Les problèmes de la bouche et de la gorge

Déterminer la cause

Les problèmes de la bouche et de la gorge ont de nombreuses causes, dont les infections, les médicaments antirétroviraux et autres, les problèmes nutritionnels, les cancers de la bouche, d’autres affections médicales et la mauvaise hygiène dentaire. Une visite chez son médecin ou dentiste est nécessaire pour en déterminer la cause. Le plan de traitement dépendra de la nature précise du problème. Dans les sections suivantes, nous parlons des problèmes courants comme les infections, les ulcères buccaux, la sécheresse buccale et les problèmes dentaires. Dans la majorité des cas, le problème se résorbe lorsque la cause sous-jacente est réglée.

Il faut souligner que les changements dans la bouche peuvent être le signe d’une réaction allergique rare mais dangereuse à un médicament. Désignée par le nom de syndrome de Stevens-Johnson, la réaction a habituellement lieu dans les deux semaines suivant l’introduction d’un nouveau médicament, y compris certains antirétroviraux. La réaction s’accompagne d’éruptions cutanées, de fièvre, de nausées et d’autres symptômes allergiques, ainsi que d’inflammation, d’ampoules ou de picotements au niveau du nez, de la bouche ou des lèvres. Cette réaction très grave peut causer la mort. Pour en savoir plus, consultez la section intitulée Les éruptions cutanées et autres problèmes de la peau, des cheveux et des ongles. Toute personne qui éprouve ces symptômes devrait obtenir des soins médicaux sans tarder.

Infections

Chez les personnes vivant avec le VIH qui ne suivent pas de thérapie antirétrovirale, les problèmes de la bouche — et plus particulièrement les ulcères buccaux — peuvent signaler que l’affaiblissement du système immunitaire les a laissées vulnérables à une infection opportuniste ou à une autre maladie. Les infections opportunistes et les maladies susceptibles de toucher la bouche incluent le sarcome de Kaposi, la candidose buccale et œsophagienne (couramment appelée muguet), la leucoplasie chevelue et les ulcères de la bouche ou de la gorge causés par l’herpès simplex ou le cytomégalovirus (CMV). Plus rarement, les lésions buccales sont causées par le complexe Mycobacterium avium (MAC). Pour leur part, les lésions buccales fongiques peuvent être associées à l’histoplasmose, à la géotrichose ou au champignon Cryptococcus.

Les personnes atteintes de ces infections doivent être soignées immédiatement et ont besoin de commencer une thérapie antirétrovirale. Celle-ci permet au système immunitaire de se rebâtir, du moins partiellement, ce qui fait baisser spectaculairement le risque de ces infections.

De nombreuses infections et affections de la bouche et de la gorge peuvent survenir chez les personnes séropositives, quel que soit leur compte de CD4. Elles comprennent l’herpès simplex, qui cause des feux sauvages douloureux sur les lèvres ou des ulcères sur le palais, et l’herpès zoster, qui est à l’origine de la varicelle et du zona. Le zona peut causer de la douleur et de multiples lésions sur un côté de la bouche, et la douleur buccale dure longtemps après la guérison des lésions.

Les affections de la bouche et de la gorge peuvent aussi être causées par le virus du papillome humain (VPH, cause des verrues), les bactéries — soit la prolifération de bactéries normalement présentes dans la bouche, soit l’introduction de nouvelles bactéries — et le lymphome. Certaines infections transmissibles sexuellement, dont la chlamydia, la gonorrhée et la syphilis, sont susceptibles d’infecter la bouche ou la gorge et de causer maux de gorge, amygdalites ou ulcères buccaux. Certaines des lésions en question, notamment celles associées à la syphilis primaire, sont indolores et risquent de passer inaperçues. Il est essentiel de traiter efficacement ces infections et affections afin de régler les problèmes de la bouche ou de la gorge.

Ulcères buccaux

Les ulcères de la bouche (également appelés ulcères aphteux) sont courants et apparaissent habituellement sur le tissu mou de couleur rouge-rosée se trouvant à l’intérieur des lèvres et des joues ou encore sur le dessous ou les côtés de la langue. Certains estiment que l’hyperactivité du système immunitaire associée à l’infection au VIH contribue à l’apparition de ces lésions douloureuses. Puisque le traitement antirétroviral agit contre cette hyperactivité, les ulcères très graves de la bouche sont moins courants de nos jours que dans le passé. Les personnes qui ne suivent pas de thérapie antirétrovirale et qui ont fréquemment de graves ulcères buccaux trouveraient peut-être utile de commencer un tel traitement. Mentionnons que le médicament antirétroviral saquinavir (Invirase) peut causer des ulcères buccaux, mais il n’est pas couramment utilisé de nos jours.

