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Par-delà leurs différences de génération et de région géographique, Dakota et hugues dialoguent sur l’évolution du leadership en VIH au fil des décennies. Dakota, 66 ans, est un survivant de longue date au VIH, habitant en Colombie-Britannique. Hugues, un homme queer de 31 ans du Québec, a reçu un diagnostic de VIH il y a neuf ans. Tous deux sont diplômés de l’Institut de développement du leadership positif (IDLP) et dirigent des formations en la matière. Leur échange porte sur nos définitions du leadership et sur des moments forts de l’Histoire. Il porte aussi sur des changements dans le militantisme et la stigmatisation, et sur des initiatives contemporaines inspirantes.

Qu’est-ce que l’IDLP?

L’Institut de développement du leadership positif est un programme de leadership dirigé par des pairs, qui vise à créer un réseau de personnes vivant avec le VIH informées et conscientes de leur pouvoir d’agir. Créé il y a plus de 15 ans, il compte plus de 1 000 diplômé·e·s à son actif. Il offre des formations en personne dans les trois provinces les plus peuplées du pays, de même que des formations en ligne dynamiques, en français et en anglais, à l’échelle du pays.

Qu’est-ce que le leadership? 

Hugues explique d’abord que pour lui, le leadership, c’est utiliser sa voix et son expérience pour outiller d’autres personnes et pour lutter contre les inégalités. Son parcours a commencé par une recherche de soutien après son diagnostic. C’est ainsi qu’Hugues a pris conscience du pouvoir de la solidarité communautaire. « En participant à des groupes de soutien entre pairs, j’ai reçu l’aide dont j’avais besoin et j’ai appris qu’en aidant les autres, je m’aidais moi-même », dit-il.

Dakota ajoute que, selon lui, le leadership vise à inspirer les autres à agir pour le changement. C’est également partager des compétences, renforcer le développement et la confiance en soi et favoriser la collaboration. Et militer pour l’inclusion et la diversité afin que soient représentées toutes les communautés affectées par le VIH. 

Des exemples inspirants du passé 

« Dans le passé, des agences gouvernementales, des organismes communautaires et des centres médicaux de la Colombie-Britannique ont apporté un soutien crucial aux personnes vivant avec le VIH et le sida », explique Dakota. « Les exemples incluent la B.C. Persons with AIDS Society, AIDS Vancouver et l’Hôpital St. Paul de Vancouver. Cet hôpital fournit des soins sans préjugés aux personnes vivant avec le VIH et le sida depuis les années 1980. » 

« À l’époque, il y avait des congrès sur le sida chaque année, note Dakota. Il y en a eu un mémorable et important à Vancouver en juillet 1996. On en parle aujourd’hui comme du moment où a été introduit le traitement antirétroviral hautement actif (HAART). Le HAART, premier traitement efficace et durable, a sauvé des vies et permis de renverser le cours du VIH vers le sida. » 

Hugues se souvient : « Lorsque j’ai commencé à m’informer sur le VIH et le sida, j’ai été heureux de constater que Montréal avait toujours été un centre de résistance et de leadership. J’ai découvert ACT UP Montréal et le fameux Manifeste de Montréal. Puis j’ai vu que de nombreux organismes communautaires s’appuyaient sur cet héritage. Ils offraient un soutien qui permettait aux personnes vivant avec le VIH de se rendre plus fortes les unes les autres. C’est alors que j’ai entendu parler de l’IDLP. J’ai décidé de me joindre à ce mouvement. »

Des changements dans le leadership du VIH et de la communauté gaie, dans le militantisme et la stigmatisation

Hugues et Dakota notent qu’au fil du temps, le mouvement pour la réponse au VIH est passé du militantisme à la défense des intérêts. Aujourd’hui, la défense des intérêts inclut des initiatives pour soutenir et renforcer la résilience des personnes vivant avec le VIH. Dakota explique que des outils comme la PrEP (prophylaxie pré-exposition) pour prévenir le VIH ont eu un impact positif sur la communauté gaie. « Ça a permis d’éliminer une grande partie du langage stigmatisant des sites de rencontre en ligne, dit-il. Leur approche est maintenant plus ouverte et plus inclusive. »

« Je crois que beaucoup d’hommes gais, séropositifs et séronégatifs, sont bien renseignés de nos jours. C’est grâce à des années d’éducation, note Hugues. La majeure partie de notre vie n’est pas affectée par le VIH parce que nous avons accès à des traitements efficaces. Les progrès de la médecine nous permettent de ne plus vivre dans la peur. Par contre, toutes les communautés n’ont pas été soutenues comme la communauté gaie. Il reste encore beaucoup à faire pour améliorer l’accès aux traitements. Nous devons aussi lutter contre la stigmatisation qui persiste. C’est pourquoi il faut aider les membres de chaque communauté à développer leurs compétences de leadership. Cela leur permettra de faire connaître leurs enjeux particuliers et d’y trouver réponse. »

Des exemples inspirants et des visions partagées d’aujourd’hui 

On trouve aujourd’hui de nombreux exemples inspirants de groupes communautaires de défense des intérêts en C.-B., signale Dakota. Citons notamment la Harvest Organic Food Co-op, l’Afro-Canadian Positive Network of BC et VANDU. Il existe aussi des groupes de soutien dirigés par des pairs et des programmes d’aiguilles et de seringues. Dakota précise que de nombreux organismes de soutien ont vu le jour au fil des années. Ils s’adressent aux populations marginalisées, aux immigrant·e·s, aux personnes autochtones et aux gens de communautés isolées. La plupart de ces organismes font partie du Pacific AIDS Network (PAN). Les participant·e·s de l’IDLP viennent de plusieurs de ces organismes. Après leur formation à l’IDLP, ils et elles retournent dans leurs communautés en tant que leaders émergent·e·s.

« Le nombre de nouveaux diagnostics de VIH chez les jeunes m’attriste, dit Hugues, d’autant plus qu’un grand nombre d’outils efficaces existent pour prévenir la transmission. Par contre, je suis inspiré par la réponse de cette génération à la pandémie de VIH. Les personnes ayant récemment reçu leur diagnostic documentent ouvertement leur vie dans les médias sociaux. C’est le cas de Zach Willmore, qui a commencé à raconter sa vie sur TikTok après son diagnostic en 2023. Ces personnes éduquent leurs pairs et militent pour de meilleurs services et une meilleure éducation sexuelle. Elles n’ont pas peur d’affirmer leur statut VIH et font preuve d’un véritable leadership. Cela montre à quel point nous avons progressé et comment la stigmatisation a diminué. Voir cette nouvelle génération réinventer le militantisme, la défense des intérêts et le leadership et les adapter à ses réalités m’apporte de l’espoir. »

Pour en savoir plus sur l’IDLP, visitez le www.pldi.ca.

Pour en savoir plus sur le Pacific AIDS Network, visitez le www.paninbc.ca