La santé du cerveau

Vieillir en santé inclut nécessairement le maintien d’une bonne santé cérébrale. Depuis que les traitements antirétroviraux efficaces sont largement accessibles, la démence liée au VIH, soit la détérioration grave de la fonction mentale qui affligeait autrefois de nombreuses personnes séropositives, est rarement diagnostiquée de nos jours. Cependant, les formes plus légères de déficience cognitive demeurent courantes parmi les personnes vivant avec le VIH. Or, grâce à la poursuite de la recherche, nous en apprenons de plus en plus sur les moyens de minimiser les effets exercés par le VIH sur le cerveau.

Le terme troubles neurocognitifs liés au VIH regroupe une gamme de problèmes différents, dont les suivants :

  • Déficience neurocognitive asymptomatique — De nombreuses personnes ayant un trouble neurocognitif lié au VIH obtiennent des scores bien inférieurs aux attentes lors des tests neuropsychologiques formels, mais elles n’éprouvent aucun symptôme notable, et leur quotidien ne semble pas touché.
  • Déficience neurocognitive légère — Certaines personnes ayant un trouble neurocognitif lié au VIH éprouvent des problèmes légers ou modérés en ce qui concerne la pensée, la mémoire, l’humeur ou la coordination et la fonction physiques. Les symptômes peuvent inclure les suivants : l’incapacité de se rappeler de choses récemment entendues, lues ou vues; la difficulté à se souvenir d’incidents passés ou de faits autrefois connus; la difficulté à apprendre de nouvelles choses ou à résoudre les problèmes; la confusion; la dépression ou l’anxiété; les problèmes d’attention; l’affaiblissement des réflexes; un sentiment de « brouillard cérébral » ou de flou mental.
  • Démence associée au VIH — Il s’agit du trouble neurocognitif lié au VIH le plus grave et le plus rare. Chez les personnes atteintes de démence liée au VIH, le déclin de la fonction cérébrale compromet considérablement les activités quotidiennes et la qualité de vie.

Le nombre précis de personnes séropositives vivant avec un trouble neurocognitif lié au VIH au Canada n’est pas clair. La vaste majorité des personnes atteintes ont une déficience neurocognitive asymptomatique ou légère.

Facteurs de risque de troubles neurocognitifs

On ne comprend pas tout des troubles neurocognitifs liés au VIH, mais on les attribue généralement à une combinaison de deux facteurs : l’endommagement des cellules cérébrales causé par l’inflammation chronique et l’affaiblissement du système immunitaire qui laisse les cellules nerveuses sans protection. Outre les effets que le VIH exerce sur le cerveau, il existe de nombreux autres facteurs qui peuvent causer ou contribuer aux déficiences neurocognitives, dont les suivants :

  • vieillissement
  • dépression
  • commotion cérébrale
  • consommation d’alcool
  • maladie cardiovasculaire, hépatite C, diabète ou maladie thyroïdienne
  • carence en vitamines B1 et B12
  • usage de drogues, telles que la cocaïne, le crystal meth, l’héroïne, le fentanyl, l’ecstasy et le LSD 
  • affections neurologiques comme l’épilepsie et la sclérose en plaques
  • troubles d’apprentissage

Diagnostiquer les troubles neurocognitifs

Diagnostiquer les troubles neurocognitifs liés au VIH peut comporter de nombreuses difficultés. Plusieurs des tests diagnostiques utilisés prennent beaucoup de temps, et votre prestataire de soins de santé risque de ne pas disposer des ressources nécessaires pour les faire. Cependant, grâce à l’attention croissante portée à cette maladie par les scientifiques et les professionnel·le·s de la santé, un certain nombre de tests de dépistage plus faciles à faire passer ont été mis au point. La liste inclut l’Échelle de démence liée au VIH, un outil en cinq questions utilisé pour détecter à la fois les cas légers et graves de déficience, le test cognitif MoCA (pour Montreal Cognitive Assessment), conçu pour faciliter la détection des déficiences cognitives légères, et l’échelle IHDS (échelle internationale d’évaluation de la démence liée au VIH), dont l’usage a été validé au sein de milieux culturels différents, mais non pour le dépistage des cas légers de troubles neurocognitifs liés au VIH.

