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  • La prophylaxie post-exposition (PPE) est une option efficace pour prévenir l’infection par le VIH après une exposition au virus
  • Une équipe de recherche de Toronto a offert des ordonnances d’avance pour permettre à des gens d’amorcer la PPE de façon autonome
  • Aucun·e des 111 participant·e·s n’a contracté le VIH pendant une période de sept ans

En matière de prévention du VIH, les deux méthodes suivantes sont extrêmement efficaces :

  • prophylaxie pré-exposition (PrEP)
  • prophylaxie post-exposition (PPE)

La PrEP consiste à prendre un comprimé contenant deux médicaments anti-VIH (ténofovir + FTC), le plus souvent quotidiennement. Le ténofovir est offert en deux formulations : la version originale s’appelle TDF (fumarate de ténofovir disoproxil), et la version plus récente porte le nom de TAF (ténofovir alafénamide). Il existe un autre schéma posologique que l’on peut choisir à la place de la PrEP quotidienne; il s’agit de la PrEP « à la demande ». Dans ce cas, on prend la PrEP avant et après une exposition éventuelle au VIH. Les personnes sous PrEP doivent visiter une clinique et un laboratoire tous les trois mois pour passer des tests de dépistage du VIH et des infections transmissibles sexuellement (ITS), ainsi que d’autres examens. Pour en savoir plus sur la PrEP, cliquez ici.

Dans le cas de la PPE, il s’agit de commencer un traitement préventif associant trois médicaments anti-VIH dans les 72 heures suivant une exposition possible au virus. On doit prendre la PPE pendant 28 jours consécutifs. Une fois la PPE amorcée, des rendez-vous médicaux et des tests de laboratoire sont nécessaires, notamment pour dépister le VIH ou des ITS, éventuellement. Pour en savoir plus sur la PPE, cliquez ici.

Même si ces deux méthodes préventives sont très efficaces lorsqu’elles sont utilisées comme il se doit, il existe des obstacles à leur usage. Notons, à titre d’exemple, que certaines personnes utilisant la PrEP quotidienne ont de la difficulté à prendre des comprimés tous les jours. Quant à la version à la demande de la PrEP, elle nécessite la capacité de prévoir des expositions futures éventuelles au VIH, mais certaines personnes sont incapables de faire cela de manière fiable. Le coût est un autre obstacle, car les médicaments utilisés pour traiter et prévenir le VIH sont chers et ne sont pas intégralement subventionnés dans tous les cas. Même s’il existe des formulations génériques de la PrEP, certaines personnes les trouvent chères aussi.

D’ordinaire, les personnes qui ont besoin de suivre une PPE doivent se rendre dans le service des urgences d’un hôpital ou d’un centre de soins d’urgence pour obtenir une ordonnance. À la suite de la première consultation, d’autres rendez-vous sont nécessaires pour passer des tests de dépistage du VIH et des ITS. Or, des études ont révélé que certaines personnes n’étaient pas en mesure de respecter ces rendez-vous de suivi.

PPE de poche

À Toronto, une équipe de recherche œuvrant dans deux grandes cliniques de prévention du VIH a créé et déployé une méthode surnommée la « PPE en poche ou de poche » (PEP in Pocket ou PIP en anglais).

Selon l’équipe de recherche, lors des consultations dans leurs cliniques, elle interrogeait les patient·e·s sur la probabilité d’expositions futures au VIH. Cela servait de point de départ à une discussion sur la prévention du VIH et les options optimales. Si un·e patient·e s’attendait à vivre un faible nombre d’épisodes d’exposition éventuelle au VIH, soit jusqu’à quatre par année, les médecins soulevaient la possibilité d’utiliser la PPE de poche. Si la personne en question le souhaitait et qu’elle était jugée admissible, un·e médecin ou un·e infirmier·ère lui donnait des conseils sur l’usage efficace de la PPE de poche et au sujet de l’importance de la commencer dans les 72 heures suivant une exposition éventuelle. Le counseling stipulait aussi que la PPE de poche devait durer 28 jours consécutifs et qu’il fallait prendre les médicaments tous les jours. Une fois le consentement du patient ou de la patiente obtenu, les médecins lui donnaient ce qui suit :

  • ordonnance pour 28 jours de la PPE de poche, laquelle consiste en trois médicaments anti-VIH
  • instructions sur le moment d’amorcer la PPE de poche
  • renseignements sur la nécessité de rendez-vous de suivi à la clinique après l’amorce de la PPE de poche

Les cliniques prescrivaient typiquement les schémas thérapeutiques suivants pour la PPE de poche :

  • Biktarvy : TAF + FTC + bictégravir
  • dolutégravir (Tivicay) plus TDF + FTC (Truvada; offert également en versions génériques)

Les médecins encourageaient les patient·e·s à faire exécuter leurs ordonnances et à garder leurs médicaments faciles d’accès.

