La bithérapie : son impact sur le réservoir de VIH

Comme nous l’avons expliqué plus tôt dans ce numéro de TraitementActualités, des essais cliniques sur des régimes de bithérapie fondés sur le puissant inhibiteur de l’intégrase dolutégravir sont en cours. Une telle combinaison, Juluca (dolutégravir + rilpivirine), a déjà été approuvée au Canada et dans d’autres pays à revenu élevé. Conçu dans un objectif de simplification, Juluca est destiné à remplacer le régime plus complexe de certains patients dont la charge virale est inférieure à 50 copies/ml depuis quelque temps déjà. Une autre combinaison, dolutégravir + 3TC, devrait être approuvée en 2019 au Canada et dans d’autres pays à revenu élevé.

À propos du réservoir

Après que l’infection par le VIH s’est produite, le virus s’installe dans les cellules du système immunitaire, soit les cellules T et un groupe de cellules appelées monocytes dont l’espérance de vie est relativement longue (une fois leur maturité atteinte, on appelle ces cellules des macrophages). Les monocytes/macrophages se déplacent partout dans le corps et passent du temps dans les systèmes organiques majeurs. Par conséquent, des cellules infectées par le VIH se trouvent dans de nombreuses parties du corps, y compris les suivantes :

  • cerveau et moelle épinière
  • système immunitaire : ganglions lymphatiques et tissus lymphoïdes, ainsi que des organes comme la rate, la moelle osseuse et le thymus
  • poumons
  • reins
  • tissus adipeux

Même si les combinaisons de traitements anti-VIH puissants (TAR) suppriment énormément la production de VIH dans le sang, certaines études donnent à penser que de faibles quantités de VIH continuent d’être produites dans les ganglions lymphatiques.

Les chercheurs utilisent le terme réservoir pour décrire le fardeau des cellules infectées par le VIH et présentes dans le corps. Des études sont en cours dans l’espoir de réduire et possiblement d’éliminer ce fardeau.

Une question importante à propos de la bithérapie se rapporte à son impact éventuel sur le réservoir de VIH.

Étude à Vérone

Des chercheurs de l’Université de Vérone en Italie ont mené une étude pilote pour évaluer l’impact du traitement d’induction-entretien. Tous les participants qui n’avaient jamais pris de TAR ont reçu initialement une thérapie standard, en l’occurrence Triumeq (dolutégravir + 3TC + abacavir). Une fois la suppression de la charge virale atteinte et maintenue pendant 12 mois consécutifs, on leur a donné le régime simplifié associant le dolutégravir et 3TC.

Chez les 14 participants qui ont été en mesure de prendre la bithérapie pour une période de un à huit mois, les chercheurs n’ont trouvé aucune différence significative entre le fardeau de cellules infectées dans les échantillons de sang, comparativement au nombre de ces cellules après 12 mois de trithérapie.

Ainsi, les données de cette étude pilote portent fortement à croire que le traitement d’induction-entretien ne fait pas augmenter le volume du réservoir de VIH, du moins à court terme. Des études de plus longue durée et de plus grande envergure devraient être menées pour confirmer ce résultat.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Lanzafame M, Nicole S, Rizzardo S, et al. Immunovirological outcome and HIV-1 DNA decay in a small cohort of HIV-1-infected patients deintensificated from abacavir/lamivudine/dolutegravir to lamivudine plus dolutegravir. New Microbiologica. 2018; in press.
  2. Damouche A, Pourcher G, Pourcher V, et al. High proportion of PD-1-expressing CD4+ T cells in adipose tissue constitutes an immunomodulatory microenvironment that may support HIV persistence. European Journal of Immunology. 2017 Dec;47(12):2113-2123.
  3. Al-Harti L, Joseph J, Nath A. Astrocytes as an HIV CNS reservoir: highlights and reflections of an NIMH-sponsored symposium. Journal of Neurovirology. 2018; in press.
  4. Cenker JJ, Stultz RD, McDonald D. Brain microglial cells are highly susceptible to HIV-1 infection and spread. AIDS Research and Human Retroviruses. 2017 Nov;33(11):1155-1165.
  5. Lamers SL, Rose R, Maidji E, et al. HIV DNA is frequently present within pathologic tissues evaluated at autopsy from combined antiretroviral therapy-treated patients with undetectable viral loads. Journal of Virology. 2016 Sep 29;90(20):8968-83.
  6. Rose R, Lamers SL, Nolan DJ, et al. HIV maintains an evolving and dispersed population in multiple tissues during suppressive combined antiretroviral therapy in individuals with cancer. Journal of Virology. 2016 Sep 29;90(20):8984-93.
  7. Nolan DJ, Rose R, Rodriguez PH, et al. The spleen is an HIV-1 sanctuary during combined antiretroviral therapy. AIDS Research and Human Retroviruses. 2018 Jan;34(1):123-125.
  8. Clayton KL, Collins DR, Lengieza J, et al. Resistance of HIV-infected macrophages to CD8+ T lymphocyte-mediated killing drives activation of the immune system. Nature Immunology. 2018 May;19(5):475-486.
  9. Castellano P, Prevedel L, Eugenin EA. HIV-infected macrophages and microglia that survive acute infection become viral reservoirs by a mechanism involving Bim. Scientific Reports. 2017 Oct 9;7(1):12866.
  10. Bandera A, Ferrario G, Saresella M, et al. CD4+ T cell depletion, immune activation and increased production of regulatory T cells in the thymus of HIV-infected individuals. PLoS One. 2010 May 24;5(5):e10788.
  11. Costiniuk CT, Salahuddin S, Farnos O, et al. HIV persistence in mucosal CD4+ T cells within the lungs of adults receiving long-term suppressive antiretroviral therapy. AIDS. 2018 Oct 23;32(16):2279-2289.
  12. Blasi M, Balakumaran B, Chen P, et al. Renal epithelial cells produce and spread HIV-1 via T-cell contact. AIDS. 2014 Oct 23;28(16):2345-53.
  13. Noto A, Procopio FA, Banga R, et al. CD32+ and PD-1+ lymph node CD4 T cells support persistent HIV-1 transcription in treated aviremic individuals. Journal of Virology. 2018 Sep 26;92(20).
  14. Huot N, Bosinger SE, Paiardini M, et al. Lymph node cellular and viral dynamics in natural hosts and impact for HIV cure strategies. Frontiers in Immunology. 2018 Apr 19;9:780.
  15. Dahl V, Peterson J, Fuchs D, et al. Low levels of HIV-1 RNA detected in the cerebrospinal fluid after up to 10 years of suppressive therapy are associated with local immune activation. AIDS. 2014 Sep 24;28(15):2251-8.
  16. Reeves DB, Duke ER, Wagner TA, et al. A majority of HIV persistence during antiretroviral therapy is due to infected cell proliferation. Nature Communications. 2018 Nov 16;9(1):4811