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Comme nous l’avons mentionné dans le bulletin précédent de Nouvelles CATIE, le cytomégalovirus (CMV) fait partie de la famille des virus de l’herpès. L’infection au CMV est relativement courante chez les adultes mais ne cause pas de maladie évidente grave dans la majorité des cas. Or, chez les personnes au système immunitaire affaibli — telles les personnes séropositives non traitées et les receveurs de greffes d’organes sous traitement immunosuppresseur — le CMV peut causer de graves complications.
À l’époque d’avant l’arrivée des combinaisons de puissants médicaments contre le VIH (couramment appelées thérapies antirétrovirales ou TAR), une complication du sida, appelée rétinite à CMV, suscitait beaucoup d’inquiétudes auprès des gens car elle pouvait causer la cécité (la rétine étant est la partie de l’œil qui est sensible à la lumière).
Au Canada et dans les autres pays à revenu élevé, cependant, les chercheurs savent que les complications infectieuses du CMV sont très rares de nos jours chez les personnes séropositives suivant une thérapie antirétrovirale. La TAR réduit énormément la production de VIH et permet au système immunitaire de se réparer suffisamment pour que les infections liées au sida se fassent peu communes et que la durée de survie des personnes sous traitement s'approche de celles des personnes séronégatives.
Les résultats d’études par observation menées auprès de personnes séronégatives portent à croire que le CMV joue un rôle dans l’accélération de la progression des maladies cardiovasculaires. Certaines recherches donnent aussi à penser que le CMV peut provoquer le vieillissement prématuré du système immunitaire.
Des chercheurs à Rome suivent la santé de milliers d’Italiens séropositifs inscrits à une base de données appelée ICONA. La plus récente analyse de celle-ci a porté spécifiquement sur les personnes séropositives co-infectées par le CMV. Les chercheurs italiens ont trouvé que les participants ayant cette co-infection couraient un risque accru de complications non liées au sida. Dans certains cas, les complications en question ont entraîné la mort. Plus particulièrement, la co-infection au CMV était associée à une augmentation du risque de complications d’ordre cardiovasculaire, notamment la crise cardiaque et l’accident vasculaire cérébrale ou AVC.
L’équipe de la base de données ICONA collecte des informations se rapportant à la santé de personnes séropositives depuis avril 1997. Elle inclut à l’heure actuelle des données recueillies auprès de 10 000 personnes vivant un peu partout en Italie.
Les chercheurs ont analysé les données recueillies jusqu’en octobre 2012 auprès des participants qui avaient les caractéristiques suivantes lors de leur admission à l’étude :
Les chercheurs ont été en mesure d’analyser les données recueillies auprès de 6 111 participants séropositifs, dont 5 119 personnes co-infectées par le CMV et 992 personnes non infectées.
Les participants avaient le profil moyen suivant :
Les participants ont été suivis sur une période allant de deux à 10 ans.
Les événements suivants se sont produits au cours de l’étude :
Les infections courantes liées au sida incluaient les suivantes :
On n’a constaté aucune différence significative entre le nombre d’événements ou de décès attribuables au sida survenus chez les personnes co-infectées par le CMV et celles n’ayant pas la co-infection.
Les événements suivants se sont produits au cours de l’étude :
Selon les estimations des chercheurs, l’un ou l’autre des événements ci-dessus se serait produit chez les participants sur une période d’une décennie dans les proportions suivantes :
Cette différence s'est révélée significative du point de vue statistique, c’est-à-dire non attribuable au hasard seulement.
Dans l’ensemble, la co-infection au CMV a été associée à une augmentation de 50 % du risque de complications graves ou de mortalité de causes non liées au sida.
Lorsque les chercheurs ont tenu compte des autres facteurs susceptibles d’influencer les résultats de leur étude, tels que la TAR, la charge virale en VIH, le tabagisme et le compte de CD4+, la séropositivité au CMV est demeurée un facteur important quant à la survenue d’événements graves.
Des analyses poussées ont tenu compte de la co-infection par les virus causant l’hépatite. Selon ces analyses, les personnes ayant le CMV qui n’avaient ni l’hépatite B ni l’hépatite C couraient elles aussi un risque considérablement accru de complications ou de mortalité non liées au sida. Spécifiquement, chez les participants qui n’étaient pas co-infectés par un virus causant l’hépatite, la présence du CMV était associée à deux fois plus de risques d’événements graves non liés au sida.
La liste suivante indique certaines des graves maladies et complications survenues chez les personnes co-infectées par le VIH et le CMV.
Complications cardiovasculaires, cardiopulmonaires et cérébrovasculaires :
Cancers :
Des affections neurologiques n’ayant aucun rapport avec les maladies cardiovasculaires se sont également produites, y compris les suivantes :
Même si une autre étude menée auprès de participants séropositifs avait déjà établi un lien entre l’infection au CVM et un risque accru de maladies cardiovasculaires (tel que déterminé par des tests de laboratoire), cette étude italienne est la première à faire le lien entre la co-infection au CMV chez des personnes séropositives et des résultats cliniques – maladies ou décès – non liés au sida.
Il faut se rappeler que les chercheurs ne savent pas exactement de quelle façon l’infection au CMV causerait des complications cardiovasculaires, mais plusieurs hypothèses ont été avancées, dont certaines incriminent l’inflammation induite par le CMV.
L’équipe italienne encourage les médecins et infirmiers qui s'occupent de personnes séropositives à suivre de près leurs patients atteints également du CMV. De cette manière, espèrent les chercheurs italiens, ils pourront mieux prévenir les complications graves découlant de maladies cardiovasculaires, ainsi que les décès qui en résultent. Les chercheurs conseillent également aux professionnels de la santé d’aider leurs patients à réduire leur risque global de maladies cardiovasculaires.
Les résultats de l’étude ICONA devraient être confirmés par d’autres bases de données importantes. L’ICONA s’ajoute à la masse croissante de données probantes indiquant que le CMV joue potentiellement un rôle dans la santé des personnes vivant avec le VIH. L’ICONA et d’autres études ont suscité un intérêt croissant envers la recherche de nouveaux traitements plus sécuritaires contre le CMV. Dans notre prochain bulletin de Nouvelles CATIE, nous explorerons les thérapies actuelles et émergentes visant à contrôler l’infection au CMV.
Ressource
Le VIH et la maladie cardiovasculaire – Feuillet d’information de CATIE
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :