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  • Une équipe de recherche a examiné des données se rapportant à 19 000 personnes séropositives soignées en Ontario pendant 23 ans
  • Malgré une baisse des taux de cancers liés au sida, le risque de cancer était 20 % plus élevé chez les personnes séropositives
  • L’équipe a souligné le besoin de dépistages et de stratégies de prévention du cancer

D’ordinaire, lorsqu’ils sont utilisés comme il se doit, les traitements contre le VIH (TAR) réduisent la quantité de VIH dans le sang à un tel point qu’il n’est plus possible de détecter le virus, après quelques mois, à l’aide de tests courants en laboratoire. L’utilisation continue du TAR aide à maintenir la suppression de la charge virale, ce qui permet au système immunitaire de faire des réparations, et le risque d’infections liées au sida devient conséquemment très faible. L’effet du TAR est tellement puissant que les scientifiques prévoient une espérance de vie quasi normale pour de nombreuses personnes suivant ce genre de traitement.

Le TAR ne peut toutefois résoudre tous les problèmes de santé liés à l’infection au VIH chronique. En effet, nombre d’études ont permis de constater que, même si le TAR peut réduire significativement l’activation immunitaire et l’inflammation excessives dans le sang, il ne peut restaurer les niveaux normaux de celles-ci. Certaines études laissent croire que l’activation immunitaire et l’inflammation persistantes contribuent à des défauts subtils de l’immunité.

À mesure que les personnes séropositives vivent plus longtemps grâce au TAR, leur système immunitaire s’affaiblit graduellement avec l’âge comme celui de tout le monde. De plus, selon certain­·e·s scientifiques, il est possible que la combinaison de l’activation immunitaire et de l’inflammation excessives augmente le risque de cancer chez les personnes vivant avec le VIH.

Cancers et VIH

Dès le début des années 1980, des scientifiques ont remarqué que les personnes séropositives étaient plus à risque de présenter certains cancers, dont les suivants :

  • sarcome de Kaposi (KS) : causé par un virus appelé herpès-virus humain 8 (HHV-8)
  • lymphome non hodgkinien : dans certains cas, cette maladie est associée à l’infection par le virus Epstein-Barr (EBV)
  • cancer invasif du col utérin : causé par certaines souches du virus du papillome humain (VPH)

Nombre d’études subséquentes ont révélé que certaines personnes séropositives étaient également co-infectées par le virus de l’hépatite B (VHB) ou de l’hépatite C (VHC), lesquels augmentent le risque de cancer du foie.

Notons aussi que certaines personnes séropositives fument la cigarette et boivent de l’alcool, lesquels sont également des facteurs de risque par rapport à certains cancers.

Tous ces facteurs, soit les co-infections virales, l’utilisation de substances nocives et l’immunosuppression causée par le VIH, peuvent jouer un rôle dans l’augmentation des risques de cancer chez cette population.

Étude ontarienne

Une équipe de recherche ontarienne a examiné des données se rapportant à la santé de 19 403 adultes vivant avec le VIH que l’on avait recueillies entre janvier 1997 et novembre 2020. L’équipe a porté son étude sur les problèmes liés au cancer.

Au cours de l’étude, le nombre de cas de cancers liés au sida a chuté significativement, alors que les taux de cancers non liés au sida sont restés stables. Au début, la proportion de diagnostics de cancer était plus faible chez les femmes séropositives que chez les hommes. Cependant, durant les dernières années de l’étude, les taux de cancer ont atteint des niveaux semblables chez les deux sexes.

Détails de l’étude

Aux fins de son étude, l’équipe de recherche a regroupé les cancers de la manière suivante :

Cancers liés au sida

  • sarcome de Kaposi
  • lymphome non hodgkinien
  • cancer du col utérin

Cancers non liés au sida causés par infections virales

  • cancers liés au VPH de l’anus, du pénis, de la gorge, de la langue, du vagin et de la vulve
  • cancer de l’estomac lié à H. pylori (bactérie pouvant causer des ulcères gastriques persistants)
  • cancer du foie causé par le VHB ou le VHC
  • lymphome hodgkinien et cancers des voies nasales ou de la gorge (attribuables dans certains cas à l’EBV)

Cancers sans rapport avec des infections

  • cancers du sein, du poumon, de la thyroïde et de nombreux autres

Selon l’équipe de recherche, les participant­·e·s (79 % d’hommes, 21 % de femmes) avaient environ 36 ans lors de leur admission à l’étude. La plupart d’entre eux et elles sont né·e·s au Canada et vivaient dans des centres urbains.

