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Colombie-Britannique
Does HIV Look Like Me? International Society
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Introduction

« Nous nous soucions de bien plus que de votre santé bucco-dentaire. »

Dans les années 80, les dentistes étaient souvent les premiers à conseiller à leurs patients de consulter leur médecin pour passer un test de dépistage du VIH ou du sida, en s’appuyant sur les manifestations buccales de la maladie, comme la candidose buccale (muguet) et le sarcome de Kaposi. Aujourd’hui, trois dentistes de Vancouver, en collaboration avec leur personnel, revitalisent le rôle des dentistes dans le domaine des soins du VIH en offrant à leurs patients des tests de dépistage du VIH aux points de service (dépistage rapide). Dans le cadre du projet « Seek and Treat for Optimal Prevention of HIV/AIDS » (STOP), le projet STOP de Vancouver s’est associé avec Does HIV Look Like Me? International pour former et appuyer le personnel de trois cliniques dentaires pour offrir des tests systématiques de dépistage du VIH à leurs patients.

Les dentistes et le personnel des cliniques se servent de tests de dépistage rapide aux points de service pour détecter des anticorps du VIH chez leurs patients. Les résultats négatifs sont jugés concluants, mais on informe tout de même ces patients de la période fenêtre pour l’infection au VIH et on les encourage à passer un autre test de dépistage dans trois mois s’ils continuent d’être à risque. Les patients obtenant un résultat positif préliminaire sont aiguillés vers l’équipe d’intervention de proximité de STOP – une équipe clinique interdisciplinaire chargée d’améliorer l’implication et l’arrimage pour les personnes faisant face aux obstacles les plus complexes en matière de soins – et vers des cliniques médicales avoisinantes pour obtenir un soutien immédiat.

Dans le but de promouvoir cette initiative auprès des patients, Does HIV Look Like Me? International a élaboré une campagne ayant comme slogan : [traduction]  Nous nous soucions de bien plus que de votre santé bucco-dentaire. Des affiches et des dépliants dans les salles d’attente et les salles de traitement encouragent les patients à se renseigner au sujet du dépistage et à mettre à jour leurs connaissances sur le VIH. À la clinique Mid-Main, tout le personnel a demandé à passer un test de dépistage du VIH. Le Dr Mario Brondani, l’un des dentistes de cette clinique, mentionne que « cela a peut-être contribué à sensibiliser les patients au dépistage et à démystifier ce dernier ».

Les patients se sont montrés très majoritairement favorables à l’initiative. « Les gens l’ont bien accueillie et en étaient assez satisfaits, » a précisé le Dr Sean Sikorski, le dentiste de la clinique dentaire de la PHS Community Services Society. « Ils étaient surpris mais plutôt heureux, car  beaucoup de gens n’ont pas de médecin de famille ou ne sont pas à l’aise à l’idée de s’engager dans cette infrastructure ».

Selon Brandy Svendson, directrice générale de Does HIV Look Like Me? International, l’instauration du dépistage du VIH conviendrait peut-être le mieux aux dentistes qui desservent une importante clientèle provenant de communautés ayant un taux de prévalence élevé du VIH, comme la communauté gaie.

En quoi consiste le programme?

Grâce à un financement du projet STOP, Does HIV Look Like Me? International1 a élaboré le programme et fourni une formation et un soutien à trois cliniques dentaires à prix abordables et à de nombreux résidents de la faculté de dentisterie de l’Université de la Colombie-Britannique afin de leur permettre d’offrir à tous leurs patients des tests systématiques de dépistage rapide du VIH aux points de service. Les cliniques dentaires pilotes choisies desservaient l’ensemble de la population et des communautés à risque pour le VIH, y compris les nouveaux arrivants provenant de pays où le VIH est endémique, les personnes connaissant des épisodes d’itinérance et celles qui ont des problèmes de santé mentale et de dépendance.

Les objectifs du projet pilote sont  d’appuyer et de former le personnel des cliniques dentaires pour offrir et administrer des tests de dépistage rapide du VIH aux points de service dans leurs établissements; d’élargir l’accès au dépistage du VIH; d’accroître le nombre de diagnostics reçus en temps opportun; et d’améliorer l’implication dans les soins et de réduire la stigmatisation face au VIH chez les professionnels des soins dentaires.

