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CATIE
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  • La prise de doxycycline dans les 72 heures suivant une relation sexuelle réduit le risque d’ITS bactériennes
  • Une équipe de San Francisco a évalué les effets du médicament auprès de 2 524 personnes pendant près de deux ans
  • Elle a constaté un déclin des taux de chlamydiose et de syphilis et des résultats mitigés quant à la gonorrhée

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Certaines infections transmissibles sexuellement (ITS) sont relativement courantes, notamment la chlamydiose (infection à Chlamydia), la gonorrhée et la syphilis. Les médecins, les infirmier⋅ère⋅s, les pharmacien⋅ne⋅s et les autorités de la santé publique essaient de trouver des moyens de réduire la propagation de ces infections. Une méthode pour y parvenir consiste à prendre l’antibiotique doxycycline avant ou après une relation sexuelle à risque. Cet article de Nouvelles CATIE portera plus précisément sur l’usage de doxycycline après les expositions sexuelles. On appelle cette utilisation de ce médicament la prophylaxie post-exposition à la doxycycline ou doxy-PPE.

Lors d’un essai clinique mené il y a plusieurs années aux États-Unis sous le nom de Doxy-PEP, une équipe de recherche a prescrit aux participant⋅e⋅s une dose de 200 mg de l’antibiotique doxycycline ou un placebo, à prendre dans les 72 heures suivant une relation sexuelle sans condom. L’équipe a inscrit à son étude des personnes séropositives et des personnes séronégatives. Elle a constaté que la prise de doxycycline réduisait le risque de syphilis, de chlamydiose et de gonorrhée d’à peu près les deux tiers, peu importe le statut VIH.

Déploiement de la doxy-PPE dans une grande clinique

Depuis cette étude pivot, une équipe de recherche de San Francisco a analysé des données se rapportant aux risques d’ITS qui avaient été recueillies dans une des plus grandes cliniques de santé sexuelle de la ville (clinique Magnet). Tous⋅te⋅s les participant⋅e⋅s figurant dans l’analyse suivaient une prophylaxie pré-exposition (PrEP) contre le VIH. L’équipe leur a offert la doxy-PPE en stipulant le mode d’utilisation décrit ci-dessus. Les personnes qui n’utilisaient pas la doxy-PPE ont servi de groupe témoin.

L’équipe de recherche a recueilli des données se rapportant à la santé de 4 592 personnes entre 2022 et 2024. Leur profil moyen était le suivant : 

  • 33 ans
  • hommes cisgenres – 89 %; personnes non binaires – 6 %; femmes transgenres – 3 %; hommes transgenres – 1 %; femmes cisgenres – 1 %
  • principaux groupes ethnoraciaux : Blanc⋅he⋅s – 34 %; Hispaniques – 24 %; Asiatiques – 17 %; Noir⋅e⋅s – 4 %

Plus de la moitié des participant⋅e⋅s (2 524) ont commencé la doxy-PPE pendant l’étude. Le suivi a duré environ 96 semaines.

Résultats

L’équipe de recherche a constaté des « déclins soutenus de la chlamydiose et de la syphilis sur 96 semaines après l’amorce de la doxy-PPE ». L’équipe a fait valoir que les personnes sous doxy-PPE avaient généralement des antécédents d’ITS, ce qui indique que la doxy-PPE était offerte à une population présentant un risque élevé de contracter ces infections. 

Selon l’équipe de recherche, les personnes sous doxy-PPE ont dévoilé un plus grand nombre d’actes sexuels sans condom que les personnes n’utilisant pas la doxy-PPE. Malgré ces comportements à risque plus nombreux parmi les personnes sous doxy-PPE, les taux de diagnostics de chlamydiose et de syphilis étaient semblables à ceux des personnes ne prenant pas l’antibiotique. Ce résultat porte à croire que la doxy-PPE réduit très efficacement le risque de chlamydiose et de syphilis.

Accent sur la gonorrhée

L’équipe de recherche a signalé que « même si le taux [de diagnostics] de gonorrhée a baissé initialement à la suite de l’amorce de la doxy-PPE, il a recommencé à augmenter vers la fin de la période figurant dans l’analyse ».