Si vous vivez avec le VIH et êtes préoccupé·e par les changements d’ordre mental que vous éprouvez, la première étape consiste à consulter votre prestataire de soins de santé afin d’exclure d’autres affections susceptibles de causer des symptômes que certains associent par erreur à un trouble neurocognitif lié au VIH. Les affections en question incluent la dépression, l’anxiété, l’hépatite B ou C, l’usage de substances, les maladies cardiovasculaires, le prédiabète et le diabète, la carence en vitamine B12 et l’hypothyroïdie, ainsi que les effets secondaires de certains médicaments sur ordonnance, dont certains antirétroviraux, tels que l’éfavirenz (vendu sous le nom de Sustiva et également présent dans l’agent d’association Atripla) et ses versions génériques, et les opioïdes. En écartant ces autres causes possibles, on peut établir la probabilité d’un trouble neurocognitif lié au VIH et la nécessité de tests diagnostiques. Si l’un ou plusieurs de ces autres facteurs sont à l’origine des changements mentaux, le fait de s’y attaquer pourra aider à atténuer ou même à éliminer le problème neurocognitif.

Si vous vous inquiétez de l’état de votre mémoire ou de votre santé cognitive, il peut être utile de noter vos problèmes, ainsi que leur fréquence, dans un journal afin que vous puissiez en parler à votre prestataire de soins de santé. Si vos proches ou d’autres personnes vous signalent des symptômes qu’ils ou elles ont observés, vous souhaiterez peut-être aussi les noter. Plus vous pourrez donner de renseignements à votre prestataire de soins de santé, plus vous serez en mesure de résoudre ensemble le problème.

Réduire les risques et atténuer les symptômes

Heureusement, il existe des mesures que vous pouvez prendre pour aider à prévenir les symptômes mentionnés ci-dessus ou, si vous éprouvez déjà des symptômes, pour les minimiser ou les empêcher de s’aggraver.

Prenez vos médicaments contre le VIH

Le traitement antirétroviral (TAR) réduit considérablement le risque d’éprouver les types de déficience neurocognitive liée au VIH les plus graves. Depuis l’introduction à grande échelle de traitements antirétroviraux d’association, les taux de démence liée au VIH ont chuté vertigineusement au Canada et dans les autres pays à revenu élevé. Les personnes ayant une charge virale indétectable sont beaucoup moins susceptibles de souffrir de démence associée au VIH ou de voir leurs symptômes s’aggraver si elles sont déjà atteintes. 

Réduisez l’inflammation

Puisque l’inflammation dans le cerveau semble être une importante cause sous-jacente des troubles neurocognitifs liés au VIH, il est important de la contrer.  

L’hépatite B ou C chronique peut également causer de l’inflammation dans le cerveau. Il existe maintenant des traitements efficaces contre l’hépatite B qui rendent possible l’inhibition à long terme du virus. Il existe aussi des traitements hautement efficaces pour l’hépatite C qui guérissent plus de 95 pour cent des personnes qui les prennent. Il est donc possible de traiter efficacement l’hépatite C et de l’éliminer probablement comme source d’inflammation. Si vous avez l’hépatite B ou C, veuillez parler à votre prestataire de soins de santé de vos options de traitement.

Comme les maladies cardiovasculaires, le prédiabète, le diabète et l’insuffisance rénale chronique sont également susceptibles de causer de l’inflammation cérébrale, il faut traiter ces affections le plus efficacement possible.

Augmentez votre taux de vitamine B12

La vitamine B12 est importante pour maintenir une bonne fonction cérébrale. Une carence grave et prolongée en vitamine B12 peut causer des pertes de mémoire, la confusion, la paranoïa, la tristesse, la dépression, des tremblements, une démarche instable, des chutes et l’incapacité de communiquer correctement. Plusieurs de ces symptômes s’observent aussi chez les personnes atteintes de démence liée au VIH.

