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Le darunavir (vendu sous le nom de Prezista) appartient à la classe de médicaments anti-VIH appelés inhibiteurs de la protéase. On prend le darunavir avec une faible dose d'un autre inhibiteur de la protéase appelé ritonavir (Norvir), car celui-ci fait augmenter le taux de darunavir dans le sang, ce qui rend possible une posologie uniquotidienne (une seule prise par jour). Pris de cette manière, le darunavir est un médicament anti-VIH puissant et constitue un élément important du régime thérapeutique de nombreuses personnes séropositives.
Des chercheurs aux États-Unis et en Europe ont mené une étude dénommée Flamingo pour évaluer l'impact des régimes à base de dolutégravir comme traitement initial de l'infection au VIH. Le régime utilisé comme comparateur dans l'étude Flamingo combinait le darunavir, le ritonavir et deux analogues nucléosidiques.
Les résultats après un an laissent croire que le dolutégravir et les régimes à base de darunavir sont tous les deux efficaces et généralement sécuritaires. Les régimes à base de dolutégravir se sont révélés statistiquement supérieurs aux régimes à base de darunavir. Nous parlerons des implications de ce résultat et d'autres plus tard dans ce rapport.
Les chercheurs ont analysé des données de santé recueillies auprès de participants séropositifs jamais traités qui ont été affectés au hasard à l'un de deux groupes pour recevoir les régimes suivants une fois par jour :
Le profil moyen des participants au début de l'étude était le suivant :
On avait recours aux analogues nucléosidiques suivants :
L'étude Flamingo devrait se poursuivre pendant plusieurs années. Nous rendons compte ici des résultats obtenus au cours des 48 premières semaines de l'étude.
À la semaine 48, les proportions de participants ayant une charge virale inférieure à 50 copies/ml étaient les suivantes :
Comme la proportion d'utilisateurs du dolutégravir ayant une charge virale indétectable était plus élevée à la semaine 48, les chercheurs ont jugé que le dolutégravir était « statistiquement » supérieur au darunavir.
Nous parlons des implications de cette supériorité statistique et des effets secondaires plus tard dans ce rapport.
Les chercheurs ont analysé les données en fonction de la charge virale initiale (de base) qu'avaient les participants lors de leur entrée dans l'étude.
Chez les participants dont la charge virale de base était élevée (plus de 100 000 copies/ml), la charge virale à la 48e semaine était inférieure à 50 copies/ml dans les proportions suivantes :
Chez les participants dont la charge virale de base était inférieure à 100 000 copies/ml, la charge virale à la 48e semaine était inférieure à 50 copies/ml dans les proportions suivantes :
On peut également examiner les résultats en fonction des analogues nucléosidiques utilisés, à savoir :
Kivexa
Truvada
Les augmentations des comptes de CD4+ étaient semblables dans les deux groupes, le gain moyen étant de 200 cellules à la semaine 48.
Deux participants dans chaque groupe ont vu leur charge virale chuter initialement sous la barre des 50 copies, mais elle a remonté par la suite et dépassait les 200 copies/ml après la 24e semaine de l'étude.
Voici la répartition de quelques effets secondaires courants :
Diarrhées
Nausées
Maux de tête
Voici la répartition des effets secondaires d'intensité modérée à grave :
Et la répartition des anomalies de laboratoire graves :
Cholestérol
LDL-C (le prétendu mauvais cholestérol)
ALT (alkaline aminotransférase, une enzyme du foie)
Créatine kinase (une enzyme dont les taux élevés pourraient suggérer une dégradation musculaire)
Aucun décès ne s'est produit à cause des médicaments à l'étude.
Le dolutégravir possède une activité anti-VIH puissante, mais on peut en dire autant du darunavir lorsqu'il est potentialisé par une faible dose (100 mg) de ritonavir. Notons aussi que les proportions de participants n'ayant pas obtenu de réponse virologique au traitement étaient semblables dans les deux groupes, à savoir :
En partie, c'est le nombre de participants qui ont quitté prématurément l'étude qui explique les résultats virologiques différents associés aux deux régimes à la semaine 48. Voici la répartition des abandons selon le régime :
Lors des essais cliniques, il arrive que les participants abandonnent prématurément le traitement pour diverses raisons, dont les réactions indésirables (effets secondaires, complications), la mort, un déménagement et d'autres. Comme les médicaments en question dans cette étude n'étaient pas létaux et que peu de patients ont changé de résidence, les chercheurs ont pu focaliser sur les réactions indésirables comme motivation des départs prématurés lors de cette étude. Voici des précisions :
Ces résultats portent à croire que les régimes à base de dolutégravir étaient plus faciles à tolérer.
La question suivante n'a pas de réponse claire :
La supériorité statistique veut-elle dire que le dolutégravir est supérieur au darunavir sur le plan clinique?
Le darunavir potentialisé demeure une option de traitement importante, et il se peut que les régimes qui en contiennent soient plus cléments (soulignons que de nombreuses mutations résistantes doivent être présentes avant que l'échec thérapeutique ne survienne), ce qui est généralement le cas des autres régimes à base d'inhibiteurs de la protéase potentialisés. Il reste que la puissance et la relative simplicité (aucun besoin de potentialisation) du dolutégravir pourraient le rendre attrayant aux yeux de certains médecins et patients.
Notons qu'une pilule uniquotidienne contenant les trois médicaments suivants est en voie de développement : dolutégravir + abacavir + 3TC
RÉFÉRENCE :
Feinberg J, Clotel B, Khuong M-A, et al. Once-daily dolutegravir (DTG) is superior to darunavir/ritonavir (DRV/r) in antiretroviral-naïve adults: 48-week results from Flamingo (ING114915). In: Program and abstracts of the 53rd Interscience Conference on Antimicrobial Agents and Chemotherapy, 10-13 September 2013, Denver, Colorado, U.S. Abstract H-1464a.