Avec l’appui du projet STOP de Vancouver, Does HIV Look Like Me? International a formé des dentistes, des assistantes dentaires agréées et des hygiénistes pour offrir et effectuer des tests de dépistage aux points de service. Le projet, qui était considéré comme un projet pilote de faisabilité pour déterminer si des tests de dépistage pouvaient être offerts dans les cliniques dentaires, a été mis en œuvre sur une période de huit mois en 2011. Bien que le projet pilote ait pris fin, les trois sites continuent d’offrir, dans le cadre de leurs soins réguliers, des tests de dépistage du VIH à leurs patients.

Les personnes qui reçoivent un résultat préliminaire positif peuvent obtenir des tests de confirmation dans des cliniques médicales voisines ou auprès de l’équipe d’intervention de proximité de STOP – une équipe clinique interdisciplinaire chargée d’améliorer l’implication et l’arrimage pour les personnes faisant face aux obstacles les plus complexes en matière de soins. Des partenariats entre des cliniques médicales situées à proximité de chaque site de dépistage permettent aux personnes nouvellement diagnostiquées d’obtenir, si elles le désirent, du counseling, du soutien et l’arrimage à des soins, et ce, immédiatement après le test.

  1. Does HIV Look Like Me? International est un organisme sans but lucratif qui œuvre à l’échelle locale et mondiale pour réduire la stigmatisation associée au VIH et au sida. Il sensibilise le public en élaborant des campagnes publicitaires médiatiques et imprimées innovantes et en offrant des occasions de projets, de formation et de leadership aux personnes séropositives et à celles qui sont touchées par le VIH.

Raison d'être du programme

Le nombre élevé de personnes séropositives qui ignorent leur état reflète le besoin d’avoir des possibilités de dépistage accrues et dans de nouveaux milieux. Les personnes qui n’ont pas de médecin de famille ni d’infirmière qu’elles voient régulièrement passent entre les mailles du système de santé traditionnel, mais ces personnes consultent régulièrement un dentiste. Les données probantes d’un projet pilote sur le dépistage du VIH dans une clinique dentaire de la ville de New York le confirment : sur une période de 22 mois, la clinique a diagnostiqué 19 cas de séropositivité; neuf de ces personnes s’étaient présentées à un service d’urgence ou avaient visité leur médecin de famille ou une clinique dentaire au cours de la dernière année, mais on ne leur avait pas offert de test de dépistage du VIH.1

Les soins de santé traditionnels ne tiennent également pas compte du fait que certaines personnes évitent peut-être volontairement le système médical dans son ensemble en raison de défis psychosociaux complexes, mais qu’une rage de dents pourrait pousser ces mêmes personnes à recourir aux services d’un dentiste. Pour ces personnes, les soins dentaires constituent un point de contact essentiel avec le système de santé.

En outre, les dentistes font partie intégrante des soins primaires liés au VIH depuis les tout débuts de l’épidémie, lorsque jusqu’à 80 pour cent des patients séropositifs présentaient des manifestations buccales (p. ex., candidose buccale (muguet) et sarcome de Kaposi) liées à la progression de la maladie. Les dentistes sont souvent parmi les premiers professionnels de la santé à reconnaître les symptômes associés au VIH et à aiguiller les patients vers d’autres fournisseurs de soins de santé pour obtenir un diagnostic. Dans ce modèle, les dentistes ne peuvent cependant pas être certains que les patients ont effectivement subi un test de dépistage.

L’émergence et la facilité d’utilisation des technologies de dépistage rapide du VIH permettent de connaître son statut sérologique en quelques minutes, ce qui est tout à fait dans les limites d’une visite dentaire ordinaire. Les gens sont au moins deux fois plus susceptibles d’obtenir leurs résultats lorsqu’on utilise des technologies de dépistage rapide du VIH. Cela étant, VCH et Does HIV Look Like Me? International ont forgé des partenariats avec des cliniques dentaires locales et la faculté de dentisterie de l’Université de la Colombie-Britannique pour explorer la faisabilité du dépistage du VIH dans le cadre de la profession dentaire à Vancouver.

  1. Blackstock, O.J. et coll., « Evaluation of a Rapid HIV Testing Initiative in an Urban Hospital-based Dental Clinic », AIDS Patient Care and STDS, 2010; vol. 24, n˚ 12, p. 782.

