Souhaitez-vous recevoir nos publications directement dans votre boîte de réception?

CATIE
  • Des chercheurs de la C.-B. ont tracé le cheminement des patients du diagnostic à la guérison de l’hépatite C
  • À chaque étape de la cascade, des patients n’ont pas progressé vers la guérison
  • Seulement 61 % des patients ayant passé des tests de génotypage ont commencé un traitement

L’exposition au virus de l’hépatite C (VHC) peut aboutir à l’infection du foie par ce virus. L’infection au VHC chronique provoque de l’inflammation persistante dans le foie et finit par détériorer lentement cet organe vital. Si le VHC n’est pas diagnostiqué et traité, l’inflammation du foie devient chronique. L’inflammation chronique entraîne à son tour un processus appelé fibrose durant lequel les cellules saines du foie sont remplacées par du tissu cicatriciel inutile. À mesure que le tissu cicatriciel s’accumule, le foie commence à mal fonctionner et des complications surviennent, telles qu’une fatigue intense, des hémorragies internes, des infections abdominales graves, des lésions rénales et l’insuffisance hépatique. La présence de tissu cicatriciel dans l’organe augmente aussi le risque de cancer du foie.

Le traitement avant et maintenant

Le traitement de l’infection au VHC chronique consistait autrefois en des injections régulières d’interféron alpha pour une période de 24 à 48 semaines. Ce traitement avait une efficacité modeste pour guérir le VHC, mais il provoquait des effets secondaires très désagréables. Au cours des six dernières années au Canada et dans les autres pays à revenu élevé, cependant, des médicaments entièrement oraux ont graduellement vu le jour pour le traitement du VHC. Ces médicaments, qui portent le nom d’antiviraux à action directe (AAD), ont révolutionné le traitement du VHC grâce à leur puissance et à des taux de guérison s’élevant à 95 % ou plus. Dans certains cas, les patients guérissent après seulement huit semaines de traitement consécutives. Les AAD sont généralement bien tolérés.

À propos de la cascade des soins

Les chercheurs qui étudient les systèmes de santé appellent le processus par lequel les personnes atteintes de l’infection au VHC s’acheminent du diagnostic aux soins et au traitement « la cascade des soins », « la cascade des soins du VHC » ou simplement « la cascade ». Il est important d’analyser la cascade des soins du VHC parce que cela aide à reconnaître les obstacles aux soins et à déterminer si les patients reçoivent des soins et un traitement dans un délai convenable.

Une équipe de chercheurs au Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique (BCCDC) et à l’Université de la Colombie-Britannique ont collaboré à une étude conçue pour évaluer la cascade des soins du VHC dans cette province. Dans un article qui sera publié dans la revue médicale Liver International, les chercheurs rapportent que, malgré les progrès accomplis dans le diagnostic et le traitement du VHC depuis quelques années, des lacunes existent encore dans la cascade des soins. La lacune la plus importante qu’ils ont découverte se rapporte à l’amorce du traitement du VHC. Les chercheurs ont suggéré des solutions pour réduire l’ampleur de cette lacune et d’autres lacunes dans la cascade.

Détails de l’étude

Les chercheurs ont évalué plusieurs bases de données pour faire leur travail. Ils ont utilisé en particulier des informations se rapportant à la santé des participants inscrits à la Cohorte des testeurs de l’hépatite de la Colombie-Britannique. Selon les chercheurs, cette cohorte inclut toutes les personnes de la province qui « ont déjà passé un test de dépistage du VHC ou du VIH, ou qui ont fait l’objet d’un diagnostic de virus de l’hépatite B (VHB), de VHC, de VIH ou de tuberculose active en C.-B. entre 1990 et 2015, en lien avec les données sur les consultations médicales, les hospitalisations, les cancers, les médicaments sur ordonnance et la mortalité. Les données sur les tests de laboratoire, les ordonnances et la mortalité étaient à jour au 31 décembre 2018 ».

Les chercheurs ont utilisé ces données pour évaluer le cheminement des patients tout au long des différentes étapes de la cascade, que voici :

  • test de dépistage des anticorps anti-VHC pour déterminer si la personne a déjà été exposée au virus
  • test de recherche de l’ARN VHC pour déterminer si la personne a une infection au VHC active
  • présence d’ARN décelée, ce qui confirme la présence d’une infection au VHC active
  • détermination de la souche (génotype) du VHC
  • amorce du traitement
  • guérison

Résultats

Test de dépistage des anticorps anti-VHC

Selon les estimations des chercheurs, quelque 61 127 personnes avaient été exposées au VHC en Colombie-Britannique. Sur ce nombre, 87 % (53 441) avaient fait l’objet d’un diagnostic d’exposition au VHC. Rappelons que la présence de l’anticorps signifie uniquement que la personne a été exposée au virus; ce test ne peut révéler à quel moment l’exposition a eu lieu ou si l’infection est active.

Test de recherche de l’ARN VHC

Pour déterminer si le VHC est en train de causer une infection active, on peut prélever un échantillon de sang et l’analyser pour déterminer s’il contient le matériel génétique du VHC, c’est-à-dire son ARN. Sur les 53 441 personnes porteuses d’anticorps anti-VHC, 83 % (44 507) ont passé un test de recherche de l’ARN VHC. Sur celles-ci, 72 % (32 031) ont reçu un résultat positif indiquant qu’elles avaient une infection au VHC active.

