Attitudes à l’égard du dépistage rapide du VIH durant le travail

Les chercheurs du Canada et d’autres pays à revenu élevé estiment qu’une fraction considérable des personnes ayant le VIH (environ 25 % dans ce pays, selon l’Agence de la santé publique du Canada) ignorent qu’elles sont infectées. Si l’on espère ralentir la propagation du VIH et apporter les bienfaits de la TAR à davantage de personnes, les autorités de la santé devront insister davantage sur la réduction des barrières au dépistage du VIH, au counseling connexe et à l’orientation rapide des patients vers des services de soins et de traitement.

Comme nous l’avons déjà mentionné dans ce numéro de TraitementSida, le dépistage du VIH, le counseling, l’utilisation d’une combinaison de médicaments anti-VIH puissants (couramment appelée TAR) et la prise d’autres mesures peuvent améliorer la santé d’une femme séropositive enceinte et réduire considérablement le risque qu’elle donne naissance à un bébé infecté par le VIH.

Toutefois, afin qu’une femme séropositive et son fœtus puissent bénéficier de la TAR, elle doit connaître tout d’abord son statut VIH. De nombreux hôpitaux ont accueilli des femmes lors d’un stade très avancé de la grossesse ou dont le travail avait commencé qui ignoraient tout à fait leur statut VIH. Dans un tel cas, il faut effectuer un dépistage rapide du VIH afin d’aider les médecins à déterminer si des mesures sont nécessaires pour protéger le fœtus pendant et après l’accouchement.

À l’été 2011, dans le cadre d’une étude, des chercheurs du St. Michael’s Hospital de Toronto ont sondé 152 femmes enceintes au sujet de leurs attitudes à l’égard de la possibilité et de l’acceptabilité de se faire tester pour le VIH pendant le travail. Les chercheurs ont signalé que près de 60 % des femmes accepteraient de passer un test de dépistage. Si ce dernier s’avérait positif, 94 % des femmes consentiraient à suivre une TAR et utiliseraient une préparation pour nourrissons pour nourrir leur bébé (rappelons que le VIH peut se transmettre par le lait maternel).

Résultats

Un total de 92 femmes ont rempli le questionnaire. Elles avaient en moyenne 30 ans, la majorité avait une éducation post-secondaire et, selon les chercheurs, « elles étaient toutes séronégatives ».

Au total, 80 % des femmes ont dévoilé qu’elles avaient déjà été testées pour le VIH (et étaient séronégatives). Soixante et onze pour cent des femmes « étaient conscientes d’avoir été testées [pour le VIH] au cours de leur grossesse actuelle ».

Les principales raisons données par les femmes pour refuser l’offre d’un test de dépistage du VIH incluaient les suivantes :

  • 39 % ne voulaient pas connaître leur résultat
  • 29 % pensaient qu’elles éprouveraient trop de douleur pendant le travail

Les chercheurs ont constaté que les barrières au dépistage du VIH étaient centrées sur les préoccupations suivantes soulevées par les femmes :

  • désapprobation de leur statut VIH dans la communauté
  • réaction négative à un éventuel résultat positif de la part de leur partenaire

Les femmes qui affirmaient qu’elles ne consentiraient probablement pas au dépistage du VIH ont soulevé les préoccupations suivantes :

  • elles voulaient « en savoir plus sur les bienfaits du diagnostic précoce [du VIH] »
  • elles voulaient savoir pendant combien de temps elles seraient obligées d’attendre le résultat du test
  • elles avaient des préoccupations concernant le processus de dépistage
  • elles avaient des préoccupations concernent la confidentialité du résultat du test

Comparativement aux femmes qui ne voulaient pas passer de dépistage du VIH, les femmes qui étaient disposées à se faire tester s’intéressaient considérablement plus à faire ce qui suit :

  • en apprendre plus sur les options de traitement du VIH
  • en apprendre plus sur l’accès aux services de santé
  • obtenir de l’aide et des conseils concernant la divulgation d’un éventuel résultat positif à son partenaire

Les chercheurs ont interrogé les femmes sur les mesures qui rendraient l’offre d’un dépistage du VIH plus acceptable. Voici quelques-unes de leurs réponses :

  • si des renseignements sur le processus de dépistage étaient mis à leur disposition
  • si elles recevaient un counseling personnalisé
  • si elles pouvaient participer à une discussion pour en apprendre plus sur la prévention de la transmission mère-enfant du VIH

La majorité des femmes disaient qu’elles aimeraient discuter du résultat du test avec un médecin, de préférence dans un contexte privé.

Les résultats de cette étude soulignent le genre de renseignements et de counseling qui mettraient les femmes enceintes à l’aise face à l’offre d’un test de dépistage du VIH.

Points à retenir

Comme les chercheurs ont sollicité la réponse des femmes à l’idée hypothétique de passer un test du VIH, ils n’étaient pas certains de leur réponse à l’offre concrète d’un test durant le travail.

Les chercheurs admettent que leur étude « n’a pas inclus de nombreuses femmes qui seraient considérées comme des personnes à risque élevé en ce qui concerne le VIH, telles que [les femmes qui utilisent des drogues, les travailleuses du sexe] et les réfugiées originaires [de régions où le VIH est relativement courant]. »

Les résultats de cette étude sont utiles parce qu’ils pourront être utilisés pour concevoir, avec l’aide des femmes enceintes, des programmes sensibles de dépistage du VIH visant cette population.

—Sean R. Hosein

RÉFÉRENCE :

Iqbal S, De Souza LR, Yudin MH. Acceptability, predictors and attitudes of Canadian women in labour toward point-of-care HIV testing at a single labour and delivery unit. Canadian Journal of Infectious Diseases & Medical Microbiology. 2014 Jul;25(4):201-6.