Mise en œuvre du programme

Confirmer que le dépistage du VIH s’inscrit dans le champ d’exercice de la profession dentaire

L’organisme Does HIV Look Like Me? International, le projet STOP de Vancouver, le  College of Dental Surgeons of British Columbia, le College of Dental Hygienists of British Columbia et la British Columbia Dental Association se sont réunis pour déterminer si le fait d’offrir des tests de dépistage du VIH dans les cliniques dentaires cadrait avec le champ d’exercice de la profession. 

Le soutien de ces organismes était essentiel pour obtenir l’assentiment et l’approbation des dentistes, des assistantes dentaires agréées (régies par le College of Dental Surgeons) et des hygiénistes pour leur champ d’exercice. C’est le médecin-conseil en santé publique de Vancouver qui a fait valoir le besoin d’offrir des tests systématiques de dépistage du VIH à plus grande échelle. Le registraire du College of Dental Surgeons of British Columbia, déjà en faveur d’un rôle élargi pour les dentistes dans les soins de santé, a grandement aidé à obtenir l’appui de ces deux organismes.

Dans le but de sensibiliser la communauté dentaire au dépistage du VIH et à ce projet pilote et de recueillir leurs commentaires et suggestions sur la conception du projet, le registraire du College of Dental Surgeons a animé une table ronde avec les dentistes intéressés. Des dentistes du secteur privé et de la santé publique ont été invités à déterminer la faisabilité d’instaurer des tests de dépistage du VIH dans différents milieux.

Bien que des dentistes du secteur privé étaient présents lors des discussions préliminaires, il a été établi que les pratiques privées ne constituaient pas le contexte idéal pour ce projet pilote. En définitive, les dentistes du secteur privé ne pouvaient pas exiger des frais pour le dépistage du VIH, ce qui nuisait au déroulement du travail et à la rentabilité de ces entreprises privées ayant des délais très serrés pour le roulement des patients. À l’une des cliniques, l’absence d’un espace confidentiel où on pouvait offrir le test était également citée comme un obstacle à la mise en œuvre.

Pré-évaluation de la clinique

Toutes les cliniques intéressées devaient démontrer que la confidentialité de chaque patient pourrait être maintenue au cours du processus de dépistage du VIH. De ce fait, un endroit privé dans la clinique devait pouvoir être mis à la disposition du patient si celui-ci en faisait la demande.

Les cliniques dentaires

Clinique dentaire communautaire Mid-Main

La clinique Mid-Main est située au-dessus du Centre de santé communautaire Mid-Main, permettant ainsi aux patients qui obtiennent des résultats préliminaires positifs d’avoir immédiatement accès à des soins médicaux s’ils le désirent. Contrairement aux autres cliniques du projet pilote, Mid-Main ne se trouve pas dans le quartier Eastside du centre-ville et, bien que ses services soient de faible coût,  elle dessert l’ensemble de la population. À la clinique Mid-Main, le dépistage du VIH était offert par un dentiste et une assistante dentaire agréée à tous les patients, un jour par semaine, lorsque ce dentiste travaillait à la clinique.

Clinique dentaire communautaire First United

La clinique dentaire communautaire First United est une clinique polyvalente ouverte une fois par semaine et qui est dirigée par le Programme de résidence en pratique générale de la faculté de dentisterie de l’Université de la Colombie-Britannique. La plupart des patients de la clinique ne consultent pas un dentiste de façon régulière, ont souvent besoin de traitements dentaires d’urgence et présentent souvent des problèmes de santé mentale et de dépendance. Le dépistage a été offert par un dentiste et une assistante dentaire agréée à tous les patients qui avaient recours aux services de la clinique. Cette dernière était ouverte une journée par semaine.

Clinique dentaire communautaire de la PHS Community Services Society

La PHS Community Services Society offre des soins dentaires aux résidents du quartier Eastside du centre-ville. Tout comme First United, la plupart des patients de la clinique ne consultent pas un dentiste de façon régulière, ont souvent besoin de traitements dentaires d’urgence et présentent souvent des problèmes de santé mentale et de dépendance. Le dépistage a été offert par les dentistes, les assistantes dentaires agréées et l’hygiéniste. 