Génotypage

Dans le passé, la détermination de la souche ou du génotype du VHC dont une personne était infectée était un facteur important pour choisir le régime de traitement qu’elle recevrait parce que certains génotypes répondaient mal à l’interféron et aux AAD de première génération. De nos jours, les professionnels de la santé et les patients peuvent choisir parmi plusieurs régimes qui sont efficaces contre tous les génotypes du VHC, alors le génotypage n’est plus aussi important. Il reste que le génotypage a encore un rôle à jouer pour les chercheurs qui suivent les tendances de la virologie (pour savoir quelles souches sont les plus courantes à l’heure actuelle ou si une nouvelle souche est en train d’émerger dans une ville ou une région particulière, par exemple). Sur les 32 031 personnes ayant une infection au VHC active, 90 % (28 716) ont fait l’objet de tests de génotypage.

Amorce du traitement

Sur les 28 716 personnes dont le génotype du VHC a été déterminé, 61 % (17 441) ont commencé un traitement contre le VHC.

Guérison

Sur les 17 441 personnes qui ont commencé un traitement, 90 % (15 672) ont guéri subséquemment du VHC.

Combler les lacunes

Les chercheurs ont clairement affirmé que, malgré les nombreux progrès accomplis dans la cascade des soins du VHC au cours des dernières années, il reste des lacunes à combler en ce qui concerne le test de recherche de l’ARN, surtout parmi les personnes présentant des « facteurs de risque historiques ». Ce terme englobe les personnes qui s’injectaient autrefois des drogues, mais qui ne le font plus. Selon les chercheurs, « ce groupe de personnes peut être difficile à réintégrer dans les soins liés au VHC, particulièrement si elles bénéficient à peine des autres services de santé ». Une stratégie potentielle pour minimiser les interruptions survenant dans la cascade consiste à utiliser ce que les chercheurs appellent le « dépistage réflexe ». Il s’agit de soumettre automatiquement à un test de recherche de l’ARN tous les échantillons de sang dans lesquels on détecte des anticorps anti-hépatite C. Cette méthode élimine la nécessité pour les patients de retourner à la clinique pour passer un test de recherche de l’ARN. Les chercheurs ont affirmé que le dépistage réflexe faisait l’objet d’une étude pilote en Colombie-Britannique.

Une autre solution possible pour simplifier le parcours menant au traitement consiste à éliminer la nécessité du génotypage. Les chercheurs ont laissé entendre que la disponibilité des « nouveaux régimes d’AAD pangénotypiques pourrait éliminer la nécessité de faire passer des tests de génotypage du VHC avant de commencer le traitement », particulièrement pour les patients correspondant au profil suivant :

  • n’ayant jamais été traités pour le VHC
  • absence de lésions hépatiques graves (cirrhose)

Accent sur des populations spécifiques

Les chercheurs de la Colombie-Britannique ont affirmé que « des stratégies additionnelles devraient être explorées pour améliorer l’utilisation du traitement parmi les personnes qui s’injectent ou qui s’injectaient autrefois des drogues, particulièrement les jeunes personnes et celles vivant dans les régions les plus défavorisées matériellement. La cascade en 2018 porte à croire que ces groupes sont traités moins souvent que la cohorte générale ».

Les chercheurs ont proposé les mesures suivantes qui pourraient servir à combler les lacunes de la cascade des soins du VHC :

  • élargir le bassin de prescripteurs d’AAD pour inclure les omnipraticiens et les spécialistes en dépendances
  • offrir ou améliorer le soutien par les pairs et les services de navigation destinés aux patients
  • établir des services de traitement du VHC dans les mêmes locaux que les installations communautaires utilisées par les personnes qui s’injectent des drogues (tels les centres de réduction des méfaits, les sites d’injection supervisée, les cliniques offrant des traitements de substitution aux opioïdes, les endroits offrant des services aux personnes dans la rue)

À retenir

Comme toutes les études, la présente analyse est imparfaite. Cependant, en intégrant les informations relatives à la santé de plusieurs bases de données, les chercheurs ont réussi à évaluer efficacement l’état de la cascade des soins du VHC en Colombie-Britannique. Selon les chercheurs, leur analyse pourrait être utilisée pour raffiner « les programmes et les politiques en C.-B. afin d’optimiser la réponse au VHC dans le contexte d’un paysage du traitement qui a beaucoup changé ».

L’Organisation mondiale de la Santé a fixé des cibles afin que l’élimination du VHC comme menace pour la santé publique puisse être accomplie d’ici 2030. Selon les chercheurs :

« Pour atteindre les objectifs d’élimination de l’hépatite virale, la C.-B. doit travailler à plusieurs niveaux dans le système de santé pour définir les soutiens nécessaires pour arrimer aux soins les personnes qui restent non évaluées, élargir les capacités pour évaluer et traiter dans une variété de contextes et assurer l’accès approprié aux services de réduction des méfaits pour prévenir les nouvelles infections par le VHC ou la réinfection post-traitement ».

La présente analyse de la cascade des soins du VHC en Colombie-Britannique a un rôle important à jouer pour aider cette province à progresser vers la guérison de davantage de personnes atteintes de ce virus.

Ressources

La FDA signale des cas rares de lésions hépatiques associées à certains traitements de l'hépatite CNouvelles CATIE

Les tendances de la mortalité des personnes atteintes du virus de l'hépatite C en Colombie-BritanniqueNouvelles CATIE

La cascade des soins de l'hépatite C en AlbertaNouvelles CATIE

L'hépatite CCATIE

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Bartlett SR, Yu A, Chapinal N, et al. The population level care cascade for hepatitis C in British Columbia, Canada as of 2018: Impact of direct acting antivirals. Liver International. 2019; in press.
  2. Sokol R, Fisher E. Peer support for the hardly reached: A systematic review. American Journal of Public Health. 2016 Jul;106(7):e1-8.