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Le test de dépistage est une étape essentielle dans la séquence de soins liés à l’hépatite C : grâce au dépistage, les personnes atteintes d’hépatite C peuvent recevoir un diagnostic et bénéficier d’un arrimage aux soins et d’un traitement. Le test de dépistage peut également constituer un volet important de la prévention et de la sensibilisation des personnes exposées à un risque de contracter l’hépatite C. Les innovations en matière de dépistage peuvent ouvrir de nouvelles pistes en vue du diagnostic et de l’arrimage aux soins : le dépistage au point de service en est une. Les résultats des tests de dépistage au point de service sont analysés au centre où l’échantillon est prélevé et sont généralement obtenus en 5 à 60 minutes. L’objet de cet article est de présenter les tests de dépistage au point de service, ses avantages et la manière dont ce type de tests permet d’accroître leur accessibilité tout en simplifiant la séquence de soins liés à l’hépatite C, afin que le Canada puisse atteindre l’objectif mondial d’élimination de l’hépatite C d’ici 2030.

Comment fonctionne le dépistage de l’hépatite C au Canada?

En général, deux tests sont nécessaires pour diagnostiquer une infection par l’hépatite C : un test de dépistage et un test de confirmation. Le premier test (test de dépistage) permet de déceler la présence d’anticorps dirigés contre le virus de l’hépatite C dans le sang et de déterminer si une personne a déjà eu l’hépatite C. Si le résultat du test de dépistage est positif pour les anticorps de l’hépatite C, un deuxième test (test de confirmation) est nécessaire pour vérifier si la personne est atteinte d’une infection active par l’hépatite C. Le test de confirmation permet de déceler la présence du virus dans le sang. Au Canada, il s’agit généralement d’un test de détection de l’ARN viral.

Au Canada, les tests de dépistage de l’hépatite C sont effectués à partir d’un échantillon de sang. L’échantillon de sang peut être prélevé au moyen d’une prise de sang standard par ponction veineuse, ce qui constitue la méthode de test la plus courante pour le dépistage de l’hépatite C au Canada, ou au moyen d’une piqûre au doigt.

Qu’est-ce que le test au point de service?

Avec un test de dépistage au point de service, l’analyse et les résultats sont obtenus là où l’échantillon a été prélevé (c’est-à-dire au point de service) sans que l’échantillon soit envoyé dans un laboratoire à des fins d’analyses1. En général, les tests de dépistage au point de service peuvent être réalisés et produire des résultats dans un délai allant de 5 à 60 minutes, au plus. Dans le cas du dépistage de l’hépatite C au point de service, un échantillon de sang est prélevé par piqûre au doigt et analysé immédiatement sur place. Certains tests de dépistage au point de service permettent d’obtenir des résultats en quelques minutes, de sorte que la personne peut en avoir connaissance durant la même visite. On les désigne souvent comme des « tests rapides au point de service ». Les tests de dépistage au point de service ont été mis au point pour permettre de détecter les anticorps anti-VHC et l’ARN viral de l’hépatite C. Un test de détection des anticorps anti-VHC au point de service a été homologué au Canada. Un test de détection de l’ARN de l’hépatite C au point de service est actuellement utilisé à des fins de recherche au Canada et pourrait être homologué ultérieurement.

Test de détection des anticorps de l’hépatite C au point de service : présentation du test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick

Depuis 2017, un seul test de détection des anticorps de l’hépatite C au point de service a été homologué au Canada. Il s’agit du test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick (fabriqué par OraSure Technologies). Le test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick est un test de détection des anticorps dirigés contre l’hépatite C (c.-à-d. qu’il permet de déterminer si une personne a déjà contracté l’hépatite C) à usage unique, effectué à partir d’un échantillon de sang prélevé au moyen d’une piqûre au doigt. Il peut également être effectué avec de la salive, mais cette version du test n’est pas encore homologuée au Canada.

Le test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick fournit des résultats en 20 minutes2. Toutefois, de nouvelles données indiquent que le test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick peut produire des résultats positifs plus rapidement, en moins de cinq minutes, dans le cas des personnes présentant une infection active par le virus de l’hépatite C3. Cependant, l’utilisation du test selon cette « règle des cinq minutes » (billet de blogue en anglais) ne relève pas de l’usage homologué par Santé Canada.