Formation sur les compétences et développement des ressources

Formation sur les compétences

La formation du personnel se devait d’être souple afin de s’adapter aux horaires du personnel des cliniques. Selon la clinique, la formation de trois heures était offerte soit en une série de séances durant l’heure du dîner, soit en une séance d’une demi-journée. Tous les employés de la clinique étaient tenus de suivre cette formation, même ceux qui n’auraient pas à offrir le test, et ce, afin de s’assurer que tout le personnel possédait les connaissances de base nécessaires pour répondre à des questions sur le VIH et le test de dépistage offert aux points de service.

Les ateliers étaient animés par Does HIV Look Like Me? International et des infirmières enseignantes spécialisées en VIH du projet STOP de Vancouver. Ils abordaient les notions essentielles sur le VIH, notamment la transmission, la prévention, les soins, le traitement et les manifestations buccales les plus courantes du VIH/sida. La formation portait également sur le rôle que les dentistes ont traditionnellement joué dans les soins liés au VIH/sida et le rôle élargi qu’ils commencent à jouer dans l’ensemble des soins de santé préventifs. Les dentistes ont ainsi pu mieux situer comment le dépistage du VIH s’inscrivait dans leur mandat professionnel.

Une formation pratique sur l’utilisation de la trousse de dépistage rapide a été offerte et tous les employés appelés à offrir le test devaient réussir un examen d’évaluation des compétences démontrant qu’ils pouvait offrir, effectuer et interpréter correctement un test offert aux points de service. Cet examen d’évaluation était administré par une infirmière enseignante d’expérience, spécialisée en VIH du projet STOP de Vancouver. Le contenu de la formation a été adapté à partir des Lignes directrices du Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique sur les tests de dépistage du VIH offerts aux points de service et incluait les recommandations du comité consultatif sur les services dentaires, composé de représentants de Positive Living BC, du Centre d’excellence de la Colombie-Britannique, du Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique et de bioLytical, le fabricant des tests de dépistage rapide.

Développement des ressources

Outre la formation sur place, Does HIV Look Like Me? International a élaboré des ressources à l’intention des praticiens afin de faciliter le processus d’apprentissage. Sa publication Rapid HIV Testing for Dental Clinics (dépistage rapide du VIH pour les cliniques dentaires), par exemple, traite des notions fondamentales du dépistage aux points de service, du consentement éclairé et de la façon d’offrir le test et d’interpréter les résultats; elle comprend aussi un aide-mémoire (avec des diagrammes) indiquant tous les résultats possibles du dépistage et, enfin, un schéma illustrant toutes les étapes du processus d’administration d’un test de dépistage du VIH. Pour visualiser cette ressource, veuillez consulter la section Matériel du programme.

Does HIV Look Like Me? International a également conçu des affiches et des dépliants à l’intention des patients pour les sensibiliser au dépistage du VIH. Des ressources arborant le slogan : [traduction] Nous nous soucions de bien plus que de votre santé bucco-dentaire ont été affichées dans les cliniques pour encourager les patients à se renseigner sur le dépistage du VIH. Ce matériel est disponible dans la section Matériel du programme de la présente étude de cas.

Processus de dépistage du VIH

Offrir le test

Le test de dépistage est offert systématiquement par une assistante dentaire agréée, une hygiéniste ou un dentiste à tous les patients admissibles. Il n’est pas offert aux patients qui ont moins de 18 ans, qui visitent la clinique accompagnés d’une autre personne, qui savent déjà qu’ils sont séropositifs ou qui ne peuvent pas donner un consentement éclairé (les patients qui, de l’avis de la personne offrant le test, ont les facultés trop affaiblies ou présentent des signes de maladie mentale non traitée). Dans le cas des personnes vivant avec le VIH, le personnel de la clinique dentaire est formé pour faciliter leur arrimage à l’équipe d’intervention de proximité de STOP si elles ne reçoivent pas déjà des soins primaires pour leur séropositivité.

Selon l’endroit, le patient et le type de rendez-vous, le test de dépistage est offert avant, pendant ou après le rendez-vous. On encourage les cliniciens – lorsqu’ils discutent de dépistage du VIH avec leurs patients – à souligner le fait qu’ils offrent ce test à tous les patients de façon systématique, et à leur rappeler que le seul moyen de connaître son état de séropositivité est de passer un test de dépistage.

