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CATIE
  • Des personnes recevant un diagnostic de VIH résistant aux médicaments se font prescrire un régime complexe
  • Des médecins de Winnipeg ont remplacé le traitement de 22 patients par un régime simplifié mais puissant
  • Tous les patients ont toléré le régime et maintenu une charge virale indétectable

Depuis plusieurs années, des médecins de Winnipeg ont diagnostiqué des personnes séropositives qui avaient besoin de prendre un régime complexe pour le traitement initial du VIH (TAR). Ce régime inhabituel a été choisi comme traitement de première intention parce qu’une analyse génétique a révélé que le VIH de ces personnes était partiellement ou totalement résistant au ténofovir, un analogue nucléosidique couramment utilisé, et aux autres membres de la même classe de médicaments. Toutefois, aucune de ces personnes n’avait un VIH qui était résistant aux autres classes de médicaments comme les inhibiteurs de la protéase et les inhibiteurs de l’intégrase. Se fondant sur les tests de résistance réalisés sur le virus de leurs patients, les médecins ont confectionné des régimes complexes comme les suivants :

  • darunavir + ritonavir à faible dose + étravirine (Intelence) + dolutégravir (Tivicay)
  • Genvoya (elvitégravir + cobicistat + TAF + FTC) + darunavir
  • darunavir + ritonavir à faible dose + étravirine + raltégravir

Dans certains cas, ces régimes nécessitaient la prise de jusqu’à six comprimés par jour et coûtaient entre 2 100 $ et 2 400 $ CA par patient par mois.

Les patients qui ont atteint et maintenu une charge virale indétectable pendant 12 mois consécutifs sous l’effet de ces régimes initiaux se sont ensuite fait offrir un régime simplifié mais toujours puissant. La décision de changer pour le régime simplifié « était fondée sur un consensus entre le patient et le clinicien », selon les médecins. Sur les 25 patients traités par les régimes complexes initiaux, 22 ont atteint et maintenu une charge virale indétectable. Sur ces 22 patients, 13 ont accepté de changer pour le régime suivant :

  • darunavir 800 mg + ritonavir 100 mg + dolutégravir 50 mg

Tous les médicaments de cette combinaison surnommée « double D » par les médecins se prenaient une fois par jour. La faible dose de ritonavir avait pour rôle d’augmenter et de maintenir le taux de darunavir dans le sang afin qu’une seule prise quotidienne soit possible. Lorsqu’il est utilisé de cette manière, le ritonavir n’exerce aucune activité antivirale contre le VIH. Ce sont le darunavir (un inhibiteur de la protéase puissant) et le dolutégravir (un inhibiteur de l’intégrase puissant) qui font le travail et maintiennent la suppression du VIH. Cette combinaison non standard est puissante et agira sans doute efficacement pendant de nombreuses années si l’observance thérapeutique est bonne.

Tous les patients ont toléré le nouveau régime, et aucun effet secondaire n’a été signalé pendant une année de suivi. De plus, les patients ont maintenu leur charge virale indétectable pendant au moins un an après avoir changé pour le régime « double D ». Ces résultats obtenus à Winnipeg sont encourageants et étayés par des études menées en Europe. Ce serait merveilleux si l’équipe de Winnipeg continuait de suivre ces patients afin de pouvoir produire des résultats à long terme concernant « double D » dans plusieurs années.

En Italie

Les chercheurs de centres cliniques à Milan, à Florence, à Gênes et à d’autres endroits en Italie ont utilisé la combinaison darunavir + ritonavir + dolutégravir chez 130 patients séropositifs qui voulaient ou devaient changer leur régime initial, principalement pour les raisons suivantes :

  • simplification du régime
  • échec virologique
  • effets secondaires

Les patients ont reçu un des deux régimes suivants :

  • darunavir 800 mg + ritonavir 100 mg + dolutégravir 50 mg; tous les médicaments une fois par jour : 113 personnes
  • darunavir 600 mg + ritonavir 100 mg + dolutégravir 50 mg; tous les médicaments une fois par jour : 17 personnes

Les chercheurs ont utilisé plusieurs épreuves différentes pour mesurer la charge virale dans les échantillons de sang, y compris les suivants :

  • Abbot HIV-1 RT-PCR, avec une limite inférieure de 37 copies
  • COBAS TaqMan HIV-1 Test, avec une limite inférieure de 20 copies
  • Une épreuve à copie unique avec une limite inférieure de détection de 1 copie; les valeurs inférieures à celle-ci étaient interprétées comme « aucun virus détecté ». Remarque : Dans les cas où ce genre de test donnait un résultat inférieur à 1 copie (« aucun virus détecté »), il faut préciser que les patients en question n’étaient pas guéris parce que seuls les échantillons de sang étaient testés. Rappelons que la vaste majorité des copies de VIH résident dans les lymphocytes et d’autres cellules du système immunitaire situées principalement dans les ganglions lymphatiques, la rate et certains tissus adipeux. De plus, comme il existe des cellules immunitaires dont le rôle consiste à protéger les systèmes organiques essentiels contre les microbes, des tissus comme les poumons, les reins, le foie et le cerveau contiennent également des cellules infectées par le VIH.

Après un an de traitement utilisant les nouveaux régimes, les résultats virologiques ont été les suivants :

  • 76 % n’avaient « aucun virus détecté » (moins de 1 copie/ml)
  • 15 % avaient une charge virale entre 1 et 49 copies/ml
  • 6 % avaient une charge virale de 50 copies/ml ou plus

(Le total de ces chiffres n’est pas 100 % parce que quatre patients ont abandonné.)

Les chercheurs n’ont pas constaté d’effets secondaires neurologiques importants comme ceux signalés par d’autres centres de recherche européens qui prescrivaient des régimes standards comportant le dolutégravir (c’est-à-dire le dolutégravir en combinaison avec deux analogues nucléosidiques).

En Allemagne

Les chercheurs de plusieurs cliniques allemandes situées à Munich, à Berlin, à Cologne et à Bonn mènent actuellement une étude randomisée appelée DUALIS auprès de 320 personnes. Dans cette étude, les chercheurs sont en train de comparer l’innocuité et l’efficacité des combinaisons suivantes prises une seule fois par jour :

  • darunavir + ritonavir + dolutégravir
  • darunavir + ritonavir avec soit Truvada (TDF + FTC) soit Kivexa (abacavir + 3TC)

Les chercheurs ont mené une sous-étude auprès de 10 participants (sept hommes et trois femmes) afin de mesurer les taux de dolutégravir et de darunavir dans le sang lorsque les participants les prenaient avec de la nourriture. Les chercheurs ont trouvé que les médicaments étaient bien absorbés et que leurs concentrations étaient « adéquates » pour supprimer le VIH.

DUALIS devrait se terminer plus tard en 2018. Espérons que cette étude fournira des données probantes concernant le régime « double D ».

—Sean R. Hosein

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