Exactitude du test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick

L’exactitude d’un test de détection de l’hépatite C se mesure en fonction de sa sensibilité et de sa spécificité. La sensibilité du test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick est de 95,9 % ou plus lorsqu’il est effectué à partir d’échantillons sanguins prélevés au moyen d’une piqûre au doigt4. Cela signifie que si 1000 personnes porteuses d’anticorps anti-VHC passaient un test, 959 personnes obtiendraient un résultat positif exact et au plus 41 personnes obtiendraient un résultat faussement négatif.

La spécificité du test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick est de 99 % ou plus lorsqu’il est effectué à partir d’échantillons sanguins prélevés au moyen d’une piqûre au doigt4. Cela signifie que si 1000 personnes non porteuses d’anticorps anti-VHC passaient le test, 990 personnes obtiendraient un résultat négatif exact et au plus 10 personnes obtiendraient un résultat faussement positif.

Par rapport aux analyses de laboratoire standard en matière de détection des anticorps de l’hépatite C au Canada, dont la sensibilité et la spécificité sont supérieures à 99 %, le risque de résultats faussement négatifs associés au test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick est légèrement plus élevé.

Test de détection de l’ARN de l’hépatite C au point de service : présentation du test Xpert de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt

En date de la publication du présent article, aucun test de détection de l’ARN de l’hépatite C au point de service n’est homologué par Santé Canada à des fins de diagnostic. Toutefois, le test de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt Xpert, fabriqué par la société Cepheid, est utilisé à des fins de recherche dans le cadre de certains programmes et services dispensés au pays. Il s’agit d’un test de détection de l’ARN qui permet de déterminer la présence d’une infection par le virus de l’hépatite C. Les recherches concernant le test de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt Xpert pourraient servir à étayer une éventuelle demande d’homologation auprès de Santé Canada.

Pour analyser les résultats du test de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt Xpert, il faut utiliser le système GeneXpert, un appareil spécialement conçu à cette fin. Le système GeneXpert se décline en plusieurs dimensions, notamment un appareil de seulement 16 cm de large et 30 cm de haut. À ce jour, Santé Canada a homologué des tests de dépistage au point de service reposant sur le système GeneXpert pour ce qui concerne les virus responsables des infections par la COVID-19, la grippe et le virus respiratoire syncytial.

Le test de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt Xpert consiste à prélever 0,1 ml de sang dans une « minivette », un petit instrument servant à prélever du sang au moyen d’une piqûre au doigt. La minivette contenant l’échantillon de sang est transférée dans une cartouche, puis analysée dans le système GeneXpert. Le test Xpert permet d’obtenir un indicateur quantitatif de l’ARN en un peu moins de 60 minutes. Comme le test permet de mesurer la quantité de virus dans l’échantillon, on peut s’en servir pour diagnostiquer une infection active par l’hépatite C, surveiller le traitement et dépister une réinfection5.

Exactitude du test de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt Xpert

La sensibilité du test Xpert pour ce qui est de la détection de l’ARN de l’hépatite C est d’environ 99 %6. Cela signifie que si 1000 personnes porteuses du virus de l’hépatite C passaient le test, 990 personnes obtiendraient un résultat positif exact et 10 personnes obtiendraient un résultat faussement négatif.

La spécificité du test Xpert pour ce qui est de la détection de l’ARN de l’hépatite C est d’environ 99 %6. Cela signifie que si 1000 personnes non porteuses du virus de l’hépatite C effectuaient le test, 990 personnes obtiendraient un résultat négatif exact et 10 personnes obtiendraient un résultat faussement positif.

Le test de détection de la charge virale du VHC à partir d’une piqûre au doigt Xpert fait preuve d’une exactitude très élevée et semblable à celle des analyses de laboratoire standards en matière de détection de l’ARN de l’hépatite C au Canada, dont la sensibilité et la spécificité sont supérieures à 99 %.

Dans quelle mesure le dépistage au point de service de l’hépatite C est-il utilisé au Canada?

Bien que le test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick soit le seul test de dépistage au point de service dont l’utilisation est autorisée au Canada, il n’est subventionné de manière satisfaisante dans aucune province ou aucun territoire, ce qui en fait une méthode pratiquement inaccessible7.