Au moment d’offrir le test de dépistage et d’obtenir le consentement éclairé des patients, le personnel de la clinique informe ces derniers que si le résultat préliminaire s’avère positif, une infirmière de la santé publique de l’équipe d’intervention de proximité de STOP communiquera avec eux pour un suivi. Le test de dépistage ne sera pas administré aux patients qui acceptent de le passer mais qui ne veulent pas qu’une infirmière de la santé publique communique avec eux. Ce protocole a été établi afin de s’assurer qu’aucun patient n’obtiendrait un résultat positif sans faire l’objet d’un suivi rigoureux en ce qui a trait aux tests de confirmation et aux soins.

Le matériel promotionnel sur le dépistage du VIH est placé dans les toilettes, la salle d’attente et les salles de traitement et a entraîné une augmentation du nombre de patients qui demandent à passer le test avant même que le dentiste ne le leur offre.

Administrer le test

Le test est administré à la fin du rendez-vous à l’aide d’une trousse de dépistage aux points de service et conformément aux lignes directrices provinciales et à un protocole particulier au site, conçu par Does HIV Look Like Me? International et l’équipe d’intervention de proximité de STOP. Ce protocole décrit les mesures que doivent prendre les professionnels des soins dentaires lorsque le résultat préliminaire s’avère positif.

Communiquer les résultats et procéder à l’aiguillage

Les résultats négatifs sont immédiatement communiqués aux patients. Le personnel chargé d’administrer les tests répond aux questions des patients et les informe de la période fenêtre de l’infection au VIH afin de s’assurer que les patients à risque ou qui ont été dans une situation à risque savent qu’ils devraient passer un autre test dans trois mois afin de confirmer le résultat négatif.

Les trois cliniques dentaires qui ont participé à ce projet pilote ont fait passer des tests de dépistage à 60 personnes et n’ont obtenu aucun résultat positif. Un protocole est toutefois en place pour appuyer le patient en cas d’obtention d’un résultat positif.

Un résultat préliminaire positif au point de service est interprété comme signalant la présence d’anticorps du VIH dans le sang de la personne testée. Les dentistes présentent ce résultat au patient comme étant un résultat préliminaire positif.  Des tests de confirmation (tests sanguins) sont nécessaires pour confirmer l’infection au VIH puisque des résultats faussement positifs, même s’ils sont rares, peuvent se produire.

Étant donné qu’il n’offre pas de tests de confirmation, le personnel des cliniques dentaires ne dira pas aux patients ayant obtenu un résultat préliminaire positif au test de dépistage rapide qu’il y a de fortes chances qu’ils soient séropositifs. Si on le leur demande, les personnes qui effectuent le test sont formées pour répondre honnêtement et dire qu’il est possible qu’un test de confirmation s’avère positif.

De par leur formation, les dentistes ont l’obligation professionnelle d’informer leurs patients des symptômes (lésions, candidose buccale) qu’ils observent et qui pourraient être des signes de cancer, de VIH/sida ou d’autres maladies et de les encourager à consulter un médecin. Offrir des tests de dépistage du VIH, sans poser de diagnostic, semble cadrer avec les responsabilités professionnelles des dentistes et les résultats préliminaires positifs sont communiqués comme étant une indication de la présence possible d’une infection au VIH. Cette pratique est semblable à la façon dont les résultats des tests de dépistage du cancer de la bouche sont communiqués par les dentistes en Colombie-Britannique.

Les ordres professionnels et les cliniciens dentaires étaient d’abord réticents à l’idée d’assumer la responsabilité de poser un diagnostic de séropositivité fondé sur le test offert aux points de service. Ils n’ont pas reçu de formation à cette fin et même s’ils peuvent demander des tests sanguins de confirmation pour leurs patients, ils préféraient déléguer cette responsabilité à l’équipe d’intervention de proximité de STOP. Afin de renforcer l’arrimage au traitement, aux soins et au soutien, Does HIV Look Like Me? International a rencontré le personnel des cliniques médicales situées à proximité de chaque clinique dentaire pour s’assurer que quiconque obtient un résultat préliminaire positif peut immédiatement consulter un fournisseur de soins de santé pour passer un test sanguin de confirmation.