S’il se trouvait que des gens ne disposaient pas d’une assurance médicaments privée, un·e travailleur·se social·e de la clinique les soutenait pour faciliter leur accès à un programme de subvention des médicaments gouvernemental.

Comme nous l’avons déjà mentionné, les professionnel·le·s de la santé et les patient·e·s discutaient des expositions au VIH qu’ils ou elles seraient susceptibles d’avoir à l’avenir. Après cette discussion, certaines personnes choisissaient de passer de la PIP à la PrEP ou le contraire.

L’équipe de recherche évaluait également les patient·e·s pour déceler d’éventuels problèmes de santé mentale ou troubles liés à l’usage de substances et, le cas échéant, diriger les personnes en question vers des soins.

Les personnes qui se faisaient prescrire la PPE de poche avaient des consultations régulières à la clinique, soit tous les cinq à six mois.

Découvertes par l’équipe de recherche

L’équipe de recherche a examiné le contenu de leur base de données établie entre février 2016 et décembre 2022. Durant cette période, la PPE de poche a été prescrite à 111 personnes âgées en moyenne de 37 ans.

Chez 96 % de ces personnes, c’est le sexe masculin qui leur a été assigné à la naissance.

Même si 111 personnes se sont fait prescrire la PPE de poche, seules 35 d’entre elles l’ont commencée, et 69 cycles de PPE de poche ont été suivis jusqu’au bout durant la période à l’étude (certaines personnes ont pris la PPE de poche plus d’une fois).

Bien que tous les cycles de PPE de poche aient été amorcés à la suite d’une relation sexuelle sans condom, l’équipe de recherche avait prévenu les participant·e·s que l’usage de matériel non stérilisé pour s’injecter des drogues justifierait également le recours à la PPE de poche.

Le schéma thérapeutique le plus utilisé pour la PPE de poche fut l’association dolutégravir + TDF + FTC.

La PPE de poche a été discontinuée prématurément dans cinq cas. Dans quatre d’entre eux, les médecins ont jugé que l’exposition potentielle au VIH comportait un faible risque d’infection. Dans le cinquième cas, la personne en question a cessé de prendre la PPE de poche à cause d’effets secondaires.

Aucune des personnes qui ont utilisé la PPE de poche n’a contracté le VIH.

Changement de méthode préventive

Au cours de l’étude, 34 personnes ont passé de la PPE de poche à la PrEP, et 33 autres personnes ont fait l’inverse. Selon l’équipe de recherche, ces changements de modalités de prévention se sont faits « sans heurts » et étaient « fondés sur des décisions prises en commun par les patient·e·s et leurs prestataires de soins ». L’équipe a précisé que les raisons les plus courantes pour passer à une autre méthode étaient « des changements dans la situation amoureuse et/ou dans le nombre de partenaires sexuel·le·s actuel·e·s ou prévu·e·s ».

Pourquoi envisager la PPE de poche?

Selon l’équipe de recherche, la PPE de poche « pourrait être une option appropriée pour certaines personnes lorsque la PrEP quotidienne ou à la demande ne conviennent pas ». L’équipe a en outre reconnu que « la PrEP à la demande nécessite de deux à 24 heures de prévoyance pour amorcer la prise de médicaments avant toute exposition éventuelle, ce qui n’est pas toujours possible dans les situations de bris de condom, d’agression sexuelle, d’exposition par injection de drogues ou d’activités sexuelles spontanées ».

L’équipe de recherche a ajouté que « la PPE de poche facilite l’interaction avec le système de santé pour les personnes à risque de contracter le VIH grâce aux dépistages du VIH et des ITS effectués tous les cinq à six mois ». L’équipe a fait valoir que « certaines personnes utilisant la PPE de poche ne souhaitent pas avoir recours à la PrEP et risquent de ne pas pouvoir consulter un·e professionnel·le de la santé de façon régulière ».

L’équipe de recherche a également affirmé que la PPE de poche aidait les gens à « prendre leurs soins en main de façon autonome ».

À l’avenir

Dans l’analyse dont il est question ici, l’équipe de recherche a constaté que la plupart des personnes qui avaient recours à la PPE de poche étaient des hommes gais, bisexuels et d’autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. « D’autres études sont nécessaires pour déterminer si la PPE de poche peut convenir à d’autres populations », a-t-elle souligné.

—Sean R. Hosein

Ressources

Prophylaxie pré-exposition contre le VIH (PrEP) – ressources, CATIE

Prophylaxie post-exposition contre le VIH (PPE) – ressources, CATIE

HIV prevention with postexposure prophylaxis-in-pocket (PIP)BMJ (en anglais seulement)

RÉFÉRENCE :

Billick MJ, Fisher KN, Myers S et al. Brief Report: Outcomes of individuals using HIV postexposure prophylaxis-in-pocket (“PIP”) for low-frequency, high-risk exposures in Toronto, Canada. JAIDS. 2023 Nov 1;94(3):211-213.