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  • Les infections et les surdoses figurent parmi les méfaits possibles des troubles de consommation de substances (TCS)
  • Selon une étude britanno-colombienne d’envergure, le risque de maladies du cœur serait presque doublé chez les personnes atteintes d’un TCS
  • Outre la réduction des méfaits, il serait pertinent d’ajouter la prévention des maladies cardiovasculaires aux soins des personnes atteintes d’un TCS

Selon la définition de l’American Psychiatry Association, un trouble de consommation de substances (TCS) « est une affection complexe caractérisée par l’utilisation non maîtrisée d’une substance malgré les conséquences nuisibles. Les personnes atteintes d’un TCS éprouvent des envies intenses d’utiliser une ou plusieurs substances, telles que l’alcool, le tabac ou des drogues, à un tel point que leur capacité de fonctionner au quotidien est perturbée. Ces personnes continuent d’utiliser la substance même si elles savent qu’elle leur cause des problèmes ou qu’elle en causera. Parfois, dans les cas les plus graves, on appelle les TCS des dépendances ».

Les approches de réduction des méfaits, qui incluent la distribution de matériel d’injection neuf, les traitements de substitution aux opioïdes, les sites de consommation supervisée et d’autres mesures, sont importantes pour les raisons suivantes :

  • Elles réduisent le risque de conséquences nuisibles causées par des infections virales comme le VIH ou l’hépatite C.
  • Elles réduisent le risque de problèmes associés à d’autres microbes comme les champignons et les bactéries.
  • Elles réduisent le risque de surdose.

Outre les risques nommés ci-dessus, il est probable que d’autres questions importantes pour la santé générale des personnes qui utilisent des drogues ont été négligées jusqu’ici et nécessiteront plus d’attention à l’avenir.

Maladies cardiovasculaires

Les maladies cardiovasculaires sont des causes de décès courantes au Canada et dans d’autres pays. Une équipe de recherche de la Colombie-Britannique a analysé des renseignements se rapportant à la santé sauvegardés dans de nombreuses bases de données de cette province. L’équipe a examiné les diagnostics de maladies cardiovasculaires posés entre 2015 et 2018. Elle s’intéressait particulièrement aux associations éventuelles entre les diagnostics de TCS et les nouveaux cas de maladies cardiovasculaires.

L’équipe de recherche a analysé les données de plus de 600 000 résidents de la Colombie-Britannique choisis au hasard. Elle a constaté que les personnes présentant un TCS étaient presque deux fois plus susceptibles de faire l’objet d’un nouveau diagnostic de maladie cardiovasculaire que les personnes qui n’avaient pas de TCS. Les personnes vivant aux prises avec un trouble de consommation d’opioïdes ou un trouble de consommation de stimulants étaient particulièrement vulnérables à cet égard.

Les résultats de cette étude britanno-colombienne font largement écho à ceux d’études menées au Danemark, en Finlande et dans d’autres pays. L’étude canadienne souligne la nécessité de sensibiliser les clinicien·ne·s et les personnes atteintes de TCS au risque accru de maladies cardiovasculaires et de les inciter à prendre des mesures pour réduire le risque.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche a effectué deux analyses distinctes :

  • Analyse transversale : Elle a analysé des données captées à un seul moment dans le temps auprès de presque 800 000 personnes.
  • Analyse prospective : Elle a analysé des données recueillies sur une période de quatre ans auprès de 617 863 personnes qui n’avaient pas reçu de diagnostic de maladie cardiovasculaire avant le début de l’étude.

Dans cet article de Nouvelles CATIE, nous nous concentrons sur l’analyse prospective longitudinale parce que ce genre de travaux de recherche permet de relever des tendances au fil du temps. La cohorte de cette étude a été sélectionnée au hasard, avait un âge moyen de 45 ans et se composait à 50 % d’hommes et à 50 % de femmes, grosso modo.

L’équipe de recherche a utilisé de nombreuses bases de données administratives de la Colombie-Britannique. Une fois les données recueillies, l’équipe a enlevé tous les renseignements permettant d’identifier les personnes sélectionnées.