Conformément au protocole, une fois qu’on a communiqué avec l’équipe d’intervention de proximité de STOP pour un suivi et qu’elle a soumis son rapport à la division du contrôle des maladies transmissibles de Vancouver Coastal Health, la clinique dentaire a rempli son rôle dans le cadre du processus de dépistage. Selon les relations qu’ils entretiennent avec leurs patients, les cliniciens ont le choix d’effectuer un suivi auprès d’eux et de leur offrir leur appui.  

Prochaines étapes

La question à savoir si le dépistage du VIH devrait être offert à plus grande échelle dans les cliniques dentaires de Vancouver demeure entière, et ce, pour plusieurs raisons : on n’a pas effectué suffisamment de tests de dépistage pour déterminer le rapport coût-efficacité; on n’a pas élaboré de codes de facturation pour les régimes d’assurance privés et publics; plusieurs cliniques dentaires n’ont pas d’endroit privé pour effectuer les tests, et de nombreux dentistes restent réticents, pour différentes raisons, à offrir le dépistage du VIH dans le cadre des soins dentaires.

On s’inquiète aussi du fait que l’instauration de tests de dépistage couverts par l’assurance dans les cliniques dentaires puisse donner lieu à des tests inutiles et inappropriés. Étant donné que le dépistage du VIH à grande échelle aux points de service dans l’ensemble de la population augmente la probabilité de résultats faussement positifs,1 on peut préconiser que l’accès à ces tests soit limité aux cliniques dentaires qui desservent les populations et les communautés ayant un taux de prévalence plus élevé.

Par exemple, les cliniques dentaires desservant une importante population d’hommes gais sont peut-être un des milieux où il y aurait lieu d’instaurer des tests de dépistage du VIH. Ce sont les hommes gais qui affichent les taux d’incidence et de prévalence les plus élevés en ce qui a trait à la transmission du VIH au Canada. Les cliniques dentaires qui desservent la communauté gaie offriraient à ces hommes un endroit de plus où se faire tester.

  1. Gilbert M, et coll., « Recommended use of point-of-care HIV tests », BCMJ, 2007 ; vol. 49, n˚ 4, p. 77. Disponible à l’adresse : http://www.bcmj.org/bc-centre-disease-control/recommended-use-point-care-hiv-tests.

Ressources requises

Ressources humaines

  • Dentistes, assistantes dentaires agréées et hygiénistes dentaires autorisés à offrir et à effectuer des tests de dépistage aux points de service et ayant reçu une formation à cette fin. Tous les autres membres du personnel des cliniques, même ceux qui n’offrent pas le test, devraient suivre la formation afin de développer leurs compétences et leurs connaissances concernant le VIH.
  • Infirmières de la santé publique, infirmières enseignantes, cliniciens spécialisés en VIH et partenaires communautaires disponibles pour offrir la formation, effectuer des aiguillages et organiser le déroulement des activités en clinique.
  • Un comité consultatif solide composé d’intervenants communautaires et provinciaux.
  • Le soutien des ordres professionnels qui régissent le travail des dentistes, des assistantes dentaires agréées et des hygiénistes du secteur de compétence concerné.

Ressources matérielles

  • Des lignes directrices et un programme clairs quant à l’utilisation des tests aux points de service.
  • Des trousses de dépistage rapide aux points de service.
  • Des registres pour consigner le nombre de trousses reçues et utilisées, le nombre de tests effectués et le nombre de nouveaux résultats positifs signalés aux autorités sanitaires locales.

Défis

  1. Éducation. Les dentistes et le personnel des cliniques ont des connaissances limitées et souvent désuètes sur le VIH. Leur formation professionnelle sur le sujet se borne à leur montrer comment se protéger contre le VIH et les autres infections transmissibles par le sang, au lieu d’offrir un point de vue holistique sur ce que cela signifie de vivre avec le VIH. Dans certains cas, cela a donné lieu à des idées fausses profondément ancrées au sujet du virus et à une importante stigmatisation des personnes vivant avec le VIH de la part des professionnels des soins dentaires.
  2. Codes de facturation. Le barème des honoraires pour soins dentaires de la province ne contient aucun code pour le dépistage du VIH, donc les dentistes offrent les tests de dépistage rapide gratuitement. À l’heure actuelle, les compagnies d’assurance privées ne fournissent pas de remboursement pour les tests de dépistage du VIH en clinique dentaire. 
  3. Déroulement du travail et temps. Les cliniques communautaires maintiennent des horaires de rendez-vous très serrés afin de répondre à la demande pour leurs services. Trouver du temps pour effectuer le test et donner les résultats (environ dix minutes) en ne surchargeant pas un personnel déjà très occupé posait un défi considérable. Sachant que le service est disponible, de plus en plus de patients le demandent, ce qui crée des contraintes de temps supplémentaires.
  4. Technologie des tests de dépistage. Bien que les trousses de dépistage du VIH aux points de service soient faciles à utiliser, des trousses de dépistage par prélèvement sur écouvillon sont disponibles dans d’autres pays et pourraient mieux convenir aux dentistes et à leurs patients. Elles ne sont toutefois pas offertes actuellement au Canada. Les dentistes seraient plus à l’aise avec cette technologie qu’avec celle des piqûres au doigt puisqu’ils sont déjà habitués à manipuler des écouvillons buccaux. L’utilisation de cette technologie pourrait réduire la réticence des dentistes à effectuer des tests de dépistage du VIH.