Quels sont les avantages du test de dépistage au point de service par rapport aux autres types de tests?

Le test de dépistage est une étape essentielle en vue de poser un diagnostic et de faire bénéficier les personnes atteintes d’hépatite C d’un arrimage aux services de soins et de traitement; il peut également s’agir d’un élément important des services de prévention et de sensibilisation. Comparativement à d’autres méthodes, le dépistage au point de service présente des avantages susceptibles de faciliter l’accès au dépistage de l’hépatite C. Pour parvenir à éliminer l’hépatite C en tant que problème de santé publique d’ici 2030, il est nécessaire de réaliser des progrès dans le domaine du dépistage afin de simplifier la séquence de soins liés à l’hépatite C au Canada7.

Le dépistage peut être effectué dans différents cadres

Le dépistage au point de service est un moyen de permettre à un plus grand nombre de personnes de passer un test, car il peut être effectué et ses résultats interprétés hors des établissements médicaux et des laboratoires habituels8-10. Par exemple, des tests de dépistage au point de service ont été mis à disposition dans différents cadres où sont déjà offerts des services tels que les pharmacies11, les services de réduction des méfaits, notamment les programmes d’accès à des seringues neuves et les centres de consommation supervisée12-15, les programmes de traitement des troubles liés à l’utilisation de substances16, les prisons17,18, les services d’aide aux itinérants·es19 et les services mobiles20. Des tests de dépistage autonomes à usage unique, comme le test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick, peuvent être effectués et leurs résultats interprétés dans le cadre d’activités de proximité1. Parce qu’ils sont réalisables hors des établissements médicaux habituels, les tests de dépistage au point de service permettent de toucher un plus grand nombre d’individus, en particulier ceux qui ne bénéficient pas d’un accès équitable aux soins de santé, comme les personnes qui utilisent des drogues9 ou celles qui vivent dans des régions éloignées1,22.

L’échantillon peut être prélevé par un éventail de prestataires de soins de santé et de prestataires communautaires

Le dépistage au point de service peut être effectué par tout un éventail de prestataires de soins de santé, notamment les médecins de famille, le personnel infirmier praticien et le personnel infirmier, ainsi que par des prestataires communautaires tels·les que les travailleurs·ses de première ligne et les personnes ayant une expérience actuelle ou vécue du problème12,21,22. Les avantages de ce transfert de tâches sont notamment de favoriser l’accès au dépistage22 et de permettre aux personnes ayant des liens avec un groupe particulier (comme un·e travailleur·se de proximité, une personne chargée de la réduction des méfaits, un·e travailleur·se social·e ou une personne ayant une expérience concrète) de réaliser le test. Les prestataires communautaires qui ont des contacts personnels réguliers avec des usager·ère·s de leur point de service pourront constater que ces derniers sont plus disposés·es à passer le test parce qu’ils ont déjà tissé de bonnes relations avec eux ou elles12. Certaines provinces et certains territoires, mais pas tous, autorisent les prestataires communautaires à effectuer des tests de dépistage au point de service.

Les résultats des tests peuvent être obtenus durant la même consultation, ce qui permet de réduire les cas perdus de vue ou les délais liés au dépistage

La possibilité de faire prélever un échantillon de sang et de connaître le résultat du test durant la même consultation favorise l’obtention d’un diagnostic rapide et permet d’alléger le fardeau émotionnel associé à l’attente des résultats17. Cela permet également de simplifier le processus de dépistage et de réduire le nombre de visites à la clinique ou d’interactions nécessaires avec les prestataires de services liés aux soins de l’hépatite C 1,9,10,17,22,23.

Il s’agit d’une solution de rechange pour les personnes qui ne sont pas en mesure de fournir un échantillon veineux ou qui préfèrent le prélèvement par piqûre au doigt

Comme le dépistage au point de service ne nécessite pas de prise de sang par ponction veineuse, ces tests peuvent être utilisés lorsque la prise de sang constitue un obstacle à la réalisation d’un prélèvement sanguin. Cette méthode est particulièrement avantageuse chez les personnes qui s’injectent des drogues et pour lesquelles la ponction veineuse peut s’avérer difficile en raison de problèmes de santé des veines10,17,22. En outre, les membres de cette population ont souvent des rapports pénibles et stigmatisants avec les prestataires de soins de santé, notamment les phlébotomistes chargés des prélèvements sanguins24, ce qui contribue à leur réticence à subir une ponction veineuse25.