L’équipe a avancé deux hypothèses pour expliquer ce résultat, que voici :

  • Il est possible que, au cours de l’étude, la gonorrhée ait acquis de plus en plus la capacité de résister à la doxycycline;
  • Il est possible que des souches de gonorrhée partiellement ou complètement résistantes à la doxycycline soient celles auxquelles les personnes sous doxycycline sont exposées actuellement dans la ville. 

À retenir

Cette étude est un bon premier pas vers la confirmation de l’efficacité de la doxy-PPE contre les ITS, et plus particulièrement contre la chlamydiose et la syphilis, d’autant plus qu’elle a été déployée dans une grande clinique de santé sexuelle de San Francisco.

D’autres études devront toutefois être financées pour faire ce qui suit : 

  • Surveiller les taux de gonorrhée et des autres ITS courantes;
  • Analyser les tendances quant à la gonorrhée pour déceler la résistance à la doxycycline et déterminer si les souches résistantes répondent au traitement recommandé (tel l’antibiotique ceftriaxone);
  • Interroger les personnes sous doxy-PPE pour obtenir des données détaillées sur leurs comportements sexuels et leur observance des instructions relatives à l’usage de la doxy-PPE, notamment en ce qui concerne le temps s’écoulant entre une exposition sexuelle et la prise du médicament et la fréquence des prises. De telles données seront importantes parce que certaines personnes inscrites à l’étude originale sur la doxy-PPE (celle mentionnée au début de l’article) éprouvaient de la confusion à propos du moment indiqué pour la prise, surtout si elles avaient plusieurs partenaires sexuel⋅le⋅s pendant un court laps de temps. De plus, malgré la consigne voulant que la doxy-PPE soit utilisée après toute relation sexuelle sans condom, y compris les actes de sexe oral, l’équipe a constaté que plusieurs participant⋅e⋅s « avaient l’impression que la doxy-PPE n’était pas nécessaire après le sexe oral ». Cette confusion est due au fait que certaines personnes considéraient le sexe oral comme plus sécuritaire que les relations avec pénétration.

Étude différente dans un autre pays

Durant l’étude menée à San Francisco, la doxycycline a été fournie par une clinique se spécialisant dans les ITS. 

Or, aux Pays-Bas, l’usage de doxycycline en prévention des ITS n’est pas recommandé. Il n’empêche qu’une équipe de recherche de ce pays a récemment fait état d’une utilisation informelle de ce médicament pour prévenir les ITS chez un groupe composé principalement d’hommes gais, bisexuels et d’autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (hommes gbHARSAH). Même si les personnes inscrites à l’étude néerlandaise ont exprimé leur désir de réduire leurs risques d’ITS, il n’était pas clair de quelle manière précise la doxycycline était utilisée.

L’étude menée aux Pays-Bas souligne la nécessité d’études additionnelles pour élucider les façons dont les gens utilisent la doxycycline en dehors des essais cliniques.

Des efforts sont également nécessaires pour poursuivre l’éducation au sein de la communauté, ainsi que la recherche sur les tendances liées à la résistance de la gonorrhée aux antibiotiques.

Ressources

La doxycycline pour la prévention des ITS bactériennesCATIE

Étude sur l’incidence de l’antibiotique doxycycline sur le bien-être sexuel des usager⋅ère⋅sNouvelles CATIE

Des études sur la doxycycline pour la prévention d’infections transmissibles sexuellementNouvelles CATIE

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCES :

  1. Spinelli MA, Heise MJ, Roman J et al. Sustained effectiveness of doxycycline post-exposure-prophylaxis in a large sexual health clinic over 96 weeks: an interrupted time series analysis. Clinical Infectious Diseases. 2025; sous presse.
  2. Teker B, Hoornenborg E, Schim van der Loeff MF et al. Emergent informal use of doxycycline post- and pre-exposure prophylaxis among men who have sex with men and transgender and gender diverse people, the Netherlands, 2024. EuroSurveillance. 2025 Jul;30(26):2400707. 
  3. Reichert E, Grad YH. Effects of doxycycline post-exposure prophylaxis for prevention of sexually transmitted infections on gonorrhoea prevalence and antimicrobial resistance among men who have sex with men in the USA: a modelling study. Lancet Microbe. 2024 Nov;5(11):100926. 
  4. Lefebvre B, Martin I, Thorington R et al. Extensively drug-resistant Neisseria gonorrhoeae strain, Canada. Emerging Infectious Diseases. 2025 Jul;31(7):1446-1449.