Évaluation du programme

Dans le cadre de l’initiative STOP HIV/AIDS, les cliniques sont tenues de préparer des rapports mensuels indiquant le nombre de tests effectués et le nombre de résultats positifs obtenus.

De plus, une étude a été menée auprès des patients des cliniques dentaires Mid-Main et First United pour :

  • évaluer la réaction des patients à l’intégration de tests de dépistage rapide du VIH aux examens dentaires courants;
  • examiner l’attitude des patients envers les dentistes effectuant le dépistage du VIH;
  • cerner les obstacles à l’instauration de tests de dépistage rapide du VIH dans les cliniques dentaires du point de vue des patients.

Entre les mois d’octobre 2011 et février 2012, des patients ont été recrutés pour remplir, à la sortie de leurs rendez-vous, un questionnaire d’enquête sur leur expérience avec le dépistage du VIH. Vingt-deux patients ont accepté de prendre part à cet exercice.

Malgré le nombre restreint de participants, l’étude a démontré que les patients qui se sentaient à l’aise à passer un test de dépistage en clinique dentaire préféreraient se faire tester dans le cadre de leurs soins réguliers. Parmi les patients qui ont refusé de passer le test, 78 pour cent étaient tout de même fortement d’accord ou d’accord que le dépistage du VIH faisait partie des responsabilités du dentiste. L’étude a également déterminé que le prélèvement de salive sur écouvillon, comme le test Orasure, par exemple, pourrait favoriser l’instauration des tests de dépistage dans les cliniques dentaires.

Répercussions

Bien qu’on n’ait pas administré suffisamment de tests dans le cadre du projet pour permettre d’évaluer l’efficacité de ce dernier, on a pu démontrer son importance d’autres façons. Il a notamment permis au projet STOP de Vancouver et à l’équipe d’intervention de proximité de STOP d’établir des liens plus solides avec les dentistes de Vancouver. À la suite des relations qui se sont forgées au cours de ce projet pilote, tous les étudiants en dernière année de dentisterie à l’Université de la Colombie-Britannique — la seule école de dentisterie de la province — participent maintenant à des ateliers sur le VIH, dirigés par l’équipe d’intervention de proximité de STOP et Positive Living BC.

Ces ateliers traitent des notions de base du VIH, notamment la prévention, la transmission et le traitement du VIH, et expliquent comment des tests de dépistage sont maintenant offerts dans certaines cliniques de santé publique de Vancouver. Les ateliers permettent aux dentistes de mettre à jour leurs connaissances sur le VIH et dissipent les mythes et les idées erronées concernant les personnes à risque et les modes de transmission. Cette formation aide aussi à réduire la stigmatisation liée au fait d’accepter des patients vivant avec le VIH et donne aux cliniciens des stratégies pour appuyer et encourager les patients qui sont tombés entre les mailles du filet à reprendre contact avec un fournisseur de soins.