Certaines carences en micronutriments — fer, zinc, niacine, folate, glutathion, carnitine et vitamine B12 — se produisent chez les personnes ayant le VIH et les prédisposent aux ulcères buccaux. La prise régulière d’une puissante multivitamine avec minéraux aidera à prévenir la plupart de ces carences. On peut régler la carence en glutathion en prenant de la N-acétyl-cystéine à raison de 600 mg trois fois par jour avec les repas. La façon la plus efficace d’augmenter son taux de carnitine consiste à prendre de l’acétyl-L-carnitine (500 mg, trois fois par jour avec les repas). Notons que ce nutriment est rarement inclus dans les formules de multivitamines. Consultez l’annexe sur la vitamine B12 pour en savoir plus sur cette vitamine essentielle pour les personnes vivant avec le VIH.

Une alimentation trop riche en aliments acides peut causer des ulcères buccaux chez certaines personnes. Il est parfois utile de consommer moins de tomates et de produits dérivés de la tomate, d’agrumes et de jus d’agrumes, de café, de produits saumurés (marinades), de vinaigres et d’autres aliments acides. Il arrive aussi que les ulcères buccaux soient causés par une blessure à la bouche, comme lorsqu’on se mord accidentellement la langue ou l’intérieur de la joue. Il pourrait aussi exister une cause génétique parce que les ulcères buccaux ont tendance à se produire chez les personnes dont la famille en fait beaucoup. Le stress émotionnel et le manque de sommeil sont également des causes connues d’ulcères buccaux. Certaines personnes trouvent aussi que les ulcères se produisent plus fréquemment lors de certains moments de leur cycle menstruel.

Traiter les ulcères de la bouche

Pour traiter les ulcères buccaux, de nombreuses personnes entreprennent simplement de se rincer la bouche avec de l’eau salée plusieurs fois par jour. Elles font circuler le liquide dans la bouche pendant une ou deux minutes avant de le cracher, puis elles répètent la démarche une ou deux fois. Bien que les ulcères buccaux disparaissent habituellement tout seuls après une semaine ou 10 jours, il existe des traitements topiques et oraux pour les ulcères fréquents ou douloureux qui rendent l’acte de manger difficile. N’hésitez pas à parler de vos ulcères buccaux chroniques à votre médecin.

L’emploi de corticostéroïdes en crème ou en gel constitue le traitement le plus courant des ulcères buccaux. Ces produits agissent en supprimant l’activation immunitaire qui contribue à l’apparition des lésions. Il faut faire preuve de prudence, cependant, parce que la suppression immunitaire localisée causée par ces produits peut augmenter les risques d’infections buccales.

Tant que les lésions sont présentes, on peut avoir recours à un anesthésique topique en aérosol pour engourdir la zone et atténuer la douleur lorsqu’on mange ou avale. Un rince-bouche fait de lidocaïne visqueuse, d’élixir de Benadryl et de nystatine peut aider à éliminer la douleur causée par les lésions buccales. Ce genre de rince-bouche est préparé par un pharmacien. On y ajoute parfois un antidouleur opiacé si les ulcères sont particulièrement douloureux. Si les lésions sont limitées à la cavité buccale, on peut se gargariser pendant deux minutes, puis cracher. Si des lésions sont présentes dans la gorge, on peut se rincer la bouche pendant deux minutes puis avaler.

La dexaméthasone est un corticostéroïde que l’on peut ajouter au mélange ci-dessus. Avant de commencer le traitement, cependant, il est important de s’assurer que les lésions ne sont pas causées par un virus de l’herpès ou d’autres infections qui risquent de s’aggraver sous l’effet d’un médicament stéroïdien. Si la dexaméthasone est ajoutée au rince-bouche, il est préférable de ne pas avaler le mélange, mais de le cracher après s’être gargarisé pendant deux minutes. Cela permet d’empêcher la suppression immunitaire qu’un agent stéroïdien de ce genre est susceptible d’induire.

On a parfois recours à un autre rince-bouche appelé Miles mixture. Celui-ci contient de l’hydrocortisone, de la nystatine et de la tétracycline. Il faut éviter d’avaler ce mélange parce que l’hydrocortisone est un immunosuppresseur. Certains médecins et pharmaciens ont constaté que l’application du colorant violet gentiane sur les ulcères buccaux constituait un traitement utile. Ici encore, il est important de vérifier que les lésions ne sont pas causées par des champignons ou des virus.

La thalidomide s’est déjà révélée efficace chez les personnes souffrant d’ulcères buccaux graves et fréquents. La thalidomide a toutefois des effets secondaires dangereux, y compris de graves anomalies congénitales si elle est utilisée pendant la grossesse, alors il faut seulement s’en servir sous l’étroite supervision d’un médecin.