L’équipe de recherche a recensé 12 sortes de maladies cardiovasculaires, dont la crise cardiaque, l’AVC, l’arythmie cardiaque, l’hypertension, l’insuffisance cardiaque et d’autres.

Résultats

Selon l’équipe de recherche, « les personnes présentant n’importe quel genre de TCS étaient plus susceptibles de faire l’objet d’un nouveau diagnostic de maladie cardiovasculaire ».

L’équipe a également constaté que « les personnes présentant un trouble de consommation d’alcool, d’opioïdes ou de stimulants étaient plus susceptibles de présenter une [maladie cardiovasculaire] ».

Cette association entre les TCS et les maladies cardiovasculaires s’est maintenue même après la prise en considération de facteurs susceptibles d’introduire par mégarde un biais dans les résultats (p. ex. l’âge avancé, le sexe, un diagnostic de maladie mentale, la situation socioéconomique).

À retenir

Les opioïdes, les stimulants et d’autres substances comme l’alcool peuvent contribuer aux maladies cardiovasculaires pour diverses raisons. Certaines raisons résident dans l’effet que les drogues exercent directement sur le cœur et les vaisseaux sanguins. D’autres se rapportent éventuellement à la façon dont la drogue en question est utilisée (si elle est fumée ou injectée, par exemple).

Aucune étude n’est parfaite

Il est possible que la manière dont cette étude a été conçue ait influé par inadvertance sur les conclusions de l’équipe de recherche, du moins en théorie. Par exemple, il est plausible que certaines maladies cardiovasculaires légères préexistantes n’étaient pas mentionnées dans les données des personnes concernées au début de l’étude. Dans un tel cas, l’apparition subséquente d’une maladie cardiovasculaire aurait été vue comme un nouveau diagnostic.

De plus, comme l’équipe de recherche ne disposait pas de données complètes sur le tabagisme, elle n’a pas été en mesure d’évaluer exhaustivement ses effets sur les résultats. L’équipe a essayé de contourner l’absence de certaines données en cherchant des diagnostics de maladies pulmonaires et de diabète pour remplacer le tabagisme non mesuré (maladie pulmonaire) et les maladies cardiovasculaires non diagnostiquées (diabète) comme variables dans cette étude. Rappelons que de nombreuses maladies pulmonaires sont causées par le tabagisme et que le diabète peut contribuer aux maladies cardiovasculaires. Malgré les données incomplètes sur le tabagisme, les données probantes indiquant un lien entre les TCS et les maladies cardiovasculaires sont étayées par d’autres études. L’équipe aurait peut-être capté plus de données sur le tabagisme en menant une étude de plus faible envergure basée sur des entrevues avec les participant·e·s, mais elle n’aurait pas été en mesure de recenser autant de diagnostics de maladies cardiovasculaires que lors de la présente étude.

Il est à espérer que des analyses futures parviendront à mieux tenir compte de l’usage du tabac. Cependant, malgré la faiblesse de la présente étude à cet égard, la taille de sa cohorte et le fait qu’il s’agisse d’une étude prospective sont des facteurs importants qui en soutiennent les résultats. Notons aussi que des associations entre les TCS et les maladies cardiovasculaires ont été constatées lors d’études menées dans d’autres pays.

À l’avenir

Cette étude britanno-colombienne souligne l’importance de prévenir et de dépister les maladies cardiovasculaires chez les personnes atteintes d’un TCS. Notons à cet égard que l’American Heart Association a réclamé la tenue de plus d’études dans l’espoir d’améliorer la santé cardiaque de ce groupe.

Ressources

Répondre à une surdose d’opioïdes, Répondre à une surconsommation ou à une surdose de stimulantsCentre de distribution de CATIE

Renseignements généraux sur la réduction des méfaits - CATIE

L’hépatite CCATIE

Toward the HeartBCCDC Harm Reduction Services

—Sean R. Hosein

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