Leçons tirées

  1. Création de liens. L’établissement des liens nécessaires entre les services liés au VIH et les professions dentaires – même si celles-ci choisissent de ne pas offrir de tests de dépistage du VIH dans leurs cliniques – contribue à l’amélioration des connaissances sur le VIH et réduit la stigmatisation chez les dentistes, les assistantes dentaires agréées et les hygiénistes dentaires. Ces liens solides ont permis d’offrir une instruction sur le VIH à tous les étudiants en dernière année de dentisterie à l’Université de la Colombie-Britannique, réduisant ainsi les obstacles pour les personnes vivant avec le VIH qui désirent avoir accès à des soins dentaires.
  2. Soutien des ordres professionnels et associations dentaires. Le projet pilote a obtenu le soutien du College of Dental Surgeons of British Columbia et du College of Dental Hygienists of British Columbia, qui étaient tous deux représentés sur le comité consultatif du projet. Le soutien de ces associations était essentiel pour confirmer que le dépistage du VIH s’inscrivait bien dans le champ d’exercice de la profession dentaire et a grandement contribué à faire avancer cette initiative.
  3. Formation complète du personnel. Tout le personnel des cliniques doit recevoir une formation complète sur le VIH afin de réduire la stigmatisation et dissiper les idées erronées. Les dentistes et autres membres du personnel des cliniques ne disposent pas des tout derniers renseignements disponibles sur la transmission et le traitement du VIH et entretiennent donc des idées désuètes sur le virus et les personnes séropositives. Certains dentistes n’ont reçu aucune nouvelle information sur le VIH depuis qu’ils ont obtenu leur diplôme dans les années 80.
  4. Dépistage chez le personnel. À l’une des cliniques, tout le personnel a volontairement subi un test de dépistage du VIH, ce qui a probablement aidé à sensibiliser les patients à la disponibilité du test et à démystifier le processus. Cela a aussi permis au personnel de la réception de se sentir plus à l’aise à répondre aux questions concernant le test.
  5. Accès élargi. Le dépistage en clinique dentaire offre une solution de rechange aux personnes qui se heurtent à d’importants obstacles dans d’autres cadres de soins de santé ou qui n’ont pas de fournisseur de soins primaires.
  6. Acceptabilité par les patients. Le dépistage aux points de service en clinique dentaire est acceptable aux yeux des patients. Les tests de dépistage ont été extrêmement bien accueillis. À la clinique dentaire de la PHS Community Services Society, la plupart des tests administrés sont demandés par les patients, avant même qu’on ne le leur offre.

Matériel du programme

Coordonnées

Pour plus de renseignements, veuillez communiquer avec :

Brandy Svendson, directrice générale

Does HIV Look Like Me? International Society
289, rue Alexander, bureau 210
Vancouver (C.-B.)  V6A 4H6
CANADA

1.800.601.0191

brandy@doeshivlooklikeme.org

Introduction au projet STOP HIV/AIDS

Le projet « Seek and Treat for Optimal Prevention of HIV/AIDS » ou STOP était un projet pilote de quatre ans (2010-2013) financé par le gouvernement de la Colombie-Britannique à un coût de 48 millions $. Ce projet visait à améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH et à réduire le nombre de nouvelles infections par le VIH en adoptant une approche proactive en matière de santé publique pour repérer les personnes vivant avec le VIH, les arrimer à des programmes de soins et de traitement du VIH et les aider à suivre leurs programmes de soins. Le projet visait aussi à rehausser l’expérience des personnes vivant avec le VIH ou le sida dans toutes leurs interactions avec les services sociaux et de santé et à améliorer de façon considérable l’arrimage et l’implication dans tout le continuum des services de prévention, de dépistage, de diagnostic, de soins, de traitement et de soutien liés au VIH.

Le projet STOP a été mis en œuvre à Vancouver et à Prince George. Il regroupait de nombreux programmes distincts et interreliés menés dans des cliniques, des hôpitaux ou en milieu communautaire, ainsi que des programmes axés sur les politiques mis sur pied grâce à la collaboration d’un nombre important d’intervenants. À Vancouver, les organismes Vancouver Coastal Health et Providence Health Care ont joint leurs forces pour créer le Vancouver Project. Ce partenariat a permis aux deux organismes de partager les tâches de gouvernance, de financement et de production de rapports pour plusieurs des initiatives menées à Vancouver entre 2011 et 2013.

Grâce au financement du projet STOP, la clinique IDC a augmenté ses heures d’ouverture afin d’offrir ses services les soirs, du lundi au jeudi; on a aussi ajouté des infirmières spécialisées, une nutritionniste et des travailleurs sociaux, des services de dépistage sur place et des services de pairs navigateurs en partenariat avec Positive Living BC.