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  • Nombre d’études ont révélé que la dépression est relativement courante chez les personnes séropositives
  • Le dépistage et le traitement de la dépression augmenteraient de 15 % les taux d’inhibition virale
  • Une équipe des CDC a recommandé l’accroissement du dépistage et du traitement de la dépression dans les cliniques VIH

Des études ont révélé que les problèmes de santé mentale touchent de nombreuses personnes vivant avec le VIH. La dépression est d’ordinaire le problème de santé mentale le plus diagnostiqué. Selon nombre de scientifiques, les taux de dépression seraient trois fois plus élevés chez les personnes séropositives que chez les personnes séronégatives. Lors d’une étude publiée plus tôt cette année, une analyse de données recueillies auprès de 1 288 personnes séropositives vivant en Ontario a permis de constater qu’environ 40 % d’entre elles souffraient de dépression.

Selon une équipe de recherche des Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis, la dépression est associée aux symptômes suivants :

  • sentiment de désespoir
  • épuisement (grande fatigue)
  • troubles de la concentration
  • sentiment d’inutilité

Selon l’équipe de recherche, ces problèmes « interfèrent souvent avec la capacité et la motivation à mener les activités importantes de la vie. Pour [les personnes séropositives], cela peut inclure l’observance d’un traitement contre le VIH et d’autres médications, ainsi que l’obtention de soins visant la prévention des comorbidités et la progression de la maladie due au VIH ».

L’observance rigoureuse d’un traitement efficace contre le VIH (TAR) est essentielle pour atteindre et maintenir une charge virale inhibée et en connaître les bienfaits importants. Selon de nombreuses études, les personnes sous traitement antirétroviral (TAR) qui ont une charge virale inhibée peuvent s’attendre à une espérance de vie quasi normale (toutes choses étant égales par ailleurs). Un autre bienfait du TAR réside dans le fait que les personnes dont la charge virale est inhibée ne transmettent pas le virus à leurs partenaires sexuel·le·s. Or, pour connaître pleinement les bienfaits du TAR, il est important que les gens fassent l’objet d’un dépistage de la dépression et, advenant un diagnostic, qu’elles aient la possibilité de discuter de leurs options en matière de traitement.

Détails de l’étude

L’équipe de recherche des CDC a eu recours à un modèle informatique actualisé et antérieurement validé pour comparer les conséquences de deux interventions sur la santé de personnes vivant avec le VIH. L’équipe a saisi dans ce modèle informatique des données médicales anonymisées se rapportant à un échantillon représentatif de personnes séropositives vivant aux États-Unis.

Voici une description des deux interventions :

Accroissement du diagnostic et du traitement de la dépression : En vertu de ce modèle, chaque personne séropositive est évaluée pour déterminer si elle est atteinte d’une dépression; si un diagnostic est posé, la personne reçoit un traitement. Grâce à cette intervention, la moitié des personnes sous traitement connaissent une rémission de la dépression.

Maintien du statu quo : Dans ce cas, 45 % des personnes atteintes de dépression reçoivent un diagnostic, et environ 55 % de celles-ci obtiennent un traitement, ce qui donne un taux de rémission de la dépression de 33 %.

Résultats clés

Dans l’ensemble, quand l’option de la hausse du dépistage et du traitement était suivie parmi les personnes souffrant de dépression 15 % de plus d’entre elles atteignaient une charge virale inhibée, comparativement à l’intervention reposant sur le maintien du statu quo.

À retenir

Comme aucun modèle informatique n’est parfait, nous n’avons pas fourni de nombreux détails sur les scénarios envisagés par cette équipe de recherche. Il importe tout de même de souligner le résultat le plus saillant de cette étude, à savoir que l’accroissement du dépistage et du traitement de la dépression a de fortes chances d’aider une proportion importante de personnes vivant avec le VIH.  

Cette équipe de recherche n’a pas créé de modèle pour déterminer les répercussions des traitements psychologiques contre la dépression. Il n’empêche que ces derniers seront également bénéfiques chez certaines personnes séropositives atteintes de dépression.

Comme il arrive que certaines personnes fassent une rechute après s’être remises initialement d’une dépression, il est possible que ce modèle informatique ait surestimé les effets du traitement de celle-ci.

Selon l’équipe de recherche, « même si les personnes séropositives ont accès à des services de santé mentale, la stigmatisation des problèmes de santé mentale peut constituer un obstacle à leur utilisation ». Il se peut aussi que des facteurs sociaux et structuraux empêchent l’acceptation et le recours au traitement de la dépression chez des populations vulnérables ayant subi de mauvais traitements dans le passé.

Il importe aussi de noter la possibilité d’un rétablissement spontané chez certaines personnes aux prises avec la dépression. L’équipe de recherche a toutefois précisé qu’un tel évènement était plus probable dans les cas de dépression légère.

À l’avenir

Selon l’équipe de recherche, des études antérieures avaient révélé que « le dépistage systématique de la dépression procure des bienfaits indéniables. Dans le contexte des soins du VIH, le diagnostic et le traitement adéquats [de toutes les personnes séropositives atteintes de dépression] feraient non seulement avancer nos objectifs nationaux en matière de prévention grâce à leurs répercussions sur l’inhibition virale, mais cela favoriserait aussi l’atteinte de nouvelles cibles en ce qui concerne la qualité de vie [des personnes vivant avec le VIH]. Spécifiquement, en répondant à des besoins insatisfaits en matière de santé mentale, le comblement des lacunes dans le continuum des soins de la dépression permettrait d’améliorer la santé et, conséquemment, la qualité de vie d’une proportion appréciable de personnes séropositives ayant fait l’objet d’un diagnostic de dépression ».

Notons enfin que des investissements additionnels dans les services de santé mentale seront nécessaires si nous souhaitons faire des progrès dans la lutte contre la dépression chez les personnes séropositives et dans la société en général.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Koenig LJ, Khurana N, Islam MH et al. Closing the gaps in the continuum of depression care for persons with HIV: modeling the impact on viral suppression in the United States. AIDS. 2023 Jun 1;37(7):1147-1156.
  2. Pence BW, Gaynes BN. Time to get it right: investing in the mental wellbeing of people living with HIV. AIDS. 2023 Jun 1;37(7):1167-1169. 
  3. Commission de la santé mentale du Canada. Faire valoir les arguments en faveur des investissements dans le système de santé mentale du Canada à l’aide de considérations économiques. Mars 2017.
  4. Christensen BL, Tavangar F, Kroch AE et al. Previous syphilis not associated with neurocognitive outcomes in people living with human immunodeficiency virus in Ontario, Canada. Sexually Transmitted Diseases. 2023 Jan 1;50(1):34-41.