Résultats

Au cours de l’étude, 1 275 nouveaux cas de cancer ont été diagnostiqués. Les hommes étaient plus susceptibles de présenter un cancer lié au sida, alors que les femmes avaient tendance à présenter des cancers d’origine non infectieuse.

Les cinq cancers les plus souvent diagnostiqués chez les deux sexes étaient les suivants, par ordre décroissant de la fréquence :

Chez les hommes

  • lymphome non hodgkinien
  • sarcome de Kaposi
  • cancer de la prostate
  • cancer du poumon
  • cancer anal

Chez les femmes

  • cancer du sein
  • lymphome hodgkinien
  • cancer du poumon
  • cancer de la thyroïde
  • cancer de l’utérus ou cancer de l’ovaire

Tendances

Au cours de l’étude, le nombre de diagnostics de cancer a baissé chez les hommes. Selon l’équipe de recherche, cette baisse était attribuable à une réduction des cancers liés au sida.

Chez les femmes, le nombre de diagnostics de cancer a augmenté au fil du temps à cause de cancers d’origine non infectieuse.

Proportions de personnes atteintes de cancer

À la fin novembre 2020, 17 181 participant·e·s vivaient encore. Sur ce nombre, voici les proportions ayant fait l’objet d’un diagnostic de cancer durant les périodes spécifiques suivantes :

  • 0,8 % avaient reçu un diagnostic de cancer dans les deux dernières années
  • 1,8 % avaient reçu un diagnostic de cancer dans les cinq dernières années
  • 3 % avaient reçu un diagnostic de cancer dans les 10 dernières années

À retenir

Selon les estimations de l’équipe de recherche, le risque de cancer était 20 % plus élevé chez les personnes séropositives que chez les personnes séronégatives. Cependant, selon l’équipe, d’autres études avaient révélé que les personnes séropositives passaient moins fréquemment des tests de dépistage du cancer que les personnes séronégatives. Par conséquent, il est possible qu’une proportion des personnes séropositives figurant dans l’étude ontarienne soient décédées d’un cancer non diagnostiqué. Le risque global de cancer pourrait donc être plus élevé que les estimations chez les personnes vivant avec le VIH.

L’équipe de recherche a constaté que 3 % des personnes séropositives dans l’étude avaient survécu à un cancer.

Bien que le risque de cancers liés au sida ait chuté durant l’étude, l’équipe de recherche a constaté que les taux de nouveaux cancers non liés au sida ont peu changé.

Comme l’équipe de recherche a trouvé la probabilité de cancer plus élevée chez les personnes séropositives, elle a encouragé les équipes médicales à « incorporer des stratégies de prévention du cancer dans les soins complets prodigués aux personnes séropositives ». De telles stratégies pourraient inclure les éléments suivants :

  • discuter des risques de cancer avec les patient·e·s
  • encourager la réduction des risques, tel l’arrêt du tabagisme
  • préconiser certaines interventions visant la prévention du cancer, telles que la vaccination contre le VPH, le traitement de l’hépatite C et le dépistage du cancer colorectal et des cancers liés au VPH

—Sean R. Hosein

Ressources

Un faible rapport CD4/CD8 peut aider à prévoir le risque de cancer chez les personnes séropositives, selon une étude nord-américaineNouvelles CATIE

Une équipe de recherche française étudie les deuxièmes cancers touchant des personnes séropositives ayant survécu à un premierNouvelles CATIE

Risque de deuxième cancer chez les personnes séropositives ayant survécu à un lymphome hodgkinienNouvelles CATIE

La baisse du compte de CD4+ après un traitement contre le cancer écourterait la survie de certaines personnes séropositives – Nouvelles CATIE

Société canadienne du cancer

Cancer – Gouvernement du Canada

Cancer – Gouvernement du Québec

RÉFÉRENCES :

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