Sécheresse buccale

La production réduite de salive qui entraîne la sécheresse buccale peut être l’effet secondaire d’une médication, le résultat de changements dans les glandes salivaires ou de la déshydratation ou encore la conséquence d’une radiothérapie ou d’une chimiothérapie contre le cancer. Les médicaments reconnus pour réduire la production de salive comprennent les antidépresseurs, les antihistaminiques, de nombreux antidouleurs opiacés, le foscarnet (utilisé pour traiter le cytomégalovirus) et le médicament antirétroviral 3TC (lamivudine et dans le Combivir, le Kivexa et le Trizivir). Le risque de sécheresse buccale augmente en fonction du nombre de médicaments différents utilisés.

La salive protège l’émail dentaire, alors toute baisse de la production de salive peut augmenter le risque de carie dentaire. Comme l’écoulement normal de la salive aide à protéger la muqueuse buccale, la production réduite de salive rend les lésions buccales plus probables. Le manque de salive peut aussi faire en sorte qu’il est difficile de manger et d’avaler.

Traiter la sécheresse buccale

Normalement, il est utile de boire beaucoup d’eau si vous avez la bouche sèche, surtout si vous êtes déshydraté. Toutefois, même les grandes quantités d’eau risquent d’être inutiles s’il y a une baisse importante de la production de salive, surtout si elle est le résultat de dommages aux glandes salivaires causés par la radiothérapie. Lorsque la production de salive diminue à la suite d’une radiothérapie ou d’une chimiothérapie, le médicament pilocarpine (livré sur ordonnance) peut stimuler la production de salive. Le clavalier d’Amérique est une herbe qui serait également utile pour accroître la production de salive. ll se vend souvent sous forme de teinture, et la dose courante est de cinq à 10 gouttes placées sous la langue avant les repas. Les amérisants à base de plantes peuvent aussi aider à augmenter la production de salive.

S’il n’est pas possible de restaurer une production normale de salive, il existe des substituts à la salive que l’on peut utiliser pour accroître l’humidité de la bouche. Ces produits agissent dans la bouche et la gorge pendant une heure ou deux, ce qui rend la mastication et la déglutition bien plus faciles. Lors d’une étude, on a déterminé qu’un substitut appelé Mouth Kote était le plus efficace de ces produits. Disponible en vente libre, ce produit n’a aucun effet secondaire et est édulcoré naturellement avec du xylitol. Il existe aussi des gommes à mâcher qui aident à accroître la production de salive, ainsi que des dentifrices à l’intention des personnes souffrant de sécheresse buccale.

D’ordinaire, les dentistes recommandent l’utilisation de fluorures topiques et une hygiène dentaire rigoureuse pour réduire les risques de caries chez les personnes présentant une déficience salivaire chronique. Les aliments humidifiants sont également utiles chez les personnes souffrant de sécheresse buccale.

Problèmes dentaires, maladie parodontale et gingivite

Certaines personnes vivant avec le VIH éprouvent des problèmes dentaires, y compris la maladie parodontale (inflammation des tissus entourant les dents), la gingivite (inflammation des gencives, reconnue par la présence d’une ligne rouge à la frontière entre les dents et les gencives ou par une rougeur généralisée des gencives) et la carie dentaire accélérée. Dans la mesure du possible, il est très important de prévenir ces problèmes et de les traiter efficacement lorsqu’ils se produisent. S’ils ne sont pas traités, les problèmes risquent de s’aggraver, causant de la douleur et de la difficulté à mâcher, la mauvaise haleine et les saignements ou douleurs des gencives.

Le brossage dentaire et l’usage de la soie dentaire sont des mesures évidentes que l’on peut prendre pour prévenir les problèmes dentaires et traiter certaines maladies comme la gingivite. Toutefois, la brosse à dents et la soie dentaire ne suffisent pas habituellement à résoudre les problèmes graves. Lorsque vous vous brossez les dents, tâchez de nettoyer complètement la surface entière de chaque dent, ainsi que la langue. Si votre langue ou toute autre zone proche de vos dents est trop sensible pour la nettoyer avec une brosse à dents normale, vous pouvez utiliser les bâtonnets de mousse jetables qui se vendent dans les pharmacies.

Traiter les problèmes dentaires

Pour résoudre les problèmes des gencives et des dents, la première étape consiste habituellement à recourir à un nettoyage dentaire professionnel. Celui-ci permet d’enlever le tartre au-dessus et au-dessous de la limite gingivale (bord des gencives). D’ordinaire, les dentistes recommandent aussi l’usage d’un rince-bouche antiseptique. Dans certains cas, ils prescrivent aussi un traitement antibiotique de courte durée pour éliminer les bactéries de la bouche.

