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  • Des scientifiques ont évalué des données se rapportant à 12 722 personnes pour savoir si elles avaient été exposées à une hépatite virale
  • Les personnes qui avaient eu l’hépatite B ou C étaient plus susceptibles d’utiliser des antipsychotiques
  • Cette corrélation n’indique pas de lien causal, mais pourrait aider à mieux cibler les services de dépistage de l’hépatite

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) encourage les régions et pays du monde à éliminer l’hépatite virale, principalement celle causée par le virus de l’hépatite B (VHB) ou C (VHC), comme menace pour la santé publique d’ici 2030. Pour atteindre cet objectif, il faudra multiplier les possibilités de dépistage, notamment pour les personnes très à risque à l’égard de ces infections. Dans de nombreux cas, le traitement de l’hépatite B réussit à maîtriser l’infection et à réduire le risque de lésions hépatiques graves. Le traitement de l’hépatite C peut, quant à lui, guérir l’infection dans 95 % des cas.

Une équipe de recherche de l’École de santé publique Dalla Lana de l’Université de Toronto a analysé des données de santé se rapportant spécifiquement à l’hépatite virale qui avaient été recueillies aux États-Unis. L’équipe a examiné des données portant sur plus de 12 000 personnes qui constituaient un échantillon représentatif de la population américaine (excluant les personnes incarcérées). L’équipe a constaté que les personnes chez qui on avait décelé des anticorps contre le VHB ou le VHC étaient plusieurs plus fois plus susceptibles de s’être fait prescrire récemment (dans les 30 jours précédents) au moins un médicament antipsychotique, comparativement aux personnes non porteuses de ces mêmes anticorps.

Malgré ce constat, il ne faut pas supposer que bon nombre, voire la majorité, des personnes atteintes d’hépatite virale sont atteintes de psychose ou qu’elles utilisent des antipsychotiques. Une explication suivra plus loin.

À noter

L’équipe de recherche a analysé des données se rapportant à 12 722 personnes, dont seulement 1,1 % s’étaient fait prescrire récemment un antipsychotique. Même si la proportion de personnes utilisant ce genre de médicaments était très faible, leur risque global d’hépatite virale était plus élevé que chez les personnes qui n’en prenaient pas.

Il arrive parfois aux médecins de prescrire des antipsychotiques pour des problèmes médicaux autres que la psychose. Rappelons à cet égard que, lorsqu’un médicament est approuvé pour le traitement d’une maladie particulière par les autorités réglementaires, les médecins ont le droit de le prescrire pour d’autres problèmes s’ils ou elles estiment qu’il sera bénéfique. Dans certains de ces cas, on a recours à une dose plus faible que celle utilisée contre la maladie initialement indiquée, c’est-à-dire la psychose dans le cas qui nous concerne. La liste de troubles et de symptômes pour lesquels les antipsychotiques sont prescrits inclut les suivants :

  • trouble bipolaire
  • trouble de la personnalité limite
  • démence
  • nausées et vomissements causés par la chimiothérapie
  • psychose causée par l’usage de drogues
  • schizophrénie
  • problèmes de sommeil

Comme on peut le constater, toutes les personnes se faisant prescrire des antipsychotiques ne sont pas forcément atteintes de psychose.

Liens avec l’hépatite virale

L’équipe de recherche a constaté que les personnes utilisant des antipsychotiques étaient plus susceptibles de présenter les caractéristiques suivantes :

  • naissance aux États-Unis
  • faible revenu
  • transfusion sanguine dans le passé
  • usage de drogues injectables

Âge

L’équipe de recherche s’est concentrée sur les personnes âgées de 20 à 59 ans parce qu’elle disposait de données complètes à leur sujet. L’équipe a affirmé que le lien entre l’hépatite virale et l’usage de médicaments antipsychotiques « était le plus prononcé chez les personnes de plus de 40 ans ».

Facteurs de risque

Après avoir pris en considération de nombreux facteurs, dont les antécédents de transfusions sanguines, la consommation d’alcool, l’usage de drogues injectables, les comportements sexuels et le statut socioéconomique, l’équipe de recherche a constaté qu’une maladie mentale importante ne pouvait être à elle seule un facteur de risque d’hépatite virale. De plus, selon cette même analyse, l’usage d’antipsychotiques n’était pas en soi un facteur de risque d’hépatite virale, la transmission virale étant plutôt associée à certains facteurs de risque précis.

Accent sur le VHC

Comme nous l’avons mentionné plus tôt, les personnes qui suivent un traitement contre le VHC connaissent des taux de guérison élevés. Or, pour éradiquer le VHC comme menace pour la santé publique, il faudra multiplier les possibilités de dépistage. À la lumière de ses résultats, l’équipe de recherche de l’Université de Toronto a laissé entendre que les professionnel·le·s de la santé feraient bien de vérifier les dossiers médicaux de leurs patient·e·s pour déterminer si des antipsychotiques ont été prescrits dans le passé. Cela pourrait ouvrir la voie à une discussion sur le dépistage du VHC.

L’équipe de recherche a également affirmé que des mesures visant la prévention des infections à diffusion hématogène (hépatite virale, VIH, etc.) devraient être intégrées dans « les soins de santé mentale destinés aux personnes atteintes d’une maladie mentale importante et à celles se faisant prescrire des médicaments antipsychotiques ».

Notes techniques

L’équipe de recherche a analysé des données anonymes recueillies dans le cadre d’une étude appelée NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey). Les données analysées avaient été recueillies entre 2005 et 2014. Selon l’équipe, « le questionnaire NHANES inclut la collecte de données autodéclarées d’ordre démographique, socioéconomique et sanitaire, ainsi que des variables médicales, psychologiques et de laboratoire ». L’équipe souligne également que « les réponses au questionnaire NHANES se rapportant aux facteurs sociodémographiques, à l’usage d’alcool et de drogues et aux comportements sexuels sont [données par les répondant·e·s], et certaines erreurs de classification sont probables ».

Pour en savoir plus l’étude NHANES, cliquez ici (en anglais seulement).

—Sean R. Hosein

Ressources

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Élimination de l’hépatite d’ici 2030Organisation mondiale de la Santé

Fondation canadienne du foie

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