Les taux d’acceptation, et même souvent de préférence, du dépistage au point de service par piqûre du doigt par rapport à la ponction veineuse standard sont élevés parmi les personnes qui s’injectent des drogues13,26,27 et les personnes incarcérées17,18. Dans le cadre d’études sur le dépistage au point de service chez les personnes qui s’injectent des drogues, on a constaté qu’une partie des participants·es ont refusé ou ne pouvaient pas subir de ponction veineuse, mais étaient en mesure de fournir un échantillon de sang par piqûre au doigt. Un pourcentage élevé des participants·es qui ont passé le test de dépistage de l’hépatite C par piqûre au doigt et qui ont refusé la ponction veineuse se sont révélés·es porteurs·ses de l’hépatite C28, ce qui indique que la disponibilité d’une autre option que la ponction veineuse permet de multiplier les possibilités de diagnostic et d’arrimage aux soins pour les personnes qui s’injectent des drogues.

Améliorer l’accès au dépistage et simplifier la séquence de soins liés à l’hépatite C

Compte tenu des avantages qu’offre le dépistage au point de service, comme la communication des résultats du test durant la même consultation et la décentralisation du dépistage dans divers cadres, ce type de test est susceptible de faire augmenter les taux de dépistage. Ce qui peut en retour contribuer à améliorer les taux de diagnostic et d’arrimage aux soins liés à l’hépatite C.

Étant donné que l’accès aux tests de dépistage au point de service est actuellement limité au Canada, peu de recherches ont été menées jusqu’à présent en vue d’étudier leur incidence sur les taux de dépistage, de diagnostic, d’arrimage aux soins ou de traitement au Canada. Un essai comparatif à répartition aléatoire mené à Toronto, en Ontario, visait à évaluer l’incidence du test rapide de dépistage des anticorps anti-VHC OraQuick réalisé au point de service par des pairs chargés·es des activités de proximité. Ces derniers ont été en mesure de faire participer un groupe de personnes marginalisées qui ne connaissaient pas leur état sérologique quant à l’hépatite C et de les informer davantage à ce sujet21. Bien que le taux de résultats positifs aux tests de détection des anticorps ait été élevé (39 %), la réalisation d’un test de détection des anticorps au point de service n’a pas fait augmenter la probabilité que les participants·es se présentent à une visite de suivi auprès d’un·e infirmier·ère spécialisé·e dans le traitement de l’hépatite C dans un centre de soins, comparativement aux personnes directement orientées par les travailleurs·ses de proximité vers un·e infirmier·ère spécialisé·e dans le traitement de l’hépatite C en vue d’un test de laboratoire standard21. D’autres mesures de soutien sont nécessaires pour veiller à ce que les personnes ayant obtenu un résultat positif au test de détection des anticorps au point de service bénéficient d’un test de suivi, d’un diagnostic, d’un arrimage aux soins et d’un traitement16,21,22.

Les études internationales sur le test rapide de détection des anticorps anti-VHC OraQuick ont permis de montrer que le test de détection des anticorps au point de service, suivi d’un test de détection de l’ARN à partir d’un échantillon de sang prélevé chez les personnes dont le résultat au test précèdent était positif, peut être utile dans des contextes où la prévalence de l’hépatite C est élevée. Lorsqu’une personne peut fournir un échantillon de sang aux fins du test de détection de l’ARN durant la même visite où elle se voit communiquer un résultat positif au test de dépistage des anticorps au point de service, il lui reste moins d’étapes à franchir pour recevoir un diagnostic et être orientée en vue du traitement de l’hépatite C12,29.