Si les légers problèmes de gencives ne sont pas réglés, ils risquent d’évoluer en maladie parodontale, problème encore bien plus grave. L’os qui retient les dents en place peut être endommagé, ainsi que les fibres qui assurent l’adhésion des gencives aux racines des dents. Les symptômes de la maladie parodontale comprennent les saignements de gencives, les dents desserrées, la mauvaise haleine et même la perte de dents. Certaines personnes risquent de présenter une affection appelée parodontite liée au VIH. Celle-ci se caractérise par de l’inflammation grave, la détérioration rapide des tissus entourant les dents et des pertes osseuses rapides autour des dents.

Il existe des suppléments nutritionnels qui s’avèrent très utiles contre les problèmes de gencives et la maladie parodontale dans certains cas. Ils incluent la coenzyme Q10 (CoQ10), les bioflavonoïdes et les vitamines C et D. Au Japon, la CoQ10 est utilisée avec un succès considérable depuis longtemps comme traitement de la maladie parodontale et des problèmes de gencives. Comme le taux de CoQ10 est souvent faible chez les personnes vivant avec le VIH, une carence en ce nutriment pourrait être un facteur dans l’apparition de problèmes parodontaux. Les suppléments de CoQ10, à raison de 100 à 300 mg par jour, pourraient aider à prévenir ou à résoudre ce genre de problème. La vitamine C est nécessaire à la santé des gencives et les bioflavonoïdes, comme la quercétine, ont des propriétés qui sont susceptibles de renforcer les capillaires et de réduire ainsi les saignements de gencives. La prise d’un maximum de 2 000 mg de vitamine C par jour, soit la limite supérieure de la tolérance, et de 500 mg de quercétine, deux fois par jour, pourrait contribuer au maintien d’une bonne santé buccale.

Altération du sens du goût (ou dysgueusie)

Les médicaments antirétroviraux et d’autres causent parfois des goûts anormaux, la sécheresse buccale ou des lésions de la bouche. Les antibiotiques clarithromycine (Biaxin), azithromycine (Zithromax, Zmax) et métronidazole (Flagyl) peuvent causer un goût métallique ou une sensation étrange dans la bouche. Parmi les antirétroviraux susceptibles de causer des goûts anormaux, mentionnons le Kaletra (lopinavir/ritonavir), le ritonavir (Norvir) et l’indinavir (Crixivan). Ces altérations du goût diminuent avec le temps dans certains cas, mais elles peuvent persister pendant plusieurs semaines voire des mois, même après l’abandon du médicament en cause. Si vous éprouvez ce genre de problème, essayez les mesures suivantes :

  • Utilisez des ustensiles de plastique pour réduire le goût métallique;
  • Mâchez de la gomme ou sucez des friandises sans sucre pour masquer les goûts amers;
  • Demandez des conseils à votre pharmacien quant aux moyens de vivre avec les médicaments qui altèrent le sens du goût.

Conseils pour mastiquer sans douleur

Les problèmes de la bouche et de la gorge décrits dans cette section peuvent causer de la douleur lors de la mastication ou de la difficulté à avaler. Les conseils pratiques suivants pourraient vous aider à modifier votre alimentation si vous éprouvez de la douleur en mangeant, en buvant ou en avalant :

  • Essayez des aliments dont la texture est molle et lisse, car ils sont plus faciles à manger. Il est toujours possible de faire des purées ou de préparer de nombreux aliments dans le mélangeur, même si vous ne les mangeriez pas normalement de cette manière. Un robot culinaire peut donner une consistance onctueuse à presque n’importe quel aliment. Les préparations commerciales pour bébés sont déjà bien mélangées, et il en existe une grande variété. Vous pouvez aussi faire un déjeuner ou une collation facile à boire en mélangeant des fruits non acides avec du lait et de la poudre de protéines;
  • Mouillez les aliments en y ajoutant des sauces avant de les manger, ou faites-en une soupe. Faites tremper le pain et les biscuits dans des liquides avant de les manger. Sirotez un breuvage après chaque bouchée;
  • Évitez les agrumes, les produits à base de tomates, le café et les vinaigres parce que l'acidité peut irriter les lésions buccales;
  • Évitez les aliments très assaisonnés ou poivrés;
  • Évitez les boissons gazéifiées si elles vous irritent la bouche ou la gorge;
  • Évitez les aliments durs ou salés, comme certains fruits et légumes crus, les croustilles, le maïs éclaté et les noix salées;
  • Évitez les aliments qui collent à la bouche, comme le beurre d'arachide;
  • Évitez les aliments et liquides chauds; les aliments et les liquides froids ou à température ambiante sont souvent moins irritants;
  • Utilisez une paille pour boire les liquides;
  • Essayez d'éviter le tabac et l'alcool parce que ces deux substances irritent les tissus buccaux;
  • Limitez ou évitez les sucreries si le muguet ou la candidose buccale (Candidiasis) est un problème, car ce champignon raffole du sucre. Si vous mangez des sucreries, nettoyez-vous bien la bouche après.