, et al. Prevalence and incidence of human papillomavirus infection in men having sex with men enrolled in a pre-exposure prophylaxis study: A sub-study of the Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales « Intervention préventive de l’exposition aux risques avec et pour les hommes gays » Trial. Clinical Infectious Diseases. 2021 Jan 23;72(1):41-49.