Le test de détection de l’ARN au point de service peut servir à diagnostiquer l’hépatite C, permettant ainsi d’accélérer la séquence de soins jusqu’à l’arrimage et le traitement visant à guérir l’hépatite C. Une recherche sur la mise à disposition d’un test de détection de l’ARN de l’hépatite C au point de service dans un site de consommation supervisée à Toronto a fait état d’un taux élevé de résultats positifs, soit 52 % des personnes qui ont passé le test. Parmi les participants·es à l’étude atteints·es d’une infection par le virus de l’hépatite C, 67 % ont bénéficié d’un arrimage aux soins sur place, et parmi ceux-ci, 67 % ont entamé un traitement. Toutes les personnes ayant passé un test de la réponse virologique soutenue (test de charge virale de l’hépatite C visant à déterminer si le traitement a été efficace) étaient guéries14.

Dans le contexte d’une étude sur l’intégration du dépistage de l’ARN au point de service dans le cadre de programmes de réduction des méfaits et d’autres services destinés à des personnes qui utilisent des drogues en Catalogne, en Espagne, les taux d’accès au traitement et de guérison associés à cette méthode étaient plus élevés, et le nombre de personnes perdues de vue inférieur, comparativement aux résultats associés au dépistage standard en laboratoire30. D’autres études ont fait état de taux élevés d’arrimage aux soins13,20 et au traitement15,20 parmi les personnes marginalisées; ces résultats ont été obtenus en procédant d’abord à un test de détection des anticorps au point de service, puis en proposant aux personnes dont le résultat était positif un test d’ARN au point de service.

De nouveaux moyens d’accroître l’accès au dépistage et l’arrimage aux soins sur la base des résultats des tests ont été mis à l’essai avec succès avec d’autres trousses de dépistage au point de service sur le modèle des trousses de dépistage du VIH31. La facilité relative d’utilisation des tests de dépistage de l’hépatite C au point de service permet également d’envisager un éventuel recours à l’autodépistage de l’hépatite C23,32,33. À l’instar de l’autodépistage du VIH, de la diffusion généralisée des trousses de dépistage de l’antigène de la COVID-19 ou de l’utilisation courante des tests de grossesse à domicile, la possibilité d’accéder à un plus large éventail de modalités de dépistage au point de service au Canada pourrait grandement contribuer à élargir l’accès au dépistage.

Difficultés et lacunes potentielles

L’accès limité au test de dépistage au point de service au Canada constitue une difficulté majeure7. Actuellement, ces tests ne sont pas subventionnés par les systèmes de santé publique ou les systèmes médicaux; pour y avoir accès, il faut généralement faire appel à des fonds privés ou à des centres universitaires qui effectuent des recherches. Les programmes et les services ne pourront pas disposer d’un accès satisfaisant aux tests de dépistage au point de service ou les intégrer dans leurs activités sans financement public. Outre les deux tests dont il est question dans cet article, d’autres tests de détection des anticorps anti-VHC et de l’ARN de l’hépatite C au point de service ont été mis au point8,33, mais ils ne sont pas offerts au Canada. La multiplication des options de tests au point de service au Canada et leur financement public contribueraient grandement à en faciliter l’accès7.

D’autres difficultés et lacunes doivent aussi être prises en compte. Dans plusieurs provinces et territoires, les protocoles de laboratoire standard sont tels que la confirmation des résultats des tests au point de service implique la réalisation d’un deuxième test (c.-à-d. que le sang est prélevé par ponction veineuse et que l’échantillon est envoyé au laboratoire de santé publique). La nécessité d’effectuer des tests en laboratoire pour confirmer les résultats des tests réalisés au point de service limite la mesure dans laquelle ceux-ci permettent de réduire le nombre de visites requises pour avancer dans la séquence de soins. Toutefois, si les résultats des tests effectués au point de service étaient reconnus et acceptés par les systèmes de santé publique et les systèmes médicaux, sans que les protocoles n’exigent d’effectuer de nouveaux tests en laboratoire pour confirmer les premiers résultats, le dépistage au point de service pourrait simplifier et accélérer le processus de diagnostic de l’hépatite C et l’instauration du traitement.

Tous les tests de dépistage au point de service ne peuvent pas produire des résultats immédiats. Le délai nécessaire à l’obtention des résultats au test de détection de la charge virale du VHC à partir d’un test Xpert par piqûre au doigt au point de service est d’environ 60 minutes. Des études ont permis de constater que de nombreuses personnes n’attendront pas 60 minutes pour recevoir le résultat de leur test de détection de l’ARN au point de service durant la même consultation13. Réduire le temps d’attente des résultats des tests et intégrer les tests aux autres services de santé sont des moyens d’augmenter la proportion de personnes qui patienteront pour obtenir leur résultat34.