Durant le stade précoce de la carence en vitamine B12, il est presque toujours possible de résoudre complètement le problème. Les suppléments de vitamine B12 permettent souvent d’améliorer la fonction mentale des personnes vivant avec le VIH. La recherche a toutefois montré que certains des dommages causés par le manque de vitamine B12 devenaient irréversibles si le traitement de la carence ne commençait pas suffisamment tôt. Ainsi, si vous éprouvez des trous de mémoire inhabituels ou d’autres symptômes d’une fonction mentale en déclin, parlez à votre prestataire de soins de santé ou à un·e diététiste agréé·e des façons de vous assurer un apport suffisant en vitamine B12 et, si nécessaire, de commencer à prendre des suppléments de vitamine B12. (Pour en savoir plus sur la vitamine B12voir l’annexe B.)

Maintenir des taux sains d’hormones thyroïdiennes

Une thyroïde hypoactive (une affection appelée hypothyroïdie) peut causer une espèce de « brouillard cérébral » qui ressemble étroitement aux symptômes neurocognitifs signalés par de nombreuses personnes ayant le VIH. Il est donc important de vous faire tester pour déterminer si l’hypothyroïdie contribue à vos symptômes neurocognitifs. Si cela est indiqué, vous devriez faire vérifier régulièrement votre taux de TSH (thyréostimuline, indice indirect de la fonction thyroïdienne) et d’hormones thyroïdiennes (surtout les taux de T3 et de T4 libres). Si vos résultats révèlent que vos taux sont faibles, une hormonothérapie de remplacement pourrait aider à restaurer votre énergie et votre fonction mentales et à dissiper le sentiment de brouillard cérébral.

Prenez soin de votre bien-être émotionnel

Puisque les personnes atteintes de dépression ou d’anxiété peuvent éprouver de la fatigue mentale ou des perturbations de leur fonction mentale, il est parfois possible d’améliorer les symptômes neurocognitifs en traitant la dépression et l’anxiété. De plus, la dépression et l’anxiété chroniques sont associées à une augmentation de l’inflammation cérébrale, laquelle est considérée comme l’une des causes sous-jacentes des troubles neurocognitifs liés au VIH. La prise en charge de la dépression et d’autres problèmes de santé mentale peut donc aussi s’avérer utile pour réduire l’inflammation.

Un·e prestataire de soins de santé compréhensif·ve devrait être en mesure de travailler avec vous pour reconnaître le problème, en déterminer la cause et trouver les moyens d’y faire face. 

Notons que la dépression peut être causée par de faibles taux de testostérone chez les personnes vivant avec le VIH, surtout les hommes.

La carence en vitamine D, courante chez les personnes vivant avec le VIH, peut contribuer à la dépression, surtout en hiver. Les troubles affectifs saisonniers (TAS), qui touchent de nombreuses personnes pendant l’hiver, peuvent être le résultat d’une carence en vitamine D. Parlez à votre prestataire de soins de santé de la possibilité de faire mesurer votre taux de vitamine D et de la pertinence de prendre des suppléments pour le faire augmenter. Grâce à une supplémentation appropriée, il est habituellement possible d’atténuer les problèmes associés à une carence en vitamine D. (Pour en savoir plus sur la vitamine D, voir l’annexe B.)

Adoptez un style de vie sain

Un style de vie sain peut contribuer à protéger le cerveau de nombreuses façons :

  • Avoir un régime alimentaire nutritif fournit les nutriments nécessaires à une santé cérébrale optimale. La liste inclut les vitamines B, les acides gras oméga-3, le zinc et d’autres minéraux.
  • Faire de l’exercice régulièrement aide à maintenir le bon fonctionnement cérébral en augmentant le flux d’oxygène vers le cerveau et en protégeant la santé des neurones.
  • Maintenir un poids santé et ne pas fumer peuvent aider à minimiser le risque de maladies vasculaires.
  • Limiter sa consommation d’alcool peut aider à minimiser ou à prévenir les problèmes neurocognitifs.
  • Stimuler son cerveau  en apprenant une nouvelle langue ou un instrument de musique, en faisant des casse-tête ou des jeux de mémoire — peut aider à protéger sa matière grise.

Rester en contact avec la société peut aussi aider! Prendre le temps de faire des activités avec vos ami·e·s, faire du bénévolat pour un organisme sans but lucratif ou une campagne politique, se joindre à un groupe d’entraînement physique ou de randonnée pédestre ou se renseigner sur les groupes de soutien organisés par votre organisme local de lutte contre le VIH ou de santé communautaire. Les interactions avec les autres peuvent contribuer au maintien d’une bonne santé mentale.