Bien que les tests de dépistage au point de service soient considérés comme assez simples à effectuer, certaines études ont révélé qu’un faible pourcentage des tests de détection de la charge virale du VHC à partir d’un test Xpert par piqûre au doigt ne produisait pas un résultat valable en raison du faible volume de sang prélevé6,28,35. Pour effectuer le test Xpert, il faut prélever un échantillon de sang de 0,1 ml (environ 0,1 gramme de sang) au moyen d’une piqûre au doigt, ce qui représente plus que quelques gouttes de sang. Une formation sur les stratégies de collecte de cette quantité de sang par piqûre au doigt pourrait faciliter la réalisation pratique de ces tests36.

Enfin, un élargissement de l’accès au dépistage et au diagnostic suppose que les prestataires soient en mesure de procéder à l’arrimage aux soins, de proposer un traitement visant à guérir l’hépatite C et de fournir au besoin un soutien continu afin de prévenir les nouvelles infections et les réinfections. Les services doivent être proposés dans des milieux exempts de stigmatisation, tenant compte des traumatismes, culturellement sûrs, et adaptés aux besoins des populations auxquelles ils s’adressent.

Conséquences pour les prestataires de services

Les tests de détection des anticorps anti-VHC et de l’ARN de l’hépatite C au point de service sont très précis et peuvent faire augmenter le recours aux tests de dépistage. Ce type de tests peut être particulièrement utile chez les groupes où la prévalence de l’hépatite C est plus élevée, comme les personnes qui utilisent des drogues ou celles qui vivent dans des régions éloignées. Les tests de dépistage au point de service peuvent faciliter l’accès au dépistage et simplifier le processus de prise en charge en permettant aux prestataires d’effectuer le test et de communiquer les résultats durant la même consultation. Ils permettent également de procéder au dépistage de l’hépatite C dans des établissements non médicaux où l’on offre déjà des services, comme les programmes de réduction des méfaits, les services d’aide aux itinérants·es tels que les refuges ou les programmes d’accueil, les services mobiles et les services de proximité.

Les prestataires de services devront déterminer s’ils·elles peuvent recourir à des tests de dépistage au point de service et comment intégrer les résultats de ces tests dans les structures de santé publique et les systèmes médicaux. Les prestataires de services peuvent envisager de plaider en faveur du financement public du dépistage au point de service dans leur région et de la mise en place de nouvelles méthodes de distribution des tests, de manière à élargir l’accès au dépistage. Ils·elles peuvent également envisager de promouvoir l’acceptation des résultats du dépistage au point de service par les systèmes de santé publique et les systèmes médicaux (de manière à ce qu’il ne soit pas nécessaire en vertu des protocoles de laboratoire standard d’effectuer un deuxième test pour confirmer les précédents), afin de simplifier véritablement la séquence de soins et de tirer pleinement parti des avantages du dépistage au point de service.

Il est essentiel que les personnes dont le résultat du test de détection de l’ARN de l’hépatite C est positif puissent bénéficier d’un soutien continu visant à prévenir les infections et les réinfections par l’hépatite C, ainsi que d’un arrimage aux soins et au traitement de l’hépatite C.

Ressources connexes

L’analyse de gouttes de sang séché pour diagnostiquer l’hépatite C et le VIH au Canada – Point de mire sur la prévention (article)

Simplifier le parcours diagnostique de l’hépatite C : le dépistage réflexe au Canada – Point de mire sur la prévention (article)

L’hépatite C : le dépistage – Section du document « Hépatite C : un guide détaillé »

Vous pouvez avoir l’hépatite C sans le savoir – Ressources pour les clients·es, y compris une vidéo, une affiche et une carte postale

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À propos de l’auteur

Rivka Kushner est gestionnaire, Échange de connaissances sur l’hépatite C à l’échelle canadienne chez CATIE. Elle détient une maîtrise en santé publique avec spécialisation en promotion de la santé et possède de l’expérience en matière d’échange des connaissances se rapportant à l’usage de substances, à la santé sur les lieux de travail et à la durabilité environnementale.

Révision externe effectuée par : Bernadette Lettner et